L’art à pleines pages
En marge de l’exposition qu’ils présentent ensemble, Collectif blanc et Arprim proposent deux journées de réflexion et de dialogue sur le processus créatif derrière le livre et l’imprimé
Elles ont tenu différents événements entre expo et foire d’art en hommage à l’imprimé et à la microédition hors des lieux traditionnels de diffusion. Les deux têtes chercheuses de Collectif blanc, la designer Marie Tourigny et l’éditrice Catherine Métayer, s’allient maintenant au centre d’artistes autogéré Arprim pour proposer ce week-end un événement de réflexion et de dialogue autour du livre, sous toutes ses formes.
Pourquoi les artistes, les petits éditeurs, les auteurs — et on en passe — créentils des publications expérimentales? Pourquoi ces patients créateurs impriment, relient, tronquent, alignent et assemblent des objets, précieux, soit, mais souvent introuvables et que peu de personnes consulteront?
C’est là quelques-unes des questions auxquelles tenteront de répondre les intervenants invités à Huitième de
page, les deux journées de dialogue qui se tiennent en marge de l’exposition Édition/Forme/Expérimentation.
Au programme de ces deux
jours, on promet happenings et lancements, mais aussi une table ronde, des échanges et des présentations d’artistes et d’éditeurs. Il faut toutefois bien se garder d’appeler la chose colloque ou conférence, avertissent les deux professionnelles derrière le projet.
«On voulait que ce soit quelque chose d’ouvert, explique Marie Tourigny. Nous, on se voit comme des actrices du milieu, des praticiennes, donc on ne voulait pas quelque chose d’universitaire ou de rigide. On veut que tous les gens qui s’intéressent à l’imprimé et au livre puissent venir. »
Au-delà du partage des connaissances, essentiel et rare, c’est une véritable célébration du processus artistique que proposent les deux femmes et leurs comparses. La publication et l’édition sont des domaines compartimentés, se désolentelles. «On souhaite parler de la démarche artistique, mais aussi de la difficulté de faire des livres. Ces choses-là sont rarement mises en commun. C’est rare que les designers vont prendre le temps de discuter de ces choses-là avec des imprimeurs, des éditeurs.»
Un vecteur
À l’ère du virage numérique, qu’est-ce qui rassemble autant d’intervenants autour de la publication expérimentale? «On va se le dire, explique Catherine Métayer. Les publications qui sont ici, les livres d’artiste, ce sont des objets faits avec passion et don de soi. Ces objets ne s’inscrivent pas dans une rentabilité économique. Tout le monde doit trouver sa voie créative à l’intérieur du processus, et nous, on trouve ça intéressant d’ouvrir ces discussions-là.»
«L’idée de la publication ou du livre, on voit à quel point ça peut devenir large, ajoute Emmanuelle Choquette, directrice générale d’Arprim. Ça devient un moyen, c’est beaucoup plus qu’un support.»
C’est difficile et contraignant de publier. Mais si tant de gens et d’artistes s’y mettent, c’est pour la liberté qu’offre l’imprimé, selon Collectif blanc. «Les gens ont autant, sinon plus qu’avant de choses à exprimer, avance Marie Tourigny. Mais je crois surtout qu’ils ont envie de donner une plus-value à ce qu’ils ont à dire. »
« Plusieurs jeunes créateurs qui font du zine ou de la publication DIY vont trouver plus de liberté là-dedans que sur le Web, complète Catherine Métayer. Le Web est très instantané. Les gabarits sont très stricts. Si tu veux être en contrôle de tes moyens de production, du moins artistique, l’imprimé est la voie à suivre. »
Adapter le contexte
L’exposition en cours depuis novembre a été adaptée à celle que les deux femmes ont présentée à la galerie de l’UQO l’an dernier. Après quelques événements remarqués, Collectif blanc intègre ainsi la galerie traditionnelle comme lieu de diffusion. Il semblait aller de soi de choisir Arprim, véritable repère des amateurs de papier de toutes formes.
Si le mariage entre les deux entités semble évident, les protagonistes ont voulu d’abord prendre leur temps. «C’était un peu essentiel que Collectif blanc se définisse d’abord en dehors de la galerie, avance Catherine Métayer. À l’UQO, c’est là qu’on a découvert qu’on pouvait conserver notre mandat de démocratisation dans la galerie, à l’intérieur du contexte de l’expo.»
Pour Arprim, il s’agit d’une union logique: «C’est une occasion d’établir une dynamique avec le public où les gens sont invités à manipuler, à prendre le temps de voir et de toucher l’expo. On remarque que les gens restent longtemps, et reviennent», dit Emmanuelle Choquette.
Ce que les organisatrices aimeraient avant tout, c’est que les gens en ressortent avec l’envie de manipuler, d’aimer, de s’imprégner des oeuvres imprimées qui ont fait l’objet de tant de passion et d’amour. «Un livre, c’est une énergie à saisir en soi. Le visage humain derrière le processus, c’est le projet artistique», conclut Emmanuelle Choquette.
L’événement est organisé en partenariat avec Artexte, bibliothèque et archive de l’art contemporain canadien. La journée de samedi s’y déroulera, mais il faut réserver pour cette date. L’activité est gratuite, avec des places limitées.
«C’est une occasion d’établir une dynamique avec le public où les gens sont invités à manipuler, à prendre reviennent.» le temps de voir et de toucher l’expo. On remarque que les visiteurs restent longtemps, et Emmanuelle Choquette, directrice générale d’Arprim