Pas de siège pour les Premières Nations
Le Québec désapprouve la politique d’affirmation des autochtones
La demande des principales organisations des Premières Nations, des Inuits et des Métis d’être reconnus comme des « gouvernements » se heurte à de profondes réticences de la part des provinces, à commencer par celles du Québec.
«Grâce à la Convention de la baie James, je pense qu’on peut parler d’un gouvernement cri au Québec: il y a une commission scolaire, une régie de la santé, il y a le grand conseil des cris… Les pouvoirs de tout le monde sont bien définis», a expliqué le ministre responsable des Affaires autochtones, Geoffrey Kelley.
«Quand on parle d’autres groupes, c’est moins évident au Québec », a-t-il ajouté.
Chose certaine, le gouvernement du Québec ne fera pas siens les 10 «Principes régissant la relation du Gouvernement du Canada avec les peuples autochtones» dévoilés il y a quelques jours par Ottawa — « sans [avoir préalablement tenu] des consultations avec les autochtones et les gouvernements des provinces et des territoires», a fait remarquer M. Kelley.
Le gouvernement Trudeau souhaite opérer «la réconciliation avec les peuples autochtones au moyen d’une relation renouvelée de nation à nation, de gouvernement à gouvernement et entre la Couronne et les Inuits, axée sur la reconnaissance des droits, le respect, la coopération et le partenariat».
Refus de participer
Le chef national de l’Assemblée des Premières Nations (APN), Perry Bellegarde, le président d’Inuit Tapiriit Kanatami (ITK), Natan Obed, et le président du Ralliement national des Métis (RNM), Clément Chartier, ont exhorté les 13 provinces et territoires à eux aussi nouer une véritable relation non seulement «de gouvernement à gouvernement» avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis du Canada, à l’instar de celle prenant forme entre le gouvernement canadien d’une part et l’APN, l’ITK et le RNM d’autre part.
Dans cet esprit, les dirigeants des trois principales organisations autochtones refusent de participer à la rencontre annuelle des premiers ministres et des dirigeants autochtones nationaux organisés en marge du Conseil de la fédération aussi longtemps qu’ils n’obtiendront pas le statut de membre en règle de ce club. Ils brillaient ainsi par leur absence à Edmonton lundi.
Les 634 Premières Nations à travers le Canada refusent d’être «tenues à l’écart» plus longtemps des cercles de discussions et de décisions, a soutenu M. Bellegarde. «Nous [demandons] le respect dû aux nations autochtones, aux gouvernements autochtones.»
Seules les porte-parole de deux des cinq groupes invités — le Congrès des peuples autochtones et l’Association des femmes autochtones du Canada qui n’ont pas la prétention de parler au nom d’une nation ou encore d’un gouvernement — n’avaient pas fait faux bond à l’hôte de la rencontre, Rachel Notley.
ALENA
Le Conseil de la fédération se réunit deux fois par année afin d’affronter des grands enjeux pancanadiens. Au programme, mardi et mercredi, figurent notamment l’ébauche d’une stratégie en vue de la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), la commercialisation du cannabis, ainsi que la présentation de la Politique d’affirmation du Québec et de relations canadiennes.
En effet, le chef du gouvernement québécois, Philippe Couillard, présentera les grandes lignes de sa Politique à ses homologues provinciaux et territoriaux à l’occasion d’un déjeuner mardi.
«Il va leur expliquer qu’il s’agit d’une politique de rapprochement qui vise à ce qu’on ait une meilleure compréhension [de la nation québécoise. Celle-ci se traduira] par des retombées, des avantages dans toutes les matières: économiques, sociales…», a fait valoir le ministre Jean-Marc Fournier lundi soir.
Des négociations constitutionnelles pourraient toutefois être entreprises, mais seulement «une fois» que «les solidarités» auront pris le dessus sur «les solitudes», a ajouté le maître d’oeuvre du « réinvestissement du Québec sur la scène canadienne».
Le premier ministre de la Saskatchewan, Brad Wall, n’y est pas opposé tant que le Québec accepte de revoir la formule de péréquation du Canada, afin notamment de tenir compte des bas tarifs d’HydroQuébec.