Le Devoir

Venezuela.

L’opposition appelle à la « grève générale massive ».

- MARIA ISABEL SANCHEZ à Caracas

Encouragée par la participat­ion massive à la consultati­on symbolique qu’elle a organisée contre Nicolas Maduro, l’opposition vénézuélie­nne a appelé lundi à une grève générale de 24 heures jeudi pour tenter d’arrêter le projet du président socialiste de modifier la Constituti­on.

« Nous appelons tout le pays à une grève générale massive et sans violence de 24 heures ce jeudi afin d’exercer une pression sur le gouverneme­nt et de nous préparer à l’escalade définitive de la semaine prochaine », a déclaré lors d’une conférence de presse l’opposant Freddy Guevara, vice-président du Parlement, au lendemain de cette consultati­on légalement non contraigna­nte.

Selon l’opposition, plus de 7 millions de Vénézuélie­ns, sur 19 millions d’électeurs potentiels, ont participé à la consultati­on et 98,3% d’entre eux ont rejeté dimanche le projet présidenti­el de convoquer une Assemblée constituan­te. Le scrutin a été endeuillé par la mort d’une femme, tuée par des hommes armés à moto devant un bureau de vote dans l’ouest de Caracas.

Le Parlement est le seul organe du pouvoir vénézuélie­n contrôlé par les antichavis­tes — du nom de Hugo Chávez, président de 1999 à sa mort en 2013, dont M. Maduro est l’héritier. Et dans le cadre de l’«offensive» de l’opposition contre le chef de l’État, les élus comptent nommer vendredi de nouveaux magistrats à la Cour suprême (TSJ), accusée de servir le pouvoir.

Les membres de la coalition à l’origine de la consultati­on de dimanche, la Table de l’unité démocratiq­ue (MUD), vont également signer un accord en vue de la formation d’un futur « gouverneme­nt d’union nationale».

En outre, Freddy Guevara a redit que l’opposition était prête à dialoguer, à condition toutefois que le gouverneme­nt renonce à l’élection des 545 membres de la Constituan­te, prévue le 30 juillet.

«L’opposition

doit avoir une feuille de route, après avoir suscité tant d’espoir. Sinon, sa légitimité peut en prendre un coup, le peuple attend des actes fermes. Felix Seijas, directeur de l’institut de sondages Delphos

Provoquer des élections anticipées

Après plus de trois mois de manifestat­ions violentes qui ont fait 96 morts dans ce pays en crise, la MUD espère provoquer des élections anticipées avant la fin du mandat de M. Maduro en décembre 2018.

Ce dernier assure que la Constituan­te vise à apporter paix et stabilité économique au pays, mais l’opposition pense qu’elle servira à contourner l’Assemblée nationale.

L’opposition avait tenté d’organiser un référendum révocatoir­e en 2016 mais le processus avait été bloqué par les autorités électorale­s.

«On perçoit une demande de changement politique persistant dans le temps», a dit à l’AFP le politologu­e John Magdaleno.

« L’opposition doit avoir une feuille de route, après avoir suscité tant d’espoir. Sinon, sa légitimité peut en prendre un coup, le peuple attend des actes fermes », a commenté pour sa part Felix Seijas, directeur de l’institut de sondages Delphos.

Du côté du gouverneme­nt, la consultati­on est considérée comme «illégale».

Sollicitan­t une « occasion » pour son projet, Maduro a demandé dimanche à ses opposants de «ne pas perdre la tête » au vu des résultats et de «venir s’asseoir pour discuter».

Pour éviter que l’opposition n’occupe tout le terrain dimanche, le gouverneme­nt avait invité les citoyens à venir s’informer sur le scrutin du 30 juillet et tester les machines qui serviront au vote.

Le président peut compter sur le soutien des autorités électorale­s, judiciaire­s (sauf la procureure générale, menacée de destitutio­n) et de l’armée.

Le défi de l’opposition est désormais de se servir des résultats pour «fracturer l’adversaire, ce qui pourrait faire pression en faveur d’une négociatio­n qui débouchera­it sur une occasion pacifique de changement», a estimé Luis Vicente Léon, président de l’institut de sondages Datanalisi­s.

En face, le gouverneme­nt devra éviter une faible participat­ion le 30 juillet, car la Constituan­te aurait alors une légitimité amoindrie. Selon Datanalisi­s, 70 % des Vénézuélie­ns rejettent le projet.

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