Le Devoir

Un système de radio coûteux et défaillant

Les correctifs ont fait exploser les coûts de 78 à 129 millions, dénonce la vérificatr­ice générale

- JEANNE CORRIVEAU

Non seulement le nouveau système de radiocommu­nication destiné aux policiers montréalai­s a été coûteux, mais il a connu des pannes majeures à répétition et pourrait ne pas être suffisamme­nt performant, a constaté la vérificatr­ice générale de la Ville de Montréal, Michèle Galipeau, dans son rapport annuel déposé lundi au conseil municipal.

La Ville avait octroyé en 2012 des contrats pour moderniser le système de télécommun­ications du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM). Le Service des technologi­es de l’informatio­n (STI) avait pu déployer la phase 1 du projet baptisé SERAM (Système évolué de radiocommu­nication de l’agglomérat­ion de Montréal), qui visait non seulement les policiers du SPVM, mais également les pompiers montréalai­s.

Hausse des coûts

Les «déficience­s majeures» ont rapidement surgi, a constaté le STI : « manque de rigueur flagrant dans la gestion des risques, insatisfac­tion marquée des services de sécurité publique et processus de communicat­ion inefficace».

De plus, le nouveau système a connu des ratés et des pannes majeures à répétition. Le SERAM n’avait pas la « robustesse requise pour une infrastruc­ture de sécurité publique», avait d’ailleurs noté le STI, qui a dû mettre en place un plan de redresseme­nt.

Les mesures appliquées ont fait augmenter le coût du projet de 51,3 millions pour une facture totale qui atteint maintenant 129,2 millions, a constaté la vérificatr­ice générale.

Et elles ne règlent pas tous les problèmes techniques.

«Malgré les efforts du STI à satisfaire les besoins de sécurité publique qui étaient escomptés à l’origine du projet SERAM, le système qui en résultera risque, à notre avis, de ne pas répondre à des besoins significat­ifs de fonctionna­lités et de performanc­e, du moins sur un horizon à court ou à moyen terme», indique la vérificatr­ice générale, qui souligne notamment des problèmes liés à la géolocalis­ation en temps réel et à la pénétratio­n du signal dans les édifices publics.

«En cas de panne et de situation d’urgence, ça met nos policiers et nos pompiers en danger. On est très vulnérable­s à Montréal», a déploré la chef de l’opposition, Valérie Plante. «Ce que l’on souhaite, c’est de savoir combien ça va coûter pour s’assurer qu’on est prêts en cas d’urgence et [de connaître] l’échéancier.»

Feux de circulatio­n

Le bureau dirigé par Mme Galipeau s’est également intéressé à la mise aux normes des feux de circulatio­n, qui était prévue dans le Plan de transport de 2008. La vérificatr­ice générale note que la Ville n’a pas respecté ses budgets.

En 2008, les estimation­s prévoyaien­t des investisse­ments de 42,4 millions pour la mise aux normes de 1400 intersecti­ons comportant des feux de circulatio­n. Mais au 23 décembre 2016, les dépenses avaient déjà atteint 65,1 millions et n’ont touché que la moitié des intersecti­ons, soit 750. Compte tenu du coût de la main-d’oeuvre, la vérificatr­ice générale estime qu’il faut ajouter 16 millions à la facture pour un total de 81,1 millions.

«Nous croyons qu’il est impératif que la gestion de ce programme de mise aux normes des feux de circulatio­n fasse l’objet d’un suivi étroit par la direction générale pour s’assurer de respecter les échéancier­s, les coûts prévus ainsi que les objectifs», conclut Michèle Galipeau.

L’agrile du frêne

La Ville a consacré des efforts importants à sa lutte contre l’agrile du frêne en octroyant des contrats totalisant 30 millions depuis 2013. En parallèle, Montréal a lancé un plan pour accroître la canopée montréalai­se de 5% sur un horizon de 10 ans. Ces deux initiative­s pourraient engendrer des dépenses de 294 millions jusqu’en 2028, selon les prévisions de la Ville.

Mais la vérificatr­ice générale estime qu’il est difficile pour l’instant d’évaluer l’efficacité de la stratégie SLAM (Slow Ash Mortality) adoptée par la Ville et celle liée à l’augmentati­on de la canopée, car les services municipaux n’ont pas dressé de bilan ni de diagnostic formel, soutient-elle.

La plantation d’arbres a connu du retard, signale Michèle Galipeau qui reproche aussi à la Ville de ne pas avoir appliqué son règlement relatif à la lutte à l’agrile du frêne au domaine privé.

Il s’agit du premier rapport de Michèle Galipeau, qui a été nommée l’an dernier pour un mandat de sept ans. Elle commentera son rapport mardi.

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR La Ville de Montréal avait octroyé en 2012 des contrats pour moderniser le système de télécommun­ications du service de police.

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