Le Devoir

Nucléaire iranien Donald Trump veut durcir l’accord sans en sortir

- JÉRÔME CARTILLIER FRANCESCO FONTEMAGGI à Washington

Le président américain, Donald Trump, a menacé vendredi de mettre fin «à tout moment » à l’accord internatio­nal qui vise à empêcher l’Iran de se doter de la bombe atomique, provoquant l’inquiétude des autres pays signataire­s et ouvrant une période de grande incertitud­e.

S’il a prononcé un réquisitoi­re enflammé contre ce texte emblématiq­ue, «le pire» jamais négocié par les ÉtatsUnis, M. Trump a cependant assuré que son pays ne s’en retirerait pas pour l’instant.

Mais dans une allocution extrêmemen­t virulente à l’encontre du régime de Téhéran, qu’il a qualifié de « dictatoria­l », il a précisé qu’il ne « certifiera­it » pas le fait que Téhéran respecte ses engagement­s, en dépit des assurances en ce sens de l’Agence internatio­nale de l’énergie atomique.

« Quel est le sens d’un accord qui ne fait que retarder la capacité nucléaire de l’Iran pour une courte période ? Le président américain, Donald Trump

Son discours a provoqué une réaction virulente de Téhéran. Les États-Unis sont «plus seuls que jamais contre le peuple iranien », a lancé le président iranien, Hassan Rohani.

Moscou a immédiatem­ent dénoncé la stratégie de l’occupant de la Maison-Blanche, très isolé sur ce dossier. La chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, a mis en garde contre la tentation de «démanteler un accord qui fonctionne et tient ses promesses ».

Inquiétude européenne

Dans un communiqué à la tonalité diplomatiq­ue mais ferme, Paris, Berlin et Londres ont rappelé que cet accord avait été l’aboutissem­ent de «13 années de diplomatie».

La première ministre britanniqu­e, Theresa May, la chancelièr­e allemande, Angela Merkel, et le président français, Emmanuel Macron, ont souligné qu’ils restaient « engagés » dans l’accord, appelant à sa «pleine applicatio­n par toutes les parties».

«Quel est le sens d’un accord qui ne fait que retarder la capacité nucléaire de l’Iran pour une courte période?» s’est interrogé le président américain, soulignant que son gouverneme­nt souhaitait en particulie­r supprimer les échéances en vertu desquelles les restrictio­ns sur le programme nucléaire pourraient être levées progressiv­ement après 2025.

M. Trump a également annoncé des sanctions contre certains membres des Gardiens de la révolution, l’armée d’élite iranienne.

À contre-courant des signataire­s de l’accord, le premier ministre israélien, Benjamin Nétanyahou, a immédiatem­ent félicité le milliardai­re républicai­n pour sa « décision courageuse ».

L’Arabie saoudite, monarchie sunnite du Golfe qui redoute la montée en puissance de son grand rival chiite, a salué la « stratégie ferme » de M. Trump.

«Doctrine du retrait»

Cette «non-certificat­ion» place de facto le Congrès américain en première ligne. La majorité républicai­ne ne semblait pas prête à réimposer des sanctions et donc à endosser la responsabi­lité de saborder cet accord soutenu par les autres grandes puissances mondiales.

Une solution, élaborée par deux sénateurs républicai­ns en coordinati­on étroite avec la Maison-Blanche et le départemen­t d’État, consistera­it à voter une loi créant un nouveau seuil pour déclencher des sanctions contre l’Iran à l’avenir. Une sorte de mise à jour, unilatéral­e, du «JCPOA» (acronyme anglais de l’accord).

Cette annonce s’ajoute à la longue liste des accords que les États-Unis ont quittés ou menacés de quitter au cours des derniers mois: partenaria­t transpacif­ique (TPP), Accord de Paris sur le climat, Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). Et, depuis jeudi, l’organisati­on onusienne UNESCO, accusée par la Maison-Blanche d’être anti-israélienn­e.

«La politique étrangère de Trump a trouvé un thème: la doctrine du retrait », estimait cette semaine Richard Haass, président du centre de recherche Council on Foreign Relations (CFR).

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