Le Devoir

Odinga s’organise en vue d’un mardi décisif

- FRANÇOIS AUSSEILL CYRIL BELAUD à Nairobi

La vie a repris timidement lundi à Nairobi, les sympathisa­nts de l’opposition kényane ayant été priés de rester chez eux par leur leader Raila Odinga, qui réfléchiss­ait à la marche à suivre pour mieux s’opposer à la réélection du président Uhuru Kenyatta.

En signe de deuil pour les 16 personnes — dont une fillette de neuf ans — tuées dans les violences survenues entre l’annonce de la victoire de M. Kenyatta vendredi soir et samedi soir, M. Odinga a demandé à ses partisans de ne pas travailler lundi et d’attendre qu’il annonce sa stratégie mardi.

Le reste de la population de la capitale kényane Nairobi, qui avait des allures de ville morte depuis le scrutin du 8 août, a mis à profit ce répit pour commencer à reprendre une activité à peu près normale, les voitures faisant leur réappariti­on.

Kenneth Kiruja, un expert en informatiq­ue de 30 ans, est retourné à son bureau pour la première fois depuis l’élection. «La vie doit continuer. Nous avons eu les élections et nous avons choisi qui nous voulions », a-t-il dit à l’AFP.

Dans le bidonville de Kibera, un des hauts lieux de la contestati­on, de nombreuses personnes sont aussi retournées à leurs tâches quotidienn­es, certaines échoppes ayant rouvert.

«Je suis triste que Raila n’ait pas gagné, mais qu’est-ce qu’on peut faire maintenant? C’est fini et on veut la paix», a confié Margaret, une coiffeuse de 62 ans. «Je suis venue travailler, parce que j’ai besoin de manger, mes enfants et mes petits-enfants aussi.»

Le chef de la police de Nairobi, Japheth Koome, s’est aussi voulu positif. «La situation est presque de retour à la normale. Les Kényans ont envie d’avancer et d’aider le pays », a-t-il estimé, affirmant que la sécurité prévalait dans la capitale.

Déjà dimanche, la tension avait baissé d’un cran dans les bidonville­s de Kibera, Mathare, et Kawangware, à Nairobi, ainsi que dans la ville de Kisumu (ouest), les fiefs de l’opposition qui avaient concentré l’essentiel des violences entre manifestan­ts et policiers.

Une situation précaire

Les violents affronteme­nts dimanche soir à Mathare entre des membres de l’ethnie luo de M. Odinga et des partisans kikuyu du président Kenyatta, qui ont fait au moins deux blessés graves, avaient cependant rappelé combien la situation demeure précaire.

Avant cet incident, dont ont été témoins des photograph­es de l’AFP, M. Odinga avait rompu un silence de près de 48 heures en s’adressant à des milliers de partisans en liesse à Kibera et Mathare.

«Nous n’avons pas encore perdu. Nous n’abandonner­ons pas. Attendez que j’annonce la marche à suivre [mardi] », avait-il déclaré sous les applaudiss­ements nourris.

M. Kenyatta s’est aussi chargé lundi de mettre habilement la pression sur M. Odinga, qui à 72 ans livre probableme­nt sa dernière grande bataille après ses trois précédents échecs à la présidenti­elle (1997, 2007, 2013). Le chef de l’État a ainsi invité ceux qui rejettent encore le résultat à recourir « aux voies légales […] afin d’exprimer leur insatisfac­tion».

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