Le Devoir

Ottawa s’attaque à la violence basée sur le sexe

Le gouverneme­nt dévoilera une nouvelle stratégie de 101 millions sur cinq ans

- JOANNA SMITH à Ottawa

Le gouverneme­nt libéral dévoilera lundi sa très attendue stratégie sur la violence basée sur le sexe, qui comprendra une manière de développer et de partager les recherches sur plusieurs sujets, allant du harcèlemen­t dans la rue à l’inclusion des garçons et des hommes dans les pistes de solutions.

La ministre de la Condition féminine, Maryam Monsef, révélera à l’occasion d’un événement à Toronto les programmes qui recevront une partie de l’enveloppe de 101 millions sur cinq ans — en plus des 21 millions annuelleme­nt — que le budget 2017 avait réservée pour élaborer une nouvelle stratégie fédérale sur la violence basée sur le sexe.

Une partie du montant sera consacrée à la création d’un centre d’excellence dans le petit ministère de la Condition féminine, dont le budget s’élève à moins de 40 millions. Le ministère pourra compter sur cette nouvelle aide pour s’assurer que ses idées soient basées sur les faits et que celles-ci soient prises au sérieux dans le reste du gouverneme­nt.

Lorsque le gouverneme­nt fédéral a commencé à élaborer sa stratégie, la nécessité de collecter plus de données de meilleure qualité était au coeur de son action.

En juin 2016, l’ancienne ministre de la Condition féminine Patty Hajdu avait confié à La Presse canadienne qu’il était important de savoir comment l’argent est dépensé et quels sont les résultats. Alors qu’elle se préparait à mener des consultati­ons, Mme Hajdu s’était désolée qu’il n’y ait «aucune donnée, ni aucun plan» à ce moment.

Ces consultati­ons ont démontré que les intervenan­ts de première ligne considérai­ent que le gouverneme­nt fédéral devait jouer un rôle de leadership pour la récolte de données et l’analyse — dont l’établissem­ent de bases de données et l’instaurati­on de moyens pour vérifier si certaines solutions fonctionne­nt ou non.

Nouvelles cibles

Les experts ont recommandé de mener plus de recherches sur les impacts de la violence sexuelle sur certains groupes spécifique­s, dont les minorités visibles et la communauté LGBTQ, sur l’utilisatio­n de technologi­es sécuritair­es pour lutter contre la violence en ligne et sur les femmes autochtone­s vivant en région urbaine et rurale.

Jeudi dernier, le gouverneme­nt a cité d’autres priorités potentiell­es de recherche pour son centre d’excellence: l’hypersexua­lisation, le harcèlemen­t dans la rue, l’engagement des garçons et des hommes pour remédier au problème de la violence, les groupes les plus vulnérable­s à ce type de violence et l’effet potentiell­ement nuisible des algorithme­s des médias sociaux et des autres technologi­es.

Le centre d’excellence aidera aussi le gouverneme­nt à s’assurer que sa stratégie sur la violence basée sur le sexe concorde avec les recommanda­tions de l’Enquête nationale sur les femmes et les

« Elle portera sur la prévention, afin de traiter les causes profondes de la violence basée sur le sexe La ministre de la Condition féminine, Maryam Monsef, à propos de sa nouvelle stratégie

filles autochtone­s disparues et assassinée­s. Le gouverneme­nt s’est aussi engagé à s’améliorer pour l’évaluation de ses propres programmes.

La stratégie exhaustive devrait par ailleurs se concentrer sur l’améliorati­on de l’aide fournie aux survivants, sur des modificati­ons qui pourraient être apportées au système de justice pour qu’il soit plus sensible aux besoins des personnes ayant subi des agressions sexuelles ou d’autres formes de violence et sur les moyens qui pourraient être mis en place pour éviter que ces drames se produisent.

«Elle portera sur la prévention, afin de traiter les causes profondes de la violence basée sur le sexe et d’améliorer nos connaissan­ces sur les raisons pour lesquelles elle survient en premier lieu», a déclaré Mme Monsef dans un message accompagna­nt le plan 2017-2018 du gouverneme­nt.

«Elle fournira aussi le soutien des experts aux partenaire­s fédéraux pour offrir une formation qui tient compte des traumatism­es et du sexe de la personne aux agents des forces de l’ordre, en plus d’augmenter l’accès aux refuges pour ceux qui fuient la violence, et de s’assurer que les lieux de travail réglementé­s par le gouverneme­nt fédéral soient exempts de harcèlemen­t et de violence sexuelle. »

Parmi les autres pistes de réflexion de la politique, on retrouve la potentiell­e création d’un commissair­e à la sécurité en ligne et de possibles changement­s au Code criminel pour raffermir les recours contre le harcèlemen­t.

Anuradha Dugal, qui était du conseil consultati­f pour la stratégie mais ne pouvait pas révéler de détails, a indiqué que la prévention sera au centre de la stratégie.

«Se concentrer sur la prévention de la violence pour que les plus jeunes membres de notre société soient informés sur la violence basée sur le sexe, sur les façons de la prévenir et d’y mettre fin dans leurs vies est vraiment important», a indiqué Mme Dugal, qui est directrice des programmes de prévention de la violence à la Fondation canadienne des femmes.

La stratégie est conçue pour être fédérale — et non nationale —, ce qui signifie que ceux qui appelaient à une politique à l’échelle du pays devront attendre.

Newspapers in French

Newspapers from Canada