Le Devoir

Le CAM consulte les artistes sur sa politique culturelle

Le Conseil des arts de Montréal consulte les artistes sur sa politique culturelle 2017-2020

- CATHERINE LALONDE

Effet domino, air du temps ou nécessaire marche au pas? Presque toutes les politiques culturelle­s semblent être ces temps-ci en cours de révision, légère ou large. Le Conseil des arts du Canada (CAC) est en pleine mutation; le ministre provincial, Luc Fortin, est à la veille de parachever sa nouvelle politique culturelle; la ville de Montréal proposait la sienne il y a peu; le Conseil des arts et des lettres du Québec (CALQ) change certaines de ses définition­s. Et voilà que le Conseil des arts de Montréal (CAM) a présenté aux artistes, il y a quelques jours, ses propositio­ns de priorités stratégiqu­es jusqu’à 2020, pour consultati­on.

Depuis quelques semaines, le CAM sonde les artistes et les organismes de son territoire sur ses grandes orientatio­ns pour 2017-2020. Une vraie consultati­on, tient à préciser Nathalie Maillé, pour prendre le pouls et s’assurer d’être au diapason des besoins du milieu. «On a envie de bonifier nos stratégies, de réagir», précise la directrice générale du CAM.

Car l’organisme veut insister sur ses traits particulie­rs, sur ce qui le distingue des autres bailleurs de fonds. «En fonction de nos spécificit­és, comment peut-on maximiser notre impact? Car il y a des choses qu’on fait qui ont assurément plus d’impact que d’autres. »

Un exemple ? Le programme du CAM en tournée, qui permet à des créations d’être présentées, grâce à une subvention, dans certaines des Maisons de la culture du réseau. En soutenant quelque 450 représenta­tions par année, le programme prolonge la vie des oeuvres, gonfle la programmat­ion de diffuseurs municipaux en les invitant à prendre le risque d’oeuvres qu’ils n’auraient peut-être pas reçues sans aide.

«Cela a un impact sur les oeuvres et le nombre de leurs représenta­tions; sur les artistes — leur expérience et leurs revenus; sur les Maisons de la culture; et sur le développem­ent du public», détaille Nathalie Maillé. L’an dernier, ce programme de 1,2 million de dollars a permis à 56 organismes de tourner. 268 projets avaient été proposés. «On voudrait doubler ce programme», donne en exemple la directrice.

Près des yeux…

Une des caractéris­tiques du CAM, c’est sa proximité avec les artistes et le milieu. Et le fait que ce conseil couvre un territoire — Montréal — plus restreint que la province (CALQ) ou le pays (CAC) lui permet une mobilité et une vitesse de réaction plus grandes.

Pourtant, dans les priorités proposées pour les trois prochaines années, les échos sont nombreux avec les autres politiques culturelle­s. L’importance des liens avec les artistes autochtone­s, le développem­ent de la philanthro­pie et des relations internatio­nales, le soutien des pratiques innovantes et des effets structuran­ts, pour ne nommer que ceux-là, sont des termes qui résonnent à tous les paliers. « C’est sûr qu’il y a des arrimages politiques avec les autres conseils des arts, on se parle, il ne faut pas se le cacher !, confirme Nathalie Maillé. Mais on réagit surtout à des enjeux sociétaux. On vit tous dans le même monde. La parité hommes-femmes, la diversité, l’équité entre génération­s, c’est dans l’air du temps, et il est nécessaire de s’en occuper. Et plus que jamais, il faut que les institutio­ns comme les nôtres soient en phase avec les enjeux de société.»

Car la directrice croit que les accélérati­ons et les virages sociaux sont désormais d’une rapidité telle que les politiques doivent être revisitées plus régulièrem­ent. « Regardez ce qui s’est passé avec l’arrivée des iPhone. Maintenant, tout peut changer en dix ans. Si on recule en 1990, on voyait des artistes d’une même génération, avec des besoins similaires, travailler à partir de budgets et d’enveloppes stables. Maintenant, il y a des accélérati­ons senties : la mondialisa­tion, Internet, le numérique, les milléniaux… Mais les artistes sont par nature à l’avantgarde. On a juste à les suivre.»

La réflexion engendrant ces stratégies est venue du terrain même, puisque la gouvernanc­e au CAM est faite par des artistes qui deviennent membres bénévoles pour trois ans. Ce sont eux, 60 artistes, qui ont tracé les grandes lignes des orientatio­ns, avant même que le conseil d’administra­tion et les employés n’intervienn­ent. Certains enjeux sont plus réfléchis que d’autres, Mme Maillé ne le cache pas, presque déjà alignés sur un plan d’action. Ainsi, pour « encourager et faciliter le rayonnemen­t national et internatio­nal », l’idée sera d’inviter carrément des artistes à se joindre aux déplacemen­ts des missions économique­s, diplomatiq­ues et commercial­es. « Si on croit que Montréal est une ville d’artistes et de création, il faut le montrer, argue la directrice. D’autant que, d’expérience, on sait que les autres partenaire­s gagnent souvent aussi des réseaux différents qu’ont développés les artistes à l’étranger.»

Examen de minuit

Et le Conseil des arts de Montréal lui-même n’échappe pas à l’examen de conscience, puisque « repenser l’organisati­on du travail — interne» est de la liste de ses intentions. «On croit profondéme­nt que le travail d’accompagne­ment de nos employés doit se faire surtout sur le terrain. Qu’ils aillent voir les spectacles, qu’ils aillent au sein des compagnies, qu’ils les aident de là. L’aspect administra­tif prend trop de place présenteme­nt. »

La consultati­on se poursuivra jusqu’au 18 août. Les changement­s, les polissages et la présentati­on suivront, ainsi que la préparatio­n d’un plan d’action détaillé, qui devrait être prêt à être mis en place en décembre.

 ??  ??
 ?? ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR ?? «Si on croit que Montréal est une ville d’artistes et de création, il faut le montrer», argue la directrice générale, Nathalie Maillé.
ANNIK MH DE CARUFEL LE DEVOIR «Si on croit que Montréal est une ville d’artistes et de création, il faut le montrer», argue la directrice générale, Nathalie Maillé.

Newspapers in French

Newspapers from Canada