Financement agricole Canada attend plus de clarté
Des prêts à des producteurs de marijuana médicale ont été faits dans le passé, mais pas depuis l’élection du gouvernement Trudeau
Financement agricole Canada n’a effectué aucun prêt dans le domaine du cannabis médical depuis l’élection du gouvernement Trudeau et attend plus de clarté dans les règles avant de revoir sa position. Mais la légalisation de l’usage récréatif pourrait générer de la demande parmi ses clients actuels, reconnaît le prêteur fédéral.
La société d’État, dont le portefeuille de prêts au Québec est de 4 milliards, a environ 20% du marché dans le milieu agricole, un secteur où sont également présents des acteurs comme la Banque Nationale et le Mouvement Desjardins.
«Il est certain qu’il va y avoir une demande. On a des échos selon lesquels certains producteurs — spécialisés dans d’autres types de production — pourraient avoir de l’intérêt », a indiqué en entrevue le vice-président des opérations du Québec chez Financement agricole Canada, Vincent Giard. « Donc des producteurs en serre qui pourraient facilement changer de production s’il y a une ouverture dans le marché, et c’est là la grande inconnue pour le moment. »
Ces propos rappellent ceux des Producteurs en serre du Québec, qui ont affirmé sans détour cet été l’intérêt de leurs membres à explorer cette avenue de production supplémentaire en raison de leur expertise.
Créée en 1959, la société d’État se présente comme le plus important prêteur agricole au Canada, avec des produits financiers allant des marges de crédit au financement d’équipement en passant par le soutien aux transferts d’entreprises. Son portefeuille de financement au Canada est de 32 milliards auprès d’environ 100 000 clients, en très grande majorité des PME. Au Québec, son portefeuille de 4 milliards est constitué de 3,1 milliards en prêts agricoles et 900 millions dans le secteur agroalimentaire.
Projets en branle
Si le gouvernement fédéral a jusqu’ici attribué 67 permis de production de cannabis médical à travers le pays, le registre ne contient qu’un seul producteur québécois, Hydropothicaire, situé à Gatineau. Mais plusieurs projets sont en cours de développement, notamment en Estrie, en Mauricie et en Abitibi.
Financement agricole Canada a effectué une poignée de prêts dans la production de cannabis médical. «Pour le moment, on ne consent plus de nouveau financement, que ce soit pour usage médical ou récréatif. La loi n’a pas encore été approuvée, et la réglementation entourant la production non plus », a dit M. Giard. « C’est très difficile pour un prêteur de faire une saine gestion de risque lorsqu’on ne connaît pas encore la réglementation qui va entourer ça. Donc c’est une mesure provisoire qui va être en vigueur jusqu’à ce qu’on en sache davantage. »
Le statut de société d’État fédérale fait en sorte qu’ «on appuie le programme législatif du gouvernement», a dit M. Giard. « Mais pour le moment, il est bien clair que, tant qu’on n’a pas plus de détails, il est très difficile de se positionner.
« On a des échos selon lesquels certains producteurs — spécialisés dans d’autres types de production — l’intérêt» pourraient avoir de Vincent Giard, vice-président des opérations du Québec
On est un peu en période de transition. »
Au printemps, la Banque Nationale a émis d’importantes réserves sur le financement des producteurs de cannabis médical dans un contexte où des joueurs se positionnent pour profiter de l’ouverture du marché. «Nous nous sommes demandé si nous devrions prêter de l’argent aux producteurs de marijuana et si nous devrions agir comme intermédiaires dans la vente d’actions d’entreprises productrices et, dans les deux cas, nous avons décidé de ne pas le faire», avait affirmé son président, Louis Vachon, en entrevue avec La Presse canadienne. «Nous estimons qu’il y a encore trop de risques légaux, a affirmé M. Vachon. C’est un débat de société. Même s’il y a une loi, est-ce qu’elle pourrait être renversée par un gouvernement subséquent?»
fait la même analyse. « Ça démontre qu’ils sont “en mode panique”, “en mode contrôle des dommages”, ce que leur propre décision et leur propre façon de faire ont créé ces dernières semaines. » Le bloquiste Xavier Barsalou-Duval salue la diminution fiscale. «C’est ce qu’on recommandait. » Mais il ne peut s’empêcher lui aussi d’y voir une tentative d’apaiser « la grogne» dans le caucus libéral.
En matinée, d’ailleurs, le caucus libéral avait été convié pour une rencontre extraordinaire, au cours de laquelle le ministre des Finances Bill Morneau a donné un avant-goût des changements qu’il envisageait. À leur sortie, plusieurs des députés interrogés se sont dits apaisés. C’est le cas notamment de Wayne Long, un député du Nouveau-Brunswick tellement critique de la réforme qu’il avait voté de pair avec les conservateurs pour la dénoncer.
«Pour la première fois depuis un bon bout de temps, je suis optimiste. Je suis positif. J’ai l’impression qu’ils ont écouté », a dit M. Long. Denis Paradis, qui possède luimême un vignoble, a indiqué qu’il était content de ce qu’il a entendu et qu’il se sentait «beaucoup mieux». «Un peu comme tout le monde, comme les gens chez nous, on a manifesté nos craintes comme députés. […] Il manquait un peu de communication avec nous et la population en général, et c’est en train de se replacer.»