Le terme «migrant» permet de revoir les catégories juridiques
Dans son texte («“Migrants”, un terme à proscrire », 10 août 2017), François Côté affirme que le terme «migrant» est à proscrire. Bien qu’il soit utile de distinguer les diverses catégories, la dimension juridico-centrique de ce texte fait perdre de vue que la réalité sociologique n’est pas si claire.
Les pêcheurs de villages côtiers du Sénégal qui arrivent en Espagne sans autorisation après la destruction de leur travail par la surpêche espagnole sont-ils des réfugiés économiques ? Ou environnementaux ? Ces raisons ne sont pas pourtant reconnues juridiquement.
Les «immigrants illégaux» de M. Côté, dont on sait qu’ils migrent généralement légalement et se retrouvent plutôt dans une situation d’instabilité et passent par des périodes durant lesquelles leurs permis précaires ne sont plus valides… puis en demandent un autre et l’obtiennent. Sont-ils à 50% légaux?
Un demandeur d’asile débouté parce que le commissaire de la CISR ne l’a pas cru (les preuves documentaires étant toujours limitées et les décisions des commissaires variant radicalement d’une personne à l’autre), est-il, puisque le commissaire l’a affirmé, objectivement sans besoin de protection?
La catégorie «migrant», avec ses limites quant aux nuances, est mise de l’avant par les associations de droits des personnes migrantes pour souligner que les distinctions juridiques et politiques ne sont pas naturelles et neutres, que le phénomène migratoire précède l’État, et qu’il faut lutter pour le droit de tous et toutes à migrer et à vivre dans la dignité et le respect. David Moffette, Ph. D, professeur adjoint au Département de criminologie de l’Université d’Ottawa Le 10 août 2017