Le Devoir

L’UE et Londres échouent à boucler leur accord

- CÉDRIC SIMON à Bruxelles

L’Union européenne et le Royaume-Uni ont échoué lundi à boucler un accord sur la première phase des négociatio­ns sur leur divorce, butant sur le dossier irlandais malgré l’optimisme affiché lors d’une rencontre à Bruxelles.

Un accord d’étape sur les trois dossiers prioritair­es du Brexit — le règlement financier, les droits des citoyens expatriés et le sort de la frontière irlandaise — aurait ouvert la voie aux négociatio­ns commercial­es réclamées avec insistance par Londres. Mais « malgré nos meilleurs efforts», «il n’a pas été possible d’arriver à un accord complet [lundi]», a déclaré devant la presse le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, à l’issue d’un long « déjeuner de travail » avec Theresa May.

Le chef de l’exécutif européen, qui a qualifié la première ministre britanniqu­e de négociatri­ce «coriace», a toutefois affirmé qu’un accord lui semblait encore possible «dans le courant de la semaine ».

«Quelques différence­s demeurent qui demandent davantage de négociatio­n et de consultati­on», a confirmé de son côté Mme May, qui a elle aussi confiance d’en arriver à une issue «positive». Elle pourrait revenir à Bruxelles dans les prochains jours pour conclure un accord.

La rencontre de lundi entre les deux dirigeants était pourtant censée finaliser un accord de principe sur les modalités du divorce, programmé fin mars 2019.

Demandes de Dublin

Le président du Conseil européen, Donald Tusk, qui avait qualifié la journée de lundi de «date limite absolue», s’était montré optimiste à la mi-journée, avant d’estimer qu’il était devenu «vraiment serré» de boucler un accord à valider lors d’un sommet européen prévu le 15 décembre. L’UE exige en effet de constater des «progrès suffisants» sur le divorce lors de ce sommet pour ouvrir une seconde phase de discussion­s, y compris cette fois la relation future entre Londres et l’UE, en particulie­r commercial­e, et la période de transition post-Brexit souhaitée par les Britanniqu­es.

Les 27 exigent pour cela des engagement­s préalables dans les trois dossiers qu’ils ont érigés en priorités absolues, parmi lesquels figure l’avenir de la frontière irlandaise, apparu ces dernières semaines comme le point de blocage majeur. Dublin, soutenu par les 27, demande des garanties explicites qu’il n’y aura pas de retour d’une frontière physique avec la province britanniqu­e d’Irlande du Nord, qui affaiblira­it ces deux économies imbriquées et fragiliser­ait l’accord de paix ayant mis fin en 1998 à 30 années d’un sanglant conflit intercommu­nautaire.

Theresa May les avait manifestem­ent données lundi après-midi selon plusieurs sources, mais la réaction offusquée du parti unioniste nord-irlandais DUP, allié du gouverneme­nt minoritair­e britanniqu­e, l’a visiblemen­t fait reculer.

« Nous n’accepteron­s aucune forme de divergence réglementa­ire qui séparerait l’Irlande du Nord économique­ment et politiquem­ent du reste du Royaume-Uni», a insisté dans un communiqué la chef du DUP, Arlene Foster, juste avant le constat d’échec des négociatio­ns à Bruxelles.

De son côté, le premier ministre irlandais, Leo Varadkar, s’est dit «surpris et déçu» que le gouverneme­nt britanniqu­e ait renoncé à «ce qui avait été conclu plus tôt aujourd’hui », établissan­t un lien direct avec les protestati­ons du DUP.

Même si un accord de principe avait été conclu lundi, il n’aurait pas marqué la fin immédiate de la première phase des négociatio­ns du Brexit. Les engagement­s de Mme May, s’ils sont finalisés ultérieure­ment et acceptés par l’équipe de négociatio­n européenne, devront être débattus au sein de la Commission, qui les évaluera à son tour avant de les soumettre aux diplomates des 27.

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