La crise du Golfe et ses retombées humanitaires
Du jour au lendemain, trois pays du Golfe (l’Arabie Saoudite, les Émirats arabes unis et le Bahreïn) avec l’Égypte ont décidé de déclarer une guerre diplomatique, économique et médiatique à un pays voisin et partenaire au Conseil de coopération du Golfe, qui est aux prises avec un séisme violent comme il n’en a jamais vécu depuis sa création il y a 36 ans.
Les trois pays se sont tournés également vers d’autres contrées loin de la région et de ses interactions pour les pousser à se solidariser avec eux et à rompre leurs relations avec le Qatar, moyennant les outils du bâton et de la carotte. Ces pays-là n’ont fait que créer, de leur propre chef, de nouvelles zones de tension ouvertes à toutes les probabilités et faire porter aux diplomaties des grandes puissances un autre fardeau susceptible de disperser l’intérêt international des affaires majeures et cruciales que connaît le monde. […]
La région du Golfe, et du Moyen-Orient en général, a-t-elle besoin d’une nouvelle crise qui s’ajoute aux crises éternelles et récentes que la communauté internationale n’est pas encore parvenue à résoudre? Le Conseil de coopération du Golfe (CCG) a toujours été un modèle de stabilité, et son rôle est requis pour préserver la sécurité régionale et la paix mondiale, mais les «pays de l’embargo» avaient une opinion différente. Ils voulaient non seulement abuser de la stabilité de la région, mais aussi causer un chaos qui perturberait les liens entre les sociétés du Golfe et créer une dissension entre les peuples de la région, en plus de violer leurs droits fondamentaux en tant que personnes d’abord, puis en tant que citoyens et résidents dans ces pays. […]
Couper des liens familiaux
Ceux qui ont connu ou vécu dans la région du Golfe connaissent très bien la structure démographique et sociale des six pays du CCG et sont conscients sans aucun doute des conséquences graves de ces décisions, comme celles prises par les pays de l’embargo contre les peuples de la région et non seulement le Qatar. Les liens familiaux dans les pays du Golfe sont entremêlés et complexes, puisqu’une famille ou une tribu peut être dispersée sur plus d’un seul pays. Nos parents et nos leaders qui ont pensé à créer le CCG voulaient préserver la cohésion des pays du Golfe et inciter les politiciens à rester unis et à s’entraider, quel que soit le malentendu qui pourrait naître ici ou là. Or, les pays de l’embargo ont décidé de couper le cordon de ces liens et d’entraîner les citoyens de la région dans la confusion et la tension. […]
Quand je parle des liens familiaux entremêlés et complexes dans le Golfe, je fais allusion aux mariages mixtes entre les citoyens des six pays, et que ces trois pays aient décidé d’expulser tous les Qataris, sans exception aucune, et intimé l’ordre à leurs ressortissants de quitter le Qatar signifie logiquement que de nombreuses familles risquent d’être éparpillées, et cela était malheureusement le cas lorsque des enfants, issus de mariages mixtes, se sont retrouvés devant des cas de «divorce forcé». Si ces enfants ont la citoyenneté qatarie, ils doivent quitter les trois pays en compagnie d’un seul parent, et s’ils ont la nationalité des «pays de l’embargo », ils sont obligés de quitter le Qatar, privés de leur père ou de leur mère.
Le départ de tout citoyen du Golfe du pays où il réside à cause de ces mesures signifie qu’il perd un emploi et une vie stable; de plus, la mère ou le père privé des siens ne trouvera plus le moyen de subvenir aux besoins de sa famille, puisque les autorités des «pays de l’embargo» ont décidé d’interdire les transferts d’argent en provenance et en direction du Qatar, et aussi de bloquer les services postaux et les autres transactions commerciales. […]
À cause des décisions des «pays de l’embargo», des centaines d’étudiants étaient obligés d’interrompre leurs études, bien que la plupart d’entre eux se préparaient pour les examens de fin d’année ou peut-être pour la remise des diplômes, mais ils ont dû partir sans aucune considération pour leur condition. Il convient de souligner que le gouvernement du Qatar a refusé depuis le début d’appliquer ces traitements inhumains aux citoyens des «pays de l’embargo » qui résident ou travaillent au Qatar, mais il les a autorisés à y rester s’ils le voulaient et à garder leurs emplois. […]
Le même préjudice a atteint les investisseurs qataris, en particulier ceux qui possèdent des biens immobiliers ou des fermes, surtout en Arabie Saoudite ou aux Émirats. Ils se sont donc retrouvés obligés de partir et d’abandonner leurs biens sans même pouvoir les récupérer, ni s’occuper de leur bétail depuis qu’ils ont été obligés de s’en séparer, ni s’enquérir de l’état des dizaines ou centaines de travailleurs étrangers dont les employeurs qataris n’ont plus aucun moyen de renouveler le visa de résidence dans ces pays à cause de l’embargo qui leur est imposé. Même les morts n’ont pas échappé à cette «guerre» déclarée au Qatar, puisque plusieurs familles qataries ont perdu un parent dans l’un de ces pays, mais sont dans l’incapacité totale: elles ne peuvent pas rapatrier le cercueil de leur défunt de ces pays parce qu’elles sont désormais persona non grata, et elles ne sont pas non plus autorisées à assister aux funérailles. […]
Même si le Qatar paraît tolérant et insiste sur un dialogue sérieux entre les différentes parties, il ne permettra aucune atteinte à ses citoyens ni à sa souveraineté. Devant l’obstination des «pays de l’embargo» à continuer dans l’erreur, un comité a été formé par le Qatar pour exiger des dédommagements. De son côté, la Commission qatarie des droits de la personne a recruté un bureau international d’avocats afin qu’il prenne en charge les dossiers des victimes de l’embargo, qu’ils soient qataris ou résidents, ainsi que les citoyens des pays de l’embargo qui ne sont pas moins affectés. […]