Le Devoir

VENEZUELA SYMBOLE FORT

Une femme est tuée dans une fusillade lors de la consultati­on

- MARIA ISABEL SANCHEZ à Caracas

Des centaines de milliers de Vénézuélie­ns ont fait la file dans toutes les régions du pays, et même à l’étranger, afin de voter à un référendum symbolique, dimanche. L’objectif de cette opération politique était de s’opposer aux intentions du président Nicolás Maduro de réécrire la Constituti­on du pays.

Une femme a été tuée dimanche lors d’une fusillade devant l’un des quelque 2000 bureaux de vote où l’opposition vénézuélie­nne organisait une consultati­on populaire symbolique sur le projet de Constituan­te du président, Nicolás Maduro.

Selon le parquet, des inconnus à moto ont ouvert le feu sur les personnes qui patientaie­nt pour voter dans un bureau dans l’ouest de Caracas, tuant une femme et faisant trois blessés lors du premier fait de violence grave signalé au cours de cette consultati­on qui n’est pas légalement contraigna­nte.

Par centaines de milliers, les électeurs, beaucoup vêtus de blanc ou aux couleurs du drapeau jaune, bleu, rouge du Venezuela, ont commencé dès dimanche matin à glisser leur bulletin dans des boîtes en carton installées dans des bureaux de vote à travers le pays par la coalition d’opposition, la Table de l’unité démocratiq­ue (MUD).

« Liberté ! » lançaient certains électeurs. «Je manifeste mon mécontente­ment contre le gouverneme­nt. Nous ne trouvons pas de médicament­s, nous avons chaque fois moins d’argent pour acheter de la nourriture. Et eux, ils veulent juste rester au pouvoir, nous votons pour qu’ils le quittent », explique à l’AFP Tibisay Méndez, 49 ans, dans un bureau de vote du sud-est de Caracas.

De longues files d’attente s’étaient également formées à Madrid, Miami ou encore Bogota, où résident d’importante­s communauté­s vénézuélie­nnes.

Présenté comme un acte de « désobéissa­nce civile », ce vote, qui se déroule sans l’aval des autorités, a pour but de manifester le rejet par la population de la future Assemblée constituan­te, selon la coalition des antichavis­tes — du nom d’Hugo Chavez, président de 1999 à sa mort en 2013 — réunis au sein de la MUD.

Forte opposition

Selon l’institut de sondages Datanalisi­s, près de 70% des Vénézuélie­ns sont opposés à la Constituan­te et 80% dénoncent la gestion par M. Maduro d’un pays en partie paralysé et traumatisé par des manifestat­ions au cours desquelles près d’une centaine de personnes ont été tuées depuis le 1er avril.

Cette crise politique survient par ailleurs sur fond de chute des cours du pétrole qui frappe de plein fouet l’économie, dont 95 % des devises proviennen­t de l’exportatio­n de l’or noir.

La Constituan­te, dont les 545 membres seront élus le 30 juillet, aura pour mission de modifier la Constituti­on en vigueur pour assurer, selon M. Maduro, la «paix et la stabilité économique » du Venezuela. Le projet est fermement rejeté par les antichavis­tes, qui y voient un moyen pour le gouverneme­nt de rester au pouvoir en contournan­t l’Assemblée nationale, où l’opposition est majoritair­e depuis 2016.

«Le pays va non seulement rejeter la Constituan­te, mais aussi donner un mandat pour exiger un changement de régime, la sortie de la dictature et l’ouverture d’une transition avec un gouverneme­nt d’union nationale», a déclaré samedi à l’AFP une responsabl­e de l’opposition, Maria Corina Machado.

D’après les projection­s de l’institut de sondages Datanalisi­s, quelque 10,5 millions de personnes, sur 19 millions d’électeurs, seraient prêtes à voter lors de la consultati­on, qui a reçu

le soutien de l’Église catholique, des Nations unies, de plusieurs pays d’Amérique latine et d’Europe ainsi que des États-Unis.

«C’est une démonstrat­ion indiscutab­le et historique», a déclaré un des leaders de l’opposition, Henrique Capriles, sans toutefois avancer de chiffre.

Le chef de l’État a appelé ses adversaire­s à mener leur consultati­on dans un climat de « paix ». Ce « show internatio­nal […] faites-le, mais en paix», a-t-il lancé.

Dimanche également, le gouverneme­nt a invité les citoyens à venir tester les machines de vote qui seront mises en place pour élire les membres de la Constituan­te le 30 juillet. Objectif : ne pas laisser le champ libre à l’opposition ce jour-là.

Le ministre de la Défense, le général Vladimir Padrino, soutien indéfectib­le du chef de l’État, a appelé les Vénézuélie­ns à voter pour la Constituan­te le 30 juillet. De son côté, la présidente du Conseil national électoral, Tibisay Lucena, accusée d’être proche du pouvoir, a demandé aux antichavis­tes de ne pas créer « de faux espoirs» par une « activité politique sans aucune conséquenc­e juridique».

Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, avait exprimé vendredi son inquiétude et appelé au dialogue.

 ?? JUAN BARRETO AGENCE FRANCE-PRESSE ?? Par centaines de milliers, les électeurs vénézuélie­ns ont commencé dès dimanche matin à glisser leur bulletin dans des boîtes en carton installées dans des bureaux de vote à travers le pays par la coalition d’opposition, la Table de l’unité démocratiq­ue.
JUAN BARRETO AGENCE FRANCE-PRESSE Par centaines de milliers, les électeurs vénézuélie­ns ont commencé dès dimanche matin à glisser leur bulletin dans des boîtes en carton installées dans des bureaux de vote à travers le pays par la coalition d’opposition, la Table de l’unité démocratiq­ue.
 ?? RAUL ARBOLEDA AGENCE FRANCE-PRESSE ??
RAUL ARBOLEDA AGENCE FRANCE-PRESSE

Newspapers in French

Newspapers from Canada