Un pétillant roman choral signé Katherine Pancol
Katherine Pancol renoue avec ses personnages fétiches dans un roman effervescent
Pas le temps de s’ennuyer dans l’univers de Katherine Pancol avec tous ces personnages qui se connaissent ou qui sont liés sans le savoir, ces va-etvient de Saint-Chaland à Paris, de New York à Glasgow, tous ces hasards et coïncidences arrangés avec la fille des vues.
Fidèle à elle-même, celle qui a pu voir ses personnages des
Yeux jaunes des crocodiles (Albin Michel, 2006), premier tome de l’imposante saga familiale, transposés au grand écran (sous la gouverne de Cécile Telerman) se permet même de surprenants caméos. Ainsi, Élizabeth II, Rihanna et Inès de la Fressange font trois petits tours parmi cette faune bigarrée, rencontrée la dernière fois dans la trilogie Muchachas (Albin Michel). Retrouvant des personnages de ses précédents romans, dont
La valse lente des tortues et Les écureuils de Central Park sont tristes le lundi (Albin Michel, 2008 et 2010), Katherine Pancol a concocté un pétillant roman choral qu’on lit avidement, bien que l’on sache que les méchants y seront punis et les gentils, récompensés dans une finale bien troussée digne d’un film hollywoodien.
Y évoluent au premier plan d’attachantes protagonistes féminines aux côtés desquelles les héros masculins font parfois pâle figure. Il y a d’abord Stella Valenti, ferrailleuse au physique de mannequin, son ténébreux Adrian, qui fricote dans le dos de leur patron, Edmond Courtois, et leur fils Tom, amoureux fou de la nouvelle élève, Dakota Cooper, qui lui sourit «telle une princesse très gracieuse qui convie un gueux à sa table». Se trouve aussi Julie Courtois, meilleure amie de Stella et fiancée à Jérôme, qui rêve de reprendre la ferraillerie familiale.
Viennent ensuite Joséphine Cortès, demi-soeur de Stella, ses filles Zoé, qui rêve d’être carmélite, et Hortense, qui oeuvre dans le milieu de la mode et qui veut «de l’ÉNORME, de l’ÉNORME! Des millions de dollars,
des millions de photos, des millions de like!». Pendant que Gary la trompe avec Calypso, que sa mécène Elena croque les hommes comme des loukoums et que le surdoué Junior, épris d’elle, joue littéralement avec ses méninges, Hortense séduit Adrian avec son «sourire qui promet la paix et déclare la guerre».
Au-dessus de cette grouillante fourmilière plane le spectre de Ray Valenti, disparu dans un incendie quelques mois auparavant. Au grand dam de sa fille Stella, le lycée que fréquente Tom pourrait bientôt porter le nom de cet infâme
personnage : «Et elle entend le rire cinglant de Ray, sa voix qui grince tout de suite les grands mots, ma petite chérie! La colère des révoltés! J’aime quand tu es noire, sauvage, que ta haine déborde. Tu sais pourquoi? Il éclate de rire. Parce que je gagne toujours et que je vais encore une fois te baiser!»
Complots, trahisons, mensonges, demi-vérités, secrets de famille, désir de gloire ou de vengeance: la romancière offre un étourdissant cocktail à ses lecteurs. Papillonnant allègrement d’une famille à l’autre, flirtant outrageusement avec le surnaturel, Katherine Pancol donne parfois l’impression d’être le clone littéraire de Claude Lelouch, celui du temps où les cinéphiles savouraient ses pirouettes scénaristiques et ses prises de vue vertigineuses.
De fait, malgré les sombres drames, la légèreté est toujours au rendez-vous, au détour d’une réplique piquante, d’une situation cocasse ou du grotesque d’un personnage. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’elle a du souffle, la dame. Et elle sait divertir son public, à défaut de l’émouvoir ou de le faire réfléchir. TROIS BAISERS
Katherine Pancol Albin Michel Paris, 2017, 850 pages