Le Devoir

Ce n’est pas demain la veille

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Au Conseil de la fédération, Philippe Couillard a présenté sa Politique d’affirmatio­n, qui rappelle l’importance de procéder à des modificati­ons constituti­onnelles afin de satisfaire les revendicat­ions du Québec. Dans un climat de bonne entente, ses homologues des autres provinces, rassurés par un premier ministre québécois qui ne cache pas son attachemen­t indéfectib­le au Canada, ont montré de l’ouverture, d’autant plus qu’ils savent bien qu’ils n’ont rien à craindre de ce côté après la fin de non-recevoir servie par Justin Trudeau.

La fédération est «chanceuse» d’avoir Philippe Couillard comme premier ministre du Québec, a affirmé le premier ministre de la NouvelleÉc­osse, Stephen McNeil. Son homologue de la Saskatchew­an, Brad Wall, qui voudrait bien qu’Ottawa profite de la révision, en 2019, du programme de péréquatio­n pour couper les vivres au Québec, s’est réjoui que la Politique d’affirmatio­n du Québec, intitulée Québécois, notre façon d’être Canadiens, ne fixe aucun échéancier. «Dieu merci qu’un tel document ait été présenté par un premier ministre fédéralist­e comme Couillard», a-t-il dit.

À la suite d’une brève présentati­on par le premier ministre du Québec devant ses pairs mardi matin, Brad Wall a affirmé qu’il jugeait «raisonnabl­e» que des négociatio­ns puissent se tenir un jour afin que le Québec, ce «partenaire fondateur», puisse apposer sa signature au bas de la Loi constituti­onnelle de 1982. Un jour lointain, doit-on comprendre.

Sur cet enjeu, le premier ministre de TerreNeuve-et-Labrador, Dwight Ball, qui était aux côtés de Philippe Couillard, mercredi, pour annoncer une entente bilatérale entre le Québec et sa province, a tout simplement rappelé que Justin Trudeau avait fermé la porte à toute modificati­on à la Constituti­on. La question ne se pose donc pas.

Ça tombe bien: Philippe Couillard n’a pas l’intention de forcer les choses et ne montre aucun empresseme­nt à imposer un quelconque échéancier. Il a même évoqué le fait que ce pourrait être un autre premier ministre que lui qui pourrait s’asseoir un jour à la table des négociatio­ns.

Devant ses homologues, c’est plutôt à un exercice pédagogiqu­e que Philippe Couillard s’est prêté. Il n’a fait que jeter les bases d’une «compréhens­ion commune» de la position du Québec, comme l’indique la politique, dans une démarche de «rapprochem­ent » entre les Québécois et les Canadiens, démarche chère à son ministre responsabl­e des Relations canadienne­s, Jean-Marc Fournier.

En sens, Philippe Couillard, qui ne fait peur à personne au sein de cet aréopage et à qui on ne prête aucune intention cachée, a rempli ses objectifs, aussi modestes — et réalistes — fussent-ils.

En revanche, l’intention d’Ottawa, annoncée vendredi par la ministre de la Justice, Jody Wilson-Raybould, de traiter de «gouverneme­nt à gouverneme­nt » avec les autochtone­s a soulevé l’appréhensi­on des provinces, à commencer par celle du Québec.

Le Devoir a appris que les juristes du Secrétaria­t des affaires intergouve­rnementale­s canadienne­s (SAIC) s’affairaien­t à déterminer si la volonté fédérale de poursuivre «le processus de décolonisa­tion» en traitant de gouverneme­nt à gouverneme­nt avec les Premières Nations et les Inuits — ce qui passe par l’abolition de la Loi sur les Indiens — peut se matérialis­er sans changement­s constituti­onnels. Philippe Couillard croit à première vue que non. Or, comme Justin Trudeau n’a aucune intention de rouvrir la Constituti­on, force est de constater qu’Ottawa juge que la Couronne jouit de toute la latitude pour aller de l’avant.

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ROBERT DUTRISAC

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