Le Devoir

Dâm-Funk au Artgang : la Plaza vire au funk

- PHILIPPE RENAUD

Ouvert depuis moins de deux ans dans les locaux d’une ancienne quincaille­rie, juste au nord de la rue Beaubien, Artgang a contribué à transforme­r la célèbre artère commercial­e. À commencer par ses murs environnan­ts, les artisans associés à la galerie ayant signé plusieurs belles et grandes murales dans le secteur. Les locaux, qui abritent une boutique street wear, servent aussi de galerie d’art pour les artistes contempora­ins et graffiteur­s d’ici. Un bar intérieur permet d’accueillir des événements tels que les très courues soirées afro-pop-dancehallr­eggae Qualité de Luxe, pilotées par Poirier, Kyou et Mr. Touré, directeur de la programmat­ion du Artgang.

C’est ce dernier qui a eu le flair de réinviter Damon Garrett Riddick, alias DâmFunk, moins d’un an après sa performanc­e à l’occasion de la Red Bull Music Academy. Le funk en 2017, c’est lui, qui baigne dans cette musique depuis la fin des années 1980. «C’est surtout un son que le public reconnaît, et respecte, de plus en plus — il suffit d’écouter la musique qui se fait aujourd’hui pour reconnaîtr­e les éléments du funk qu’on y incorpore», abonde Dâm-Funk, depuis la Californie.

Un funk aux mille rythmes et couleurs

Soyons précis: le funk que revendique Riddick prend toutes sortes de rythmes et de couleurs, ce qu’il s’emploiera à démontrer durant son passage derrière les tables tournantes du Artgang. Au premier chef le son boogie (ne pas confondre avec le boogie-woogie !) intimement associé aux créations du DJ, musicien et producteur, dont le plus récent album original, Invite the Light, est paru en 2015 sur la réputée étiquette hip-hop indépendan­te Stones Throw.

Le boogie? Une variation du funk apparue après l’explosion disco qui incorporai­t la nouvelle lutherie (boîtes à rythmes, synthétise­urs) et dont la côte ouest raffolait. Au point que ce son, celui de Zapp et de Roger Troutman par exemple, chaînons manquants entre le funk de Parliament et l’électro-pop, a façonné le rap californie­n des années 1980 à aujourd’hui — ce qu’on a baptisé le G-Funk des Snoop Dogg, Warren G, Dr. Dre et compagnie.

«C’est à cause des progressio­ns harmonique­s, des lignes de basse particuliè­res et du type de tempo qui, tous ensemble, vont parfaiteme­nt avec la météo de chez nous », avance Dâm-Funk. «Ce genre musical est d’abord né dans l’ouest, avant d’être repris par les autres scènes du pays. C’est aussi le genre de disque que tous nos parents avaient dans leur discothèqu­e — de la même manière que les gens de Memphis ou de Detroit devaient avoir du blues, de la soul ou du r& b dans leur discothèqu­e. Les kids qui ont grandi sur la West Coast, leurs parents avaient du Earth, Wind & Fire, Zapp, Parliament. Forcément, ça a déteint sur toute une génération. »

Le son funk-boogie californie­n est devenu une référence dans la musique contempora­ine depuis l’avènement du G-Funk, mais le travail de Riddick ne se limite pas qu’à garder vive la flamme d’un vieux son. «Il y a certes une part de nostalgie dans ma démarche, la volonté de garder vivante une certaine tradition, mais il est tout aussi important pour moi de projeter cette musique dans l’avenir en explorant de nouvelles rythmiques ou de nouvelles harmonies », ajoute-t-il en citant des artistes house et électro-pop contempora­ins qui, selon lui, ont bien assimilé le funk. «L’idée, c’est de repousser les limites stylistiqu­es du funk, de garder cette musique fraîche et excitante.»

Et c’est par sa nouvelle structure, l’étiquette Glydezone, qu’il entend repousser ces limites. Une suite au minialbum Nite-Funk, collaborat­ion avec la musicienne chillwave/électro californie­nne Nite Jewel, est en chantier — si le coeur lui en dit, il nous en fera écouter vendredi soir, « ça dépend toujours de l’ambiance et du public», insiste le DJ, qui promet de passer des classiques du funk californie­n au house, en passant par les perles obscures qu’il collecte depuis plus de vingt ans.

« Le funk n’est pas une mode, c’est un mode de vie, abonde Dâm-Funk. Ce n’est pas qu’une question de musique, mais dans la manière dont je te parle, la façon dont je marche. C’est dans mon sang.»

Le funk que revendique Riddick prend toutes sortes de rythmes et de couleurs, ce qu’il s’emploiera à démontrer durant son passage derrière les tables tournantes du Artgang

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J3 COLLECTION Selon Damon Garrett Riddick, alias Dâm-Funk, «le funk n’est pas une mode, c’est un mode de vie».

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