Des objectifs trop ambitieux pour le centre-ville de Montréal ?
La stratégie dévoilée pour développer le centre de la ville suscite des doutes chez les acteurs du logement et de l’opposition
Le centre-ville de demain offrira 100 000 déplacements supplémentaires en transport en commun par jour et disposera de cinq nouvelles écoles publiques et de 1000 nouveaux logements pour les familles, selon les objectifs que la Ville de Montréal doit atteindre d’ici 2030. Ces idées sont saluées, mais des doutes persistent sur la capacité de les mener à terme.
Aucun budget précis n’a été avancé par la Ville lors de la présentation de son plan d’action pour le centre-ville lundi. Le maire Denis Coderre a seulement évoqué les 400 millions du Programme triennal d’immobilisation (PTI) pour financer certains chantiers.
Transports. Pour améliorer l’offre de transport en commun, l’administration compte sur la mise en place du Réseau électrique métropolitain (REM), dont trois stations seront aménagées dans le centre-ville.
Montréal s’engage aussi à bonifier le réseau desservant ce secteur depuis le nord-est et l’est de Montréal, mais le maire est resté vague sur comment cela se concrétisera. «On va regarder ce qu’il y a de mieux. On se donne toutes les options », a-t-il déclaré.
Un flou qui soulève l’indignation de la chef de Projet Montréal, Valérie Plante. «C’est aberrant que le maire dise qu’on va commencer à réfléchir au transport en commun alors qu’il n’y a pas pensé durant les quatre dernières années. » Logements. La Ville souhaite attirer 50 000 nouveaux résidants dans le secteur du centre-ville d’ici 2030, dont 3000 nouvelles familles d’ici dix ans. Ces chiffres inquiètent le coordonnateur de la Table interaction du quartier Peter-McGill, Stéphane Febbrari. «C’est beaucoup de monde, 50 000 personnes, commençons par nous occuper des 34 000 résidants dans Peter-McGill qui manquent d’espaces verts», suggère-t-il.
Les projets immobiliers qui verront le jour doivent comprendre des logements sociaux et communautaires, conformément à la Stratégie d’inclusion de logement abordable de Ville-Marie, qui prévoit 15 % de logements sociaux dans tout projet de plus de 100 unités de logement.
Une mesure insuffisante pour les besoins du secteur, selon la porte-parole du Front d’action populaire en réaménagement urbain (FRAPRU), Véronique Laflamme. « Le revenu annuel médian des locataires de Ville-Marie est de 26 000$, alors qu’il est de 32 500$ dans l’ensemble de Montréal », soutient-elle.
Le maire souhaite plus de mixité sociale, mais il a souligné que «ça va toujours coûter un peu plus cher parce qu’on est dans le centre-ville».
«C’est une fatalité, que ce soit plus cher dans le centreville ? Nous, on pense que non, rétorque Mme Laflamme. L’enjeu est de maintenir la population à faible et modeste revenu dans le centre-ville. »
Écoles. Pour que de nouvelles familles s’établissent dans le secteur, des écoles publiques devront être construites. L’administration Coderre prévoit en implanter cinq d’ici 2030.
L’une d’entre elles se situera sur l’ancien site de l’Hôpital de Montréal pour enfants, a annoncé le maire lundi. Cette annonce réjouit Stéphane Febbrari. «C’est une bonne nouvelle pour nous, on a toujours 330 jeunes qui n’ont accès à aucune école primaire dans le quartier.»
Valérie Plante, également conseillère dans Ville-Marie, souligne que les besoins sont grands. «C’est une demande depuis longtemps par la population, je suis heureuse qu’enfin, on entende cette préoccupation », avance-t-elle.
La chef de Projet Montréal doute néanmoins de la capacité de l’administration à atteindre les cibles ambitieuses qu’elle s’est données. « Oui sur papier, mais est-ce que ça va se concrétiser? Je me base sur le bilan de son administration, je suis très sceptique.»
Le directeur général de Destination Montréal, André Poulin, se pose lui aussi des questions à la lecture du plan pour le centre-ville. « On ne voit pas vraiment de mesures dans la stratégie qui nous est présentée. Quels seront les moyens mis en place? Les efforts déployés?»
Il accueille néanmoins favorablement cette annonce. «Ce n’est pas parfait, mais c’est un début. »