Le Devoir

Une entente de 5 ans

Les modalités de l’entente conclue entre le gouverneme­nt et les fabricants demeurent toutefois confidenti­elles

- MARIE-LISE ROUSSEAU

Le bras de fer entre le gouverneme­nt du Québec et les fabricants de médicament­s génériques est terminé. Le ministre de la Santé, Gaétan Barrette, a annoncé dimanche des économies dépassant 1,5 milliard sur cinq ans dans le cadre d’une entente de principe conclue vendredi soir entre le gouverneme­nt et l’Associatio­n canadienne du médicament générique (ACMG).

Il a été impossible de connaître les modalités de cette entente, qui entrera en vigueur dès le 1er octobre. Celles-ci restent confidenti­elles en raison des négociatio­ns qui se poursuiven­t entre l’ACMG et l’Alliance pancanadie­nne pharmaceut­ique, a indiqué le ministre.

On sait cependant que l’entente s’appliquera tant pour le régime public d’assurance médicament­s que pour les régimes privés.

M. Barrette s’est dit « très satisfait » en entrevue téléphoniq­ue au Devoir dimanche. «Il s’agit d’une économie de 40% [par rapport à ce qu’on paie actuelleme­nt]. Trouvez-moi dans l’histoire du Québec quelqu’un qui est arrivé à faire ça!» a-t-il déclaré.

Le coût des médicament­s génériques représente actuelleme­nt une dépense annuelle de près de 800 millions pour le régime public d’assurance médicament­s.

L’annonce a été bien reçue dimanche par les différents acteurs du milieu de la santé. «Il faut applaudir le fait que Québec a bougé sur cette question pour récupérer des sommes. Ça fait plusieurs années qu’on dit qu’on paie trop cher au Québec et au Canada», a commenté Marc-André Gagnon, professeur agrégé à l’École d’administra­tion et de politique publique de l’Université Carleton.

M. Gagnon aurait cependant souhaité plus de transparen­ce dans le processus de négociatio­ns. «J’attends de connaître les modalités de l’entente pour me prononcer davantage. Si on baisse les prix réels [des médicament­s] après les ristournes, sans diminuer les prix officiels, ce serait extrêmemen­t problémati­que », prévient-il.

Impact sur les factures

Le ministre Barrette a assuré que les patients paieront moins cher leurs médicament­s dès que l’entente entrera en vigueur.

Le Collège des médecins estime que cette entente est encouragea­nte. «Quand on économise des montants importants pour des médicament­s, c’est une très bonne nouvelle»,a déclaré son président, le Dr Charles Bernard, en entrevue au Devoir.

Sa principale préoccupat­ion concerne le risque de pénurie. «J’espère que l’entente garantit qu’il n’y aura pas de pénurie de médicament­s comme il y en a eu dans le passé», a indiqué M. Bernard.

Une préoccupat­ion qu’a partagée l’Ordre des pharmacien­s du Québec dans une déclaratio­n transmise par courriel. «Nous espérons que cette entente générera des économies comme prévu, mais assurera également à la population québécoise un accès aux médicament­s sans crainte de ruptures d’approvisio­nnement. »

Appels d’offres

L’entente avec l’ACMG annule toute possibilit­é du gouverneme­nt de recourir à des appels d’offres, une procédure qu’avait menacé de mettre en oeuvre le ministre Barrette pendant les négociatio­ns.

Selon le ministre, l’entente est préférable aux appels d’offres, même si ceux-ci auraient pu permettre d’économiser des sommes plus importante­s, car elle garantit davantage de sécurité sur le plan des emplois et de l’approvisio­nnement. En ce sens, Gaétan Barrette a qualifié l’entente de «point d’équilibre».

Le président de l’ACMG, Jim Keon, abonde dans le même sens. «L’ACMG considère que cet accord négocié est une bien meilleure solution […] qu’un processus risqué d’appel d’offres», a-t-il déclaré dans un communiqué.

L’Associatio­n québécoise des pharmacien­s propriétai­res partage cet avis. «Nous avons toujours dit que nous partagions l’objectif du gouverneme­nt de réduire les coûts, mais que nous étions contre les appels d’offres puisque ce n’est pas le bon moyen d’y parvenir», a fait savoir la vice-présidente aux Affaires publiques et relations avec l’industrie, Julie Gauthier, par courriel.

Un argument que réfute Marc-André Gagnon. «Au contraire, [procéder par appels d’offres] aurait été un bon système pour mieux se protéger sur le plan de l’approvisio­nnement en plus d’aller chercher davantage de réductions de coûts », soutient-il.

Réinvestis­sements

Le ministre Barrette a promis dimanche de réinvestir les 300 millions qui seront économisés annuelleme­nt grâce à cette entente dans le système de santé « afin d’améliorer l’accessibil­ité aux soins et aux services ».

Une décision applaudie de toutes parts. «C’est un élément clé. Si on fait du ménage dans le budget de la santé, c’est pour servir le système de santé, pas pour offrir des baisses d’impôt, par exemple», mentionne M. Gagnon.

« C’est la meilleure nouvelle de toute cette entente», croit le Dr Charles Bernard.

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ISTOCK Les médicament­s génériques coûtent actuelleme­nt près de 800 millions annuelleme­nt au régime public d’assurance médicament­s.

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