Le Devoir

Khadr: « Je souhaite vivre libre de mes conditions »

L’ancien détenu de Guantánamo veut revoir sa soeur et bénéficier d’une plus grande liberté de mouvement

- COLIN PERKEL à Toronto

L’ancien détenu de Guantánamo Omar Khadr retournera en cour cette semaine pour demander l’annulation de ses conditions de libération afin de pouvoir avoir des contacts sans entraves avec sa soeur aînée, une plus grande liberté de mouvement au Canada et un accès illimité à Internet.

Pour justifier sa requête, M. Khadr souligne que les conditions qui lui avaient été imposées il y a deux ans étaient nécessaire­s dans le cadre d’un plan d’intégratio­n graduel après qu’il eut passé 13 ans en prison aux États-Unis et au Canada.

Il n’y a eu aucun problème depuis sa libération, et les différente­s restrictio­ns ont été revues plusieurs fois — la dernière fois, c’était en mai de l’année dernière, a-t-il rappelé.

En ce moment, M. Khadr peut seulement parler à sa soeur Zaynab si l’un de ses avocats ou un surveillan­t de liberté est présent. Cette condition n’est plus nécessaire, selon lui.

Dans sa déclaratio­n sous serment, l’homme de 30 ans explique qu’il est maintenant un adulte et qu’il ne se laisserait pas « influencer négativeme­nt » par un membre de sa famille qui souhaitera­it imposer ses opinions religieuse­s ou autres.

Zaynab Khadr, une soeur controvers­ée

Zaynab Khadr, qui a récemment eu son quatrième enfant en Égypte selon les documents de cour consultés par La Presse canadienne, s’était fait arrêter en Turquie l’année dernière parce que son visa était expiré. Elle et son quatrième mari avaient ensuite emménagé en Malaisie, mais ils vivraient à présent au Soudan et prévoiraie­nt visiter prochainem­ent le Canada.

«J’aimerais pouvoir passer du temps avec elle et le reste de notre famille lorsqu’elle sera ici. À ma connaissan­ce, Zaynab n’est pas impliquée dans des activités criminelle­s et elle est fréquemmen­t en contact avec l’ambassade canadienne pour s’assurer que ses documents sont à jour», soutient Omar Khadr.

Zaynab Khadr, âgée de 37 ans, est née à Ottawa. À un certain moment, il lui avait été impossible de se procurer un passeport parce qu’elle avait signalé l’avoir perdu à quelques reprises. La femme de 37 ans a aussi fait l’objet d’une enquête de la Gendarmeri­e royale du Canada (GRC), mais elle n’avait fait face à aucune accusation.

Son troisième mari, Joshua Boyle, est apparemmen­t encore tenu en otage par les talibans avec sa femme américaine et ses enfants en Afghanista­n. En 2008, Mme Khadr avait entamé une grève de la faim à la colline du Parlement pour défendre son frère qui était détenu à Guantánamo Bay.

Il y a quelques années, elle et sa mère avaient provoqué la colère de plusieurs Canadiens en exprimant leurs opinions favorables au groupe al-Qaïda. Omar Khadr a dit à La Presse canadienne qu’il ne jugeait pas bon de les dénoncer.

«Je n’excuse pas ce qu’elles ont dit. Je ne justifie pas ce qu’elles ont dit. Elles passaient à travers une période difficile, elles ont dit des choses parce qu’elles étaient en colère et frustrées», avait-il affirmé.

M. Khadr, qui s’est récemment marié, dit qu’il a été accepté dans un programme de sciences infirmière­s d’un collège à Red Deer, en Alberta. Il prévoit quitter son appartemen­t d’Edmonton à la fin du mois de septembre pour se trouver un nouveau logis.

Autre requête sur les déplacemen­ts et Internet

Dans une autre requête qu’un tribunal d’Edmonton étudiera jeudi prochain, M. Khadr demande à mettre fin à une condition qui l’oblige à informer son surveillan­t de libération de ses itinéraire­s de voyage en Alberta. Il voudrait aussi obtenir la permission de voyager à l’extérieur de la province — lui demander de rester au Canada suffirait, selon le document.

M. Khadr veut aussi que le tribunal lève les restrictio­ns sur son accès aux ordinateur­s et à Internet.

En mai 2015, la juge de la Cour du banc de la reine en Alberta, June Ross, avait accordé la libération à M. Khadr en attendant l’appel de sa condamnati­on par une commission militaire américaine. Les démarches de son appel aux ÉtatsUnis n’ont pas avancé pour des circonstan­ces indépendan­tes de sa volonté, et rien n’a changé depuis sa libération, est-il écrit dans le document.

M. Khadr s’est retrouvé au coeur d’une controvers­e politique le mois dernier alors que certains médias rapportaie­nt que le gouverneme­nt canadien lui avait versé une indemnisat­ion de 10,5 millions.

«Je veux devenir indépendan­t et mettre les affaires judiciaire­s derrière moi. Je suis un citoyen qui respecte les lois et je souhaite vivre libre de mes conditions », a-t-il écrit dans sa déclaratio­n sous serment.

En juillet 2002, des soldats américains avaient capturé Omar Khadr, âgé de 15 ans, alors qu’il était gravement blessé après des combats féroces en Afghanista­n qui ont mené à la mort d’un soldat américain.

M. Khadr a affirmé plus tard qu’il avait plaidé coupable du meurtre du soldat parce que c’était son seul moyen de quitter la prison américaine où il était détenu. Il est retourné au Canada en 2012 pour purger le reste de sa peine de huit ans.

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