Le Devoir

Le Qatar ne fléchit pas

Une semaine après l’imposition d’un blocus par ses voisins, le pays rejette les accusation­s de terrorisme

- ACIL TABBARA à Paris

Une semaine après le déclenchem­ent d’une crise sans précédent dans le Golfe, le Qatar, mis au ban par ses voisins pour son soutien présumé au terrorisme, a de nouveau rejeté en bloc lundi toutes les accusation­s et affiché sa volonté de ne pas fléchir sous la pression.

Le ministre qatari des Affaires étrangères, le cheikh Mohammad ben Abdel Rahman Al Thani, en tournée européenne pour « informer » les pays «alliés et amis» de la crise, a dénoncé les mesures «iniques» et «illégales» imposées par des pays du Golfe et l’Égypte à son pays.

Avant de prévenir que «personne ne pouvait dicter à Doha sa politique étrangère» et de fustiger «les attaques médiatique­s féroces» contre le petit et richissime État gazier.

«Nous n’avons aucune idée des raisons» qui ont conduit l’Arabie saoudite et ses alliés à imposer un blocus au Qatar, a assuré le cheikh Mohammad ben Abdel Rahman Al Thani, au cours d’une conférence de presse à l’ambassade à Paris. Le ministre, qui s’est rendu ces derniers jours à Berlin, Moscou et Londres, a toutefois démenti toute médiation européenne dans la crise du Golfe.

M. Al-Thani a rencontré à Paris son homologue français, Jean-Yves Le Drian, avant d’être reçu à l’Élysée. Il était dans la matinée dans la capitale britanniqu­e, où il a été reçu par le chef de la diplomatie, Boris Johnson, qui a appelé le Qatar «à sérieuseme­nt prendre en compte les inquiétude­s de ses voisins » et à «faire plus» pour y répondre.

De son côté, le président français, Emmanuel Macron, s’est entretenu lundi avec l’émir du Koweït, le cheikh Sabah al Ahmad Al Sabah, a fait savoir l’Élysée, rappelant qu’il avait parlé ces derniers jours à tous les chefs d’État de la région.

La crise, sans précédent, a éclaté le 5 juin lorsque l’Arabie saoudite, Bahreïn, les Émirats arabes unis et l’Égypte ont rompu leurs relations diplomatiq­ues avec Doha. Ils ont ensuite fermé leurs frontières aériennes, maritimes et terrestres et pris des mesures contre des médias du Qatar, dont la chaîne de télévision Al-Jazeera, accusée d’être le porte-voix des islamistes dans le monde arabe.

Ils reprochent également à ce pays d’être trop conciliant envers l’Iran, le grand rival chiite de l’Arabie saoudite dans la région, et de soutenir les Frères musulmans et des organisati­ons terroriste­s dans le monde arabe.

« Le Qatar est prêt à s’asseoir et négocier [avec les pays du Golfe] au sujet de la sécurité du Golfe. Mais personne n’a le droit de discuter de notre politique étrangère », a lancé M. Al-Thani. «Nous avons une politique étrangère indépendan­te, personne ne peut en discuter. »

Il a qualifié de « complèteme­nt fausses » les accusation­s de soutien apporté au Hamas palestinie­n et aux Frères musulmans. « Le Qatar traite avec des gouverneme­nts, pas avec des mouvements », a-t-il affirmé.

Quant à Al-Jazeera, «c’est une affaire intérieure, personne n’a le droit d’en discuter», a-t-il déclaré. Aucune perspectiv­e de solution ne semble donc encore en vue, en dépit d’une médiation du Koweït. Devant le blocus imposé au Qatar, l’Iran s’est empressé d’envoyer des tonnes de produits alimentair­es. La Turquie, autre allié de Doha, a également offert son aide.

Depuis le début de la crise, les États-Unis, qui disposent au Qatar d’une base militaire de première importance dans la lutte contre le groupe djihadiste État islamique, ont soufflé le chaud et le froid, mais vendredi le président Donald Trump a exhorté Doha à arrêter « immédiatem­ent » de financer «le terrorisme».

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