Ménage à trois, façon intello
La naissance et les dessous psychologiques de Wonder Woman
PROFESSOR MARSTON AND THE WONDER WOMEN
Drame biographique d’Angela Robinson. Avec Luke Evans, Rebecca Hall, Bella Heathcote, Oliver Platt. États-Unis, 2017, 108 minutes.
Diana Prince, mieux connue sous le nom de Wonder Woman, ne fut pas une superhéroïne créée sur un coin de table ou dans la tête d’un illustrateur sexuellement frustré. Elle puise autant ses origines à la prestigieuse Université Harvard que dans les antichambres des boutiques de Greenwich Village où se pratiquait le sadomasochisme et autres rituels avec costumes et matériel de domination. Jusqu’au milieu du XXe siècle en Amérique du Nord, les braises d’une sexualité débridée couvaient sous les cendres du conformisme.
Cette genèse, Angela Robinson (The L Word, Herbie Fully Loaded) la raconte avec une fascination évidente dans Professor Marston and the Wonder Women, illustrant aussi un célèbre ménage à trois devenu une famille atypique, chose peu courante aux États-Unis dans les années 1930. Professeur de psychologie, William Moulton Marston (Luke Evans, plus sexy et athlétique que l’original) s’intéresse depuis longtemps aux zones d’ombres du comportement humain, tout comme son épouse Elizabeth (Rebecca Hall, autoritaire, et vulgaire, à souhait), aussi brillante que lui, mais à qui Harvard a refusé de décerner un diplôme, une pratique ouvertement discriminatoire à cette époque.
Aimer, enseigner
La présence d’une séduisante étudiante, Olive (Bella Heathcote, faussement angélique), va distraire l’éminent professeur, ce qui n’échappe pas à Elizabeth. Or, le couple n’hésitera pas non plus à l’associer à ses travaux, dont l’invention du polygraphe, et Olive, que l’on croyait sous le charme de son mentor, en pince surtout pour sa conjointe. Cette dynamique particulière ne sera pas sans lendemain ni sans surprises, même si elle leur coûtera leur emploi, et plus tard leur réputation.
Le récit s’articule en deux temps importants, dont celui entourant une vindicte autour de la populaire Wonder Woman après sa création en 1941, cette créature incarnant toutes les théories, et surtout toutes les expériences intimes de ce trio pas comme les autres. L’accumulation d’allusions sexuelles, avec abondance de jeux de rôles et de pratiques sadomasos à peine voilées, a alerté les gardiens des bonnes moeurs, plaçant Marston sur la sellette, et sur la défensive. Ce procès d’intentions, peu de temps après la Deuxième Guerre mondiale, est entrecoupé des moments charnières entourant les joies, les peines et les fantasmes (souvent matérialisés) de ce trio d’esprits libres, audacieux, un brin insouciants.
Dans la foulée du retour triomphal de la superhéroïne sur grand écran, cette tranche d’histoire sur sa mise au monde arrive à point nommé, même si l’approche d’Angela Robinson, académique à souhait, contredit le caractère salace de son sujet. Même les scènes à caractère sexuel apparaissent moins audacieuses que les illustrations glanées çà et là dans les premières aventures sur papier — qu’on se plaira plus tard à brûler comme au temps de l’Inquisition. Les esprits chagrins auront tout de même compris que derrière la flamboyance des comics et des superhéros se cache parfois d’autres histoires, pour adultes consentants.
Cette tranche d’histoire sur la mise au monde de la superhéroïne arrive à point nommé