Le Devoir

Culture Le chorégraph­e israélien Hofesh Shechter est à Montréal

Le chorégraph­e israélien est de retour à Montréal avec une pièce reflétant le chaos du monde et l’effondreme­nt d’un système

- MÉLANIE CARPENTIER

Àl’origine, c’est la sensation que tout autour de nous est en train de s’effondrer qui a conduit Hofesh Shechter à créer Grand Finale. Acclamé sur le continent européen et internatio­nalement, le chorégraph­e israélien sera de retour à Montréal à l’invitation de Danse Danse avec une nouvelle pièce à grand déploiemen­t à l’atmosphère de fin du monde.

«Certaines choses arrivent à leur fin, et c’est un bouleverse­ment, mais pas forcément une fin amère, affirme l’artiste installé à Londres. J’étais curieux d’aller explorer cette perte d’espoir qui caractéris­e beaucoup notre temps. Je me suis inspiré d’une part des discours apocalypti­ques que certains peuvent avoir et je constate qu’on dramatise beaucoup trop sûrement. En fait, c’est peut-être juste la fin d’un ordre, d’un cycle, d’une forme de culture ou d’empire qui se fait progressiv­ement. »

L’environnem­ent et l’actualité de la grande métropole abritant La City et ses grandes institutio­ns auraient-ils une influence sur son travail? «Cette pièce ne se veut pas une déclaratio­n politique, répond-il. Par contre, il est possible qu’indirectem­ent certaines pensées et réflexions prenant racine dans le lieu — à propos du capitalism­e et du colonialis­me —, fassent leur chemin jusque dans l’oeuvre. Dans Grand Finale, j’ai surtout voulu mettre l’accent sur comment se comportent et vivent les gens à l’intérieur de ce système, et ce qu’ils ressentent pris à l’intérieur de ce monde de plus en plus chaotique. »

La musicalité comme source

Dans le parcours du chorégraph­e de 42 ans originaire de Jérusalem, la musique précède la danse. Pétri de musique dès le plus jeune âge, il entre dans la danse à 12 ans, d’abord par les danses folkloriqu­es, dont on peut reconnaîtr­e certaines influences dans son travail centré sur les mouvements de groupe et les rondes. D’autre part, l’attachemen­t à la compositio­n musicale — il se spécialise dans les percussion­s — caractéris­e son approche chorégraph­ique à la musicalité très prononcée. Ainsi, pour Grand Finale, Hofesh Shechter a composé une partie de la trame musicale et a collaboré avec six musiciens classiques qui auront eux aussi leur rôle à jouer en matière de théâtralit­é auprès des dix danseurs sur scène.

Alors que le chorégraph­e a fait ses armes comme jeune danseur auprès d’Ohad Naharin, l’approche du mouvement de la Batsheva Dance Company a beaucoup influencé sa manière de chorégraph­ier à partir d’improvisat­ions en étroite collaborat­ion avec les danseurs: « C’était il y a une vingtaine d’années, alors la méthode Gaga n’en était qu’à ses balbutieme­nts. La Batsheva a été une école absolue pour moi, raconte le chorégraph­e. J’ai beaucoup appris de l’idée de trouver une liberté à l’intérieur de corps, du fait de donner la permission au corps de bouger comme il en a envie, d’être à son écoute et de comprendre sa relation au poids et aux énergies qui le traversent. Ohad Naharin m’a en quelque sorte donné une clé pour trouver qui j’étais.»

Influences cinématogr­aphiques

«En tant qu’enfant ayant grandi dans les années 1980 dans une famille modeste, même si l’enseigneme­nt de la musique était présent à la maison, la télévision et les films ont eu un grand impact sur moi. Il y a une part cinématogr­aphique dans mon travail qu’on retrouve justement dans Grand Finale. C’est surtout dans ma manière d’éditer et de créer une atmosphère dans laquelle est plongé le spectateur, en l’amenant d’un point à un autre et en créant une sorte de tension.»

Fasciné par les films de Kubrick, Hofesh Shechter dit admirer chez le maître du 7e art «cette façon de toujours se réinventer, de ne pas s’attacher à un seul style et son audace quant au temps qu’il prend pour installer une atmosphère et nous plonger dedans. Ses films portent une intégrité sans concession, témoignent d’une grande assurance alors qu’ils poussent ces idées à 200%.» Des qualités que s’efforce de cultiver le chorégraph­e associé au Sadler’s Wells Theater dans ses propres pièces et qui font la renommée mondiale de son travail. GRAND FINALE Chorégraph­ie: Hofesh Shechter. Interprète­s: Chien-Ming Chang, Frédéric Despierre, Rachel Fallon, Mickael Frappat, Yeji Kim, Kim Kohlmann, Erion Kruja, Merel Lammers, Attila Ronai, Diogo Sousa; et les musiciens James Adams, Chris Allan, Rebekah Allan, Mehdi Ganjvar, Sabio Janiak, Desmond Neysmith. Présenté par Danse Danse. À la Place des Arts du 1er au 4 novembre.

 ??  ??
 ?? RAHI REZVANI ?? «Dans Grand Finale, j’ai surtout voulu mettre l’accent sur comment se comportent et vivent les gens à l’intérieur d’un système, et ce qu’ils ressentent pris à l’intérieur de ce monde de plus en plus chaotique», explique le chorégraph­e Hofesh Shechter.
RAHI REZVANI «Dans Grand Finale, j’ai surtout voulu mettre l’accent sur comment se comportent et vivent les gens à l’intérieur d’un système, et ce qu’ils ressentent pris à l’intérieur de ce monde de plus en plus chaotique», explique le chorégraph­e Hofesh Shechter.

Newspapers in French

Newspapers from Canada