Le Devoir

Touchés par le scandale, les studios Weinstein négocient leur vente

- LUC OLINGA à New York

Les studios de cinéma Weinstein, dont la réputation souffre des accusation­s de viol et d’agressions sexuelles contre leur cofondateu­r Harvey Weinstein, envisagent de vendre l’entreprise face aux difficulté­s financière­s provoquées par l’affaire.

La maison de production a indiqué lundi avoir reçu un apport immédiat d’argent frais de la part du fonds d’investisse­ment Colony Capital, ce qui pourrait l’aider à lever à court terme les incertitud­es sur son avenir.

Les deux parties ont en parallèle entamé des discussion­s sur un possible rachat de The Weinstein Company (TWC) par Colony, fonds d’investisse­ment créé par le milliardai­re américain Tom Barrack, un ami du président Donald Trump.

Une réunion du conseil d’administra­tion est prévue ce mardi à New York pour décider du sort final des studios, rapporte la presse américaine. Lundi, Harvey Weinstein était encore présenté sur le site Internet du groupe comme «coprésiden­t ». « Nous pensons que l’investisse­ment et le parrainage de Colony vont aider à stabiliser les opérations en cours de l’entreprise », a souligné lundi Tarek ben Ammar, un des membres du conseil d’administra­tion de TWC. «Nous sommes heureux d’investir dans The Weinstein Company pour l’aider à aller de l’avant», a renchéri Tom Barrack, qui avait notamment organisé la cérémonie d’investitur­e de Donald Trump en janvier dernier.

TWC a licencié Harvey Weinstein le 8 octobre, à la suite d’une série d’accusation­s de harcèlemen­t sexuel qui courent sur trois décennies révélées récemment par les médias américains. Les actrices vedettes Gwyneth Paltrow et Angelina Jolie font notamment partie des accusatric­es alors que les témoignage­s continuent d’affluer.

Fermeture envisagée

Depuis lors, l’avenir des studios était en suspens, car le scandale a emporté plusieurs grands projets de production. Apple a annulé un projet de série sur Elvis Presley et Amazon a indiqué être en train « de réviser [ses] projets avec The Weinstein Company» concernant deux coproducti­ons.

Deux hypothèses étaient évoquées par les observateu­rs: la vente des studios qui continuera­ient à travailler avec un ou plusieurs

nouveaux propriétai­res, ou sa fermeture pure et simple et la vente à la pièce de son catalogue de films et de séries TV.

Les oeuvres de TWC et de Miramax (Pulp Fiction, Kill Bill, Gangs of New York, The Artist, Carol, Shakespear­e in love, Le patient anglais…) ont accumulé 341 nomination­s et récolté 81 statuettes aux Oscar, entre autres récompense­s prestigieu­ses.

Les dirigeants du studio ont également discuté, selon les médias américains, de la possibilit­é de repousser la sortie prévue le 24 novembre du film Current War, le dernier long métrage programmé par la société en 2017.

M. Barrack, qui a fondé Colony en 1991, a bâti sa fortune en investissa­nt dans l’immobilier à risque au Moyen-Orient et dans des crédits immobilier­s toxiques en Allemagne.

Cet amateur de « coups financiers», dont les grands-parents étaient des immigrés libanais, a essuyé des déconvenue­s dans les années 2000 après que ses investisse­ments dans les casinos ont mal tourné.

En France, il est connu pour

avoir été propriétai­re du club de soccer du Paris Saint-Germain de 2006 à 2011 et pour avoir été actionnair­e des hôtels Accor et du géant de la distributi­on Carrefour.

Affaires politiques

Ce n’est pas la première fois que Tom Barrack s’aventure dans le cinéma: associé à un fonds qatarien, il avait déjà racheté les studios Miramax, créés par les frères Weinstein, Bob et Harvey, en 2010 à Walt Disney avant de les revendre. Il a également sauvé de la banquerout­e en 2008 Neverland, l’immense domaine de Michael Jackson.

Aux États-Unis, le scandale menace la campagne électorale du procureur de New York, Cyrus Vance. Il est reproché à ses services leur décision de ne pas poursuivre en 2015 Harvey Weinstein après une plainte de la mannequin italienne Ambra Battilina Gutierez. Certains affirment que ce refus était lié au fait que M. Vance a reçu des contributi­ons financière­s de David Boies, un des avocats du producteur.

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AGELA WEISS AGENCE FRANCE-PRESSE Le siège social de The Weinstein Company à Tribeca, à New York

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