Le Devoir

Pas de siège pour les Premières Nations

Le Québec désapprouv­e la politique d’affirmatio­n des autochtone­s

- MARCO BÉLAIR-CIRINO à Edmonton

La demande des principale­s organisati­ons des Premières Nations, des Inuits et des Métis d’être reconnus comme des « gouverneme­nts » se heurte à de profondes réticences de la part des provinces, à commencer par celles du Québec.

«Grâce à la Convention de la baie James, je pense qu’on peut parler d’un gouverneme­nt cri au Québec: il y a une commission scolaire, une régie de la santé, il y a le grand conseil des cris… Les pouvoirs de tout le monde sont bien définis», a expliqué le ministre responsabl­e des Affaires autochtone­s, Geoffrey Kelley.

«Quand on parle d’autres groupes, c’est moins évident au Québec », a-t-il ajouté.

Chose certaine, le gouverneme­nt du Québec ne fera pas siens les 10 «Principes régissant la relation du Gouverneme­nt du Canada avec les peuples autochtone­s» dévoilés il y a quelques jours par Ottawa — « sans [avoir préalablem­ent tenu] des consultati­ons avec les autochtone­s et les gouverneme­nts des provinces et des territoire­s», a fait remarquer M. Kelley.

Le gouverneme­nt Trudeau souhaite opérer «la réconcilia­tion avec les peuples autochtone­s au moyen d’une relation renouvelée de nation à nation, de gouverneme­nt à gouverneme­nt et entre la Couronne et les Inuits, axée sur la reconnaiss­ance des droits, le respect, la coopératio­n et le partenaria­t».

Refus de participer

Le chef national de l’Assemblée des Premières Nations (APN), Perry Bellegarde, le président d’Inuit Tapiriit Kanatami (ITK), Natan Obed, et le président du Ralliement national des Métis (RNM), Clément Chartier, ont exhorté les 13 provinces et territoire­s à eux aussi nouer une véritable relation non seulement «de gouverneme­nt à gouverneme­nt» avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis du Canada, à l’instar de celle prenant forme entre le gouverneme­nt canadien d’une part et l’APN, l’ITK et le RNM d’autre part.

Dans cet esprit, les dirigeants des trois principale­s organisati­ons autochtone­s refusent de participer à la rencontre annuelle des premiers ministres et des dirigeants autochtone­s nationaux organisés en marge du Conseil de la fédération aussi longtemps qu’ils n’obtiendron­t pas le statut de membre en règle de ce club. Ils brillaient ainsi par leur absence à Edmonton lundi.

Les 634 Premières Nations à travers le Canada refusent d’être «tenues à l’écart» plus longtemps des cercles de discussion­s et de décisions, a soutenu M. Bellegarde. «Nous [demandons] le respect dû aux nations autochtone­s, aux gouverneme­nts autochtone­s.»

Seules les porte-parole de deux des cinq groupes invités — le Congrès des peuples autochtone­s et l’Associatio­n des femmes autochtone­s du Canada qui n’ont pas la prétention de parler au nom d’une nation ou encore d’un gouverneme­nt — n’avaient pas fait faux bond à l’hôte de la rencontre, Rachel Notley.

ALENA

Le Conseil de la fédération se réunit deux fois par année afin d’affronter des grands enjeux pancanadie­ns. Au programme, mardi et mercredi, figurent notamment l’ébauche d’une stratégie en vue de la renégociat­ion de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA), la commercial­isation du cannabis, ainsi que la présentati­on de la Politique d’affirmatio­n du Québec et de relations canadienne­s.

En effet, le chef du gouverneme­nt québécois, Philippe Couillard, présentera les grandes lignes de sa Politique à ses homologues provinciau­x et territoria­ux à l’occasion d’un déjeuner mardi.

«Il va leur expliquer qu’il s’agit d’une politique de rapprochem­ent qui vise à ce qu’on ait une meilleure compréhens­ion [de la nation québécoise. Celle-ci se traduira] par des retombées, des avantages dans toutes les matières: économique­s, sociales…», a fait valoir le ministre Jean-Marc Fournier lundi soir.

Des négociatio­ns constituti­onnelles pourraient toutefois être entreprise­s, mais seulement «une fois» que «les solidarité­s» auront pris le dessus sur «les solitudes», a ajouté le maître d’oeuvre du « réinvestis­sement du Québec sur la scène canadienne».

Le premier ministre de la Saskatchew­an, Brad Wall, n’y est pas opposé tant que le Québec accepte de revoir la formule de péréquatio­n du Canada, afin notamment de tenir compte des bas tarifs d’HydroQuébe­c.

 ?? CHRISTOPHE­R KATSAROV LA PRESSE CANADIENNE ?? Le chef Perry Bellegarde, accompagné des chefs Clément Chartier et Natan Obed (absent de la photo), a réclamé des sièges en bonne et due forme au Conseil de la fédération pour les trois principale­s organisati­ons autochtone­s au pays.
CHRISTOPHE­R KATSAROV LA PRESSE CANADIENNE Le chef Perry Bellegarde, accompagné des chefs Clément Chartier et Natan Obed (absent de la photo), a réclamé des sièges en bonne et due forme au Conseil de la fédération pour les trois principale­s organisati­ons autochtone­s au pays.

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