La Biennale de Montréal en sursis
Aux prises avec un déficit important, la direction annule l’édition 2018
Il n’y aura pas d’édition 2018 de la Biennale de Montréal… ni peut-être plus jamais. La direction de l’événement a confirmé lundi un important déficit lié à l’édition 2016, de même que l’ouverture d’un chantier de réflexion sur l’avenir de la manifestation.
«Il n’y a pas de garantie» selon laquelle une biennale pourrait être organisée en 2020, a reconnu au Devoir le président du conseil d’administration de l’événement, Cédric Bisson.
«Nous sommes convaincus qu’il est important et essentiel de tenir une manifestation d’art contemporain à Montréal, convaincus aussi que Montréal a sa place sur ce plan. Mais on va faire la réflexion à l’automne [pour trouver] le format de présentation et la temporalité», indique M. Bisson. Ce dernier souhaite une «réflexion qui met tout le monde à contribution».
Dans une « mise au point » rédigée par M. Bisson, la direction de l’événement explique que «le financement reste un défi majeur pour la Biennale» et révèle que «l’édition 2016 se clôture avec un déficit administratif conséquent», ce qui oblige l’annulation de l’édition prévue pour 2018. «L’avenir financier de l’organisme demeure précaire », ajoute le président du CA.
En entretien, il parle d’un déficit «d’environ 10% sur un budget d’un peu moins de deux millions».
Le Devoir révélait en avril que plusieurs fournisseurs et artistes n’avaient pas encore été payés pour leur participation à l’édition 2016. Lundi, Cédric Bisson a expliqué que cette situation perdure, mais que « l’objectif est de trouver la solution la plus correcte » pour régler l’ensemble des dépenses liées à la dernière édition. «On voudrait privilégier les relations avec la communauté artistique», dit-il.
Le déficit de la Biennale — qui a connu une hausse de fréquentation par rapport à 2014, mais a aussi été marquée par des problèmes organisationnels — serait dû à trois éléments, relève M. Bisson. «Certains revenus ne se sont pas matérialisés, des dépenses imprévues se sont ajoutées, et il y a eu de la précédente administration une gestion que je qualifierais de perfectible.» Selon lui, le CA «aurait agi en amont s’il avait pu le faire, mais c’était impossible». «On a découvert [les problèmes] après la tenue de la Biennale.»
Une gestion «perfectible»
L’annonce de lundi vient éclairer celle concernant le départ, en janvier, de la directrice générale et artistique de la Biennale, Sylvie Fortin. En rappelant son commentaire sur une gestion « perfectible », Cédric Bisson indique que Mme Fortin voulait « passer à autre chose… et nous aussi». Le CA avait pourtant vanté la «solide expérience de gestion» de Mme Fortin lors de son embauche, en 2013.
Quant aux relations entre la Biennale et le Musée d’art contemporain de Montréal (MACM), elles seraient toujours «excellentes», soutient M. Bisson. « Le MACM a été un véritable partenaire et a fait des efforts financiers pour aider. La décision de ne pas tenir un événement en 2018 a été prise d’un commun accord. »
Au MACM, la directrice des communications, Anne-Marie Barnard, soutient que «la balle est dans le camp» de l’équipe de la Biennale pour voir quel type de partenariat futur pourrait exister entre les deux. Mme Barnard a souligné que «100% de la responsabilitié [de la gestion et de l’organisation] de la Biennale» relevait de cette dernière.
De son côté, le bureau du ministre de la Culture, Luc Fortin, a indiqué «avoir pris acte de la situation de la Biennale », et dit « surveiller le tout de près». En octobre 2016, Québec avait annoncé l’attribution d’une aide financière de 333 000 $ pour l’édition qui s’amorçait alors.
La Biennale a été mise en place en 1998 par le Centre international d’art contemporain de Montréal, qui a produit les sept premières éditions. La Biennale de Montréal est ensuite devenue en 2013 un organisme à but non lucratif indépendant. Le partenariat avec le MACM a été signé à ce moment et devait durer trois éditions.