Entre provocation et loyauté familiale
Portrait croisé de Donald Trump et Kim Jong-un, au coeur d’une surenchère sans précédent
Lundi, le président américain, Donald Trump, interrompt ses vacances à Bedminster, au New Jersey, pour une visite éclair à Washington. Il a lui-même annoncé qu’il tiendrait une conférence de presse, mais celle-ci n’a pas été confirmée. La semaine qui vient de s’écouler aux États-Unis a mis plus d’une fois le président sur la sellette. S’il est très critiqué pour ses commentaires après le drame survenu à Charlottesville, en Virginie, la surenchère avec la Corée du Nord retient beaucoup l’attention. Samedi, Donald Trump a maintenu l’option militaire contre Pyongyang.
Kim Jong-un et Donald Trump n’ont a priori rien en commun, mais entre goût de la provocation et placement au coeur du pouvoir de leur dynastie familiale, les dirigeants nord-coréen et américain partagent plusieurs traits.
D’habitude, c’est Kim Jong-un qui se distingue par ses propos belliqueux et ses menaces, serpent de mer de la diplomatie internationale ces dernières années.
Kim n’avait pas hésité par le passé à menacer Séoul de la transformer en «mer de feu».
Mais il se retrouve presque rendu falot par un Donald Trump qui n’a pas hésité à user du même registre en menaçant Pyongyang de subir «le feu et la colère» des États-Unis en cas d’attaque nucléaire, reprenant cette image d’un «feu» nucléaire, chère à Kim Jong-un.
Le goût du théâtre et de la mise en scène est commun aux deux hommes, Kim en tant qu’héritier d’un régime s’appuyant sur une intense propagande d’État, Trump arrivant avec son passé de star de la télé-réalité.
Avec Trump, «chaque jour est comme un minishow, où on a besoin d’un ennemi, d’un sens du drame, d’un gentil, d’un méchant, tous ces éléments classiques du divertissement populaire», analyse John Delury, professeur à l’Université Yonsei de Séoul.
Et le spectacle n’est pas près de s’arrêter, chacun des deux acteurs « y prenant goût », prédit l’analyste.
Deux mondes distincts
Mais, au-delà de leur rhétorique va-t-en-guerre, la façon dont les deux hommes sont arrivés au pouvoir les renvoie dans deux mondes bien distincts.
«Donald Trump est sans doute le président des États-Unis le plus improbable qu’on pouvait imaginer, tandis que Kim Jong-un est le dauphin désigné», rappelle John Delury.
Des années avant sa mort en 2011, Kim Jong-il avait soigneusement préparé son remplacement par son fils au sommet de la pyramide du pouvoir nord-coréen.
De son côté, Donald Trump est l’outsider de la dernière présidentielle américaine, élu de justesse, sur le thème du rejet des élites de Washington.
Magnat de l’immobilier milliardaire, il est loin d’une Hillary Clin-
ton travaillant ses dossiers depuis des années.
L’âge les oppose aussi: Kim, 33 ans, fait partie des plus jeunes leaders mondiaux, tandis que Trump est un septuagénaire.
En famille
Les deux hommes ont cependant en commun leur obsession de la loyauté, s’entourant de proches qui sont souvent aussi des membres de leur famille.
Ils ont à coeur «de s’assurer que leurs hommes dirigent le système. C’est un trait commun entre Kim et Trump», souligne John Delur y.
En Corée du Nord, la notion de dynastie familiale est la base du culte de la personnalité, Kim Jong-un allant jusqu’à imiter les manières et l’écriture de son grand-père Kim Ilsung, fondateur du régime.
Et plusieurs de ses proches sont à des postes clés.
Dans une certaine mesure, le phénomène est similaire à Washington, avec la fille de Trump Ivanka qui a le statut de conseillère, son mari, Jared Kushner, étant lui aussi un proche conseiller de Donald Trump.
Le fait de diriger en famille «a été formalisé dans le système nord-coréen, mais la famille Trump l’a introduit aux ÉtatsUnis », suscitant des critiques, conclut John Delur y.