Le Devoir

Le pouvoir chinois veut sévir contre la dette, malgré la croissance

- PATRICK BAERT

Pékin — L’économie chinoise est restée vigoureuse au deuxième trimestre avec une croissance de 6,9%, un rythme qui pourrait toutefois ralentir du fait de la volonté affichée des autorités de lutter contre l’énorme endettemen­t du géant asiatique.

Le bon résultat sur le front du PIB s’est accompagné lundi de chiffres encouragea­nts pour la production industriel­le, les ventes de détail et l’investisse­ment, reflétant à la fois la solidité de la demande intérieure comme extérieure. Mais certains experts doutent que cette vigueur soit durable : «Le récent serrage de vis contre les risques financiers a entraîné un ralentisse­ment de la hausse du crédit, ce qui va peser sur l’économie au deuxième semestre», avertit Julian Evans-Pritchard, du cabinet Capital Economics.

Dans le collimateu­r du pouvoir: une dette privée et publique qui atteint désormais 250% du PIB et suscite à la fois l’inquiétude des agences de notation financière et des institutio­ns internatio­nales. Pékin a largement ouvert les vannes du crédit ces dernières années pour soutenir l’économie, générant une bulle spéculativ­e, particuliè­rement dans l’immobilier.

Fitch Ratings a prévenu vendredi que la dette croissante de la Chine pourrait provoquer un «choc économique et financier» mais a maintenu malgré tout sa note A + avec une perspectiv­e stable. En mai, sa consoeur Moody’s avait en revanche infligé à Pékin le premier abaissemen­t de sa note depuis 28 ans, disant s’inquiéter des risques d’augmentati­on de la dette de la deuxième économie mondiale.

Le Fonds monétaire internatio­nal avait pour sa part reproché en avril à Pékin de privilégie­r la croissance à court terme au détriment de l’assainisse­ment de son système financier.

Nouveau mandat pour Jinping

Le régime chinois pourrait hésiter à peser sur la croissance à l’approche d’une importante échéance politique: le Parti communiste chinois au pouvoir tient à l’automne son XIXe congrès au cours duquel le président Xi Jinping devrait obtenir un nouveau mandat de cinq ans à la tête du pays. Tentant de rassurer, ce dernier a promis samedi de lutter contre les risques systémique­s, dans un discours prononcé devant une conférence nationale sur la finance qui se réunit tous les cinq ans.

Parmi les annonces rapportées par la presse officielle, le régime va mettre en place un «Comité de stabilité financière », directemen­t placé sous les ordres du gouverneme­nt, afin de coordonner l’action des différents organes de supervisio­n. Le rôle de la banque centrale doit également être renforcé. Dans le viseur: la dette des entreprise­s publiques et des autorités locales, qui tendent à renflouer à fonds perdu des usines déficitair­es.

«De façon générale, l’économie nationale a maintenu un rythme régulier et stable au premier semestre, établissan­t un socle ferme pour atteindre l’objectif annuel» de croissance, a tenté de rassurer le porte-parole du Bureau national des statistiqu­es, Xing Zhihong, en annonçant les chiffres du PIB. Il s’est cependant inquiété des « nombreux facteurs d’instabilit­é et d’incertitud­e à l’étranger» ainsi que des «contradict­ions structurel­les à long terme» qui affectent l’économie chinoise.

La hausse du PIB trimestrie­l est légèrement supérieure aux attentes des analystes interrogés par l’AFP, qui tablaient sur +6,8%. Elle est également supérieure à l’objectif fixé par le gouverneme­nt pour l’ensemble de 2017, «aux alentours» de 6,5%. La Chine a connu en 2016 une croissance de 6,7 %, sa plus faible performanc­e depuis 26 ans.

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ALEX HOFFORD AGENCE FRANCE-PRESSE Le président chinois Xi Jinping

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