Des excuses réclamées pour les rafles dans les bars gais
Des descentes policières violentes ont visé la communauté LGBTQ jusqu’aux années 1990
Alors que des démarches d’excuses envers la communauté LGBTQ ont été entreprises au Canada pour réparer les injustices du passé, la pression monte à Montréal pour que des excuses officielles soient formulées au sujet des rafles policières menées dans des bars gais des années 1960 aux années 1990.
Jeudi, jour d’ouverture du festival Fierté Montréal, Projet Montréal a demandé à l’administration Coderre et au Service de police de la Ville de Montréal (SPVM) de présenter des excuses en ce sens à la communauté LGBTQ.
«La communauté LGBTQ a été victime de harcèlement systémique de la part du Service de police de la Ville de Montréal, et ce, pendant plusieurs décennies. Cette répression constitue une tache sur la feuille de route du SPVM et de la Ville de Montréal, qui doivent faire amende honorable et s’excuser officiellement auprès de la communauté», a déclaré Richard Ryan, conseiller du Mile End pour l’opposition officielle.
Bien qu’il n’en ait jamais formulé la demande, celle-ci est légitime aux yeux du président-fondateur de Fierté Montréal, Éric Pineault. «Des excuses seraient appropriées et bienvenues. Cela permettrait aux victimes des rafles de tourner la page», a-t-il soutenu en entrevue au Devoir.
Le maire de Montréal, Denis Coderre, doit prononcer un discours vendredi dans le cadre de Fierté Montréal, mais M. Pineault ne s’attend pas à ce qu’il profite de cette tribune pour présenter des excuses. «Habituellement, c’est un processus, ça prend des consultations», explique-t-il.
Contrairement à Projet Montréal, M. Pineault ne souhaite pas faire pression sur la Ville. « Je préfère que les excuses soient faites de façon convenable», dit-il.
«Une purge»
Selon les chiffres avancés par Projet Montréal, plus de 800 personnes ont été arrêtées injustement au cours de violentes rafles policières effectuées notamment dans les bars TruXX, en 1977, Buds, en 1984, Sex Garage, en 1990, et aux Katacombes, en 1994. «La dernière rafle date des années 1990, c’est très récent», souligne M. Pineault.
Ces interventions policières étaient particulièrement violentes. «Des personnes se faisaient traîner sur l’asphalte et tirer par les cheveux», illustre-t-il.
Ces descentes sont un côté sombre et méconnu de l’histoire de la métropole. « C’était une purge, on ne voulait pas qu’il y ait un Village. Le maire Jean Drapeau y est allé assez fort», souligne Éric Pineault.
La descente au TruXX le 22 octobre 1977, qui a mené à 146 arrestations, a d’ailleurs été l’élément déclencheur de la première marche de la communauté LGBTQ à Montréal, en 1979, affirme le président de Fierté Montréal. «C’était très politique et revendicateur.»
Des rafles similaires ont eu lieu dans des saunas de Toronto en 1981. Près de 300 clients et exploitants de ces lieux avaient été arrêtés lors d’une opération policière. Le chef de police de la métropole ontarienne, Mark Saunders, a présenté des excuses publiques à cet effet l’an dernier.
En mai 2017, le gouvernement Trudeau s’est quant à lui engagé à formuler des excuses officielles au nom du Canada à toutes les personnes qui ont été victimes d’injustices en raison de leur identité sexuelle ou de genre. Ces excuses doivent être présentées d’ici la fin de l’année, avait affirmé le député Randy Boissonnault, conseiller spécial du premier ministre sur les questions de diversité sexuelle.
La Ville de Montréal et le SPVM n’ont pas réagi aux demandes d’excuses pour les rafles dans les bars gais formulées jeudi.