Le Devoir

Amor Ftouhi voulait acheter une arme à feu

Son achat a été refusé parce qu’il ne détenait pas la citoyennet­é américaine

- GUILLAUME LEPAGE

Le Montréalai­s Amor Ftouhi, formelleme­nt accusé pour l’attaque au couteau perpétrée mercredi dans un aéroport des États-Unis, a tenté en vain de se procurer une arme à feu pendant son trajet vers le Michigan, a confirmé en point de presse jeudi le FBI. L’achat lui aurait été refusé parce qu’il ne détient pas la citoyennet­é américaine.

Qualifiant de «bonne nouvelle» cette informatio­n, l’enquêteur spécial de la police fédérale, David Gelios, a aussi révélé que l’arme du crime — un couteau d’une trentaine de centimètre­s — a été achetée en sol américain, sans fournir davantage de détails puisque «l’enquête est toujours en cours».

Les autorités ont en outre sollicité l’aide du public afin de lever le voile sur le séjour du quinquagén­aire aux États-Unis, lequel, selon leurs informatio­ns, a traversé la frontière le 16 juin avant de se trouver deux jours après au Michigan, puisque, pour le reste, le mystère reste entier.

«Aucune informatio­n obtenue jusqu’à maintenant ne pourrait nous faire croire que l’attaque était intégrée à un réseau plus large» et que l’accusé a eu des «complices» pour commettre son geste, a également pris soin d’indiquer M. Gelios. La piste du «loup solitaire» est donc toujours considérée.

Comparutio­n

Amor Ftouhi a comparu au palais de justice de Detroit jeudi matin. L’homme est accusé d’avoir commis un acte de violence dans un aéroport internatio­nal. À noter toutefois que la liste des accusation­s pourrait s’allonger. Il restera détenu jusqu’à son enquête pour remise en liberté, fixée au 28 juin prochain. S’il est reconnu coupable, il risque une peine de 20 ans de prison.

Par ailleurs, la perquisiti­on à son domicile, situé dans le quartier SaintMiche­l à Montréal, s’est terminée jeudi en fin d’après-midi. Des agents de la Gendarmeri­e royale du Canada (GRC) et du Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) s’y activaient depuis la veille. Aucun détail n’a filtré au terme de l’opération, la GRC restant muette sur les informatio­ns possibleme­nt récoltées.

Sécurité renforcée?

Camionneur, M. Ftouhi était détenteur d’une carte EXPRES (acronyme pour Expédition­s rapides et sécuritair­es), selon des informatio­ns obtenues par La Presse. Conjointem­ent délivré par les services douaniers canadiens et américains, ce permis réservé aux transporte­urs et aux importateu­rs permet d’accélérer le passage à la frontière. Au lendemain de l’acte terroriste, peut-on s’attendre à un renforceme­nt prochain de la sécurité?

Le premier ministre du Québec, Philippe Couillard, a affirmé jeudi qu’il ne croyait pas que les mesures de sécurité à la frontière entre le Québec et les États-Unis allaient être renforcées, qualifiant d’«efficaces» les systèmes de contrôle actuels.

La veille, le ministre fédéral de la Sécurité publique, Ralph Goodale, a tenu des propos similaires.

«Ne pas exagérer»

En entrevue au Devoir, le spécialist­e en systèmes de sécurité canadiens au Collège militaire royal de Saint-Jean Marc Imbeault juge qu’il est «possible» que les services frontalier­s resserrent les modalités pour délivrer ce type de carte.

«Il suffit d’un seul événement malheureux pour que ça attire l’attention et qu’on soit plus vigilant», a-t-il dit. Il doute toutefois que cet événement «bouleverse toutes les procédures». «Il ne faut pas exagérer l’impact», a-t-il laissé tomber.

«Le profilage des personnes susceptibl­es d’être musulmanes — qui existe déjà de manière plus ou moins officielle — va peut-être augmenter, a ajouté l’expert en contre-terrorisme. Et on va ajouter les personnes qui ont n’importe quel type de carte qui facilite l’accès aux États-Unis [incluant l’EXPRES].»

De son côté, le p.-d.g. de l’Associatio­n de camionnage du Québec, Marc Cadieux, estime les systèmes de contrôle aux frontières « rigoureux». «Qu’il se passe un cas parmi une centaine de milliers de cartes délivrées, je ne dis pas que c’est impossible. C’est regrettabl­e, mais je pense que les critères sont déjà rigoureux de la part des [autorités canadienne­s et américaine­s]. […] C’est clair et net que vous ne [faites pas la demande d’une carte EXPRES] si vous avez eu des problèmes avec la justice ou que vous avez un casier judiciaire.»

Les mesures de sécurité aux frontières américaine­s ont été rigoureuse­ment renforcées depuis l’arrivée au pouvoir de Donald Trump. Outre le mur que souhaite toujours construire le président aux portes du Mexique, son gouverneme­nt a aussi revu le contrôle par la voie des airs, interdisan­t aux passagers de vols directs en provenance de huit pays, majoritair­ement du MoyenOrien­t, de transporte­r en cabine leurs appareils électroniq­ues.

Avec La Presse canadienne

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SHANNON MILLARD ASSOCIATED PRESS L’aéroport Bishop de Flint a augmenté ses effectifs de sécurité après la tentative de meurtre de lundi.

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