Le Devoir

L’enjeu de la concurrenc­e demeure, selon l’industrie

Québec termine une consultati­on sur les règles qui encadreron­t le système de 2021 à 2023

- FRANÇOIS DESJARDINS

Même si les prochaines règles du marché du carbone sont plus souples que ce que prévoyait le scénario proposé l’an dernier, la compétitiv­ité des entreprise­s émettrices québécoise­s continue de préoccuper le lobby patronal en matière de questions environnem­entales.

Le gouverneme­nt du Québec, qui termine demain une consultati­on sur la dernière mouture des règlements, a répondu favorablem­ent aux demandes industriel­les de ne pas réduire rapidement les allocation­s gratuites d’émissions de gaz à effet de serre pour la période 2021-2023.

Or selon le Conseil patronal de l’environnem­ent du Québec (CPEQ), qui salue ce geste et voit dans l’ensemble des règlements un projet «assez intéressan­t», les entreprise­s continuent néanmoins de fonctionne­r dans un monde où seuls la Californie et l’Ontario ont des règles similaires.

«L’enjeu de la compétitiv­ité des entreprise­s québécoise­s avec celles situées ailleurs demeure entier, a écrit le CPEQ dans son mémoire. Il est essentiel que les droits d’émission distribués gratuiteme­nt demeurent assez élevés pour permettre aux entreprise­s québécoise­s de demeurer compétitiv­es dans un marché internatio­nal où les mécanismes de tarificati­on de carbone peuvent être moins contraigna­nts, voire inexistant­s.»

Selon le CPEQ, le scénario de 2016 proposait une réduction annuelle de 5% pour les émissions de combustion et de 3% pour les émissions fixes de procédés. En vertu du nouveau scénario, ces baisses seraient respective­ment de 1,5 % et 0,5 %.

Environ 15% des émissions mondiales sont couvertes par un système ou un autre de tarificati­on du carbone. Ces systèmes ont été adoptés par une quarantain­e de pays et 25 gouverneme­nts régionaux.

Le Québec veut réduire ses émissions de 37,5% d’ici 2030, par rapport au niveau de 1990. De 1990 à 2012, la diminution n’a été que de 8%. Le secteur industriel répète depuis longtemps qu’il coûterait extrêmemen­t cher de faire

davantage de gestes, car il a lui-même réduit ses émissions de 20%, alors que le secteur du transport a affiché une hausse de 25,7 %.

Le marché du carbone établit un plafond sur les émissions de gaz à effet de serre et distribue aux émetteurs des allocation­s gratuites. Les entreprise­s qui dépassent le maximum autorisé doivent acquérir des droits d’émissions auprès du gouverneme­nt ou des entreprise­s qui affichent un surplus.

Les ventes aux enchères permettant à Québec de vendre des droits d’émissions permettron­t

de récolter 3,3 milliards de 2013 à 2020, ces sommes étant versées au Fonds vert pour des projets d’efficacité énergétiqu­e et de transport en commun, notamment. Le Québec organise des enchères communes avec la Californie, un duo auquel est en train de se joindre l’Ontario.

S’il est vrai que des enjeux de concurrenc­e peuvent s’appliquer à certaines industries, «le problème, c’est que nous n’avons aucune analyse qui permet de justifier» autant d’allocation­s gratuites pour les grands émetteurs, a dit Patrick Bonin, le responsabl­e de la campagne Climat-Énergie chez Greenpeace Canada. De 2013 à 2015, a-t-il fait remarquer, les émissions réelles se

sont avérées inférieure­s aux allocation­s gratuites.

Par ailleurs, le gouverneme­nt a l’intention de proposer pour la période post-2024 un système comparant le coût du carbone au Québec et ailleurs afin de moduler les allocation­s gratuites versées aux entreprise­s émettrices. Le CPEQ plaide pour que la comparaiso­n tienne compte des «différente­s divisions de l’entreprise, si celles-ci ont des activités ailleurs qu’au Québec ».

L’établissem­ent des règles du marché du carbone pour la période 2021-2023 survient alors qu’Ottawa demande aux provinces d’embarquer dans la tarificati­on du carbone dès 2018.

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