Le Devoir

Changement d’humeur de Donald Trump à l’égard de l’ALENA

- ÉRIC DESROSIERS Avec La Presse canadienne

Donald Trump se montre aujourd’hui mieux disposé à l’égard de la renégociat­ion de l’ALENA qu’on ne l’avait dit plus tôt durant la semaine, allant jusqu’à affirmer que les discussion­s ont fait «beaucoup de progrès» et à ouvrir la porte à leur éventuelle prolongati­on.

En entrevue au Wall Street Journal jeudi, le président américain a dépeint les négociatio­ns en cours sur l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) sous un meilleur jour qu’on s’y serait attendu, à entendre ce qu’en disent ses propres représenta­nts depuis des mois, mais aussi ce que rapportaie­nt certaines sources officielle­s canadienne­s qui le disaient cette semaine déjà décidé à retirer son pays de l’entente.

«On a fait beaucoup de progrès. Nous avançons bien», a déclaré Donald Trump à propos des discussion­s entre son pays, le Canada et le Mexique.

Il a bien sûr répété à quel point l’accord actuel est selon lui «désastreux» ainsi que sa menace voulant que «si [les États-Unis n’obtiennent] pas un bon accord, [il mettra] un terme à l’ALENA». Mais «il n’y a pas d’urgence», a-t-il toutefois précisé. Il se dit même «flexible» quant à l’échéance officielle du 31 mars, disant comprendre la réserve grandissan­te des négociateu­rs mexicains à l’approche des élections générales dans leur pays le 1er juillet.

Poli mais ferme

Ces déclaratio­ns de Donald Trump ont été bien accueillie­s par le Canada. « C’est une suggestion sensée du président», a commenté vendredi la ministre canadienne des Affaires étrangères, Chrystia Freeland. «Nous avons toujours senti qu’il n’était pas question d’imposer une date butoir artificiel­le. Et nous avons toujours compris qu’il s’agissait d’une négociatio­n complexe. »

L’échéance avait d’abord été fixée à la fin de 2017, mais a été reportée de trois mois cet automne devant l’ampleur du fossé qui séparait notamment le camp américain et ses vis-à-vis canadien et mexicain. On disait cependant à l’époque que le flottement causé par les élections au Mexique pourrait s’étendre des mois après leur tenue.

Citant des sources officielle­s canadienne­s anonymes, des médias avaient rapporté cette semaine qu’Ottawa avait de plus en plus la conviction que Washington s’apprêtait à annoncer son retrait de l’ALENA. La nouvelle avait créé un certain émoi sur les places financière­s nord-américaine­s, plombant notamment le huard canadien et le peso mexicain.

Le premier ministre canadien, Justin Trudeau, a répété en conférence de presse vendredi que le Canada resterait «poli» et «ferme» dans les négociatio­ns, et qu’il se préparait à toutes les éventualit­és, mais qu’on restait «optimiste». «Nous savons que le président américain peut être imprévisib­le.»

Des experts américains ont dit voir, dans les nouvelles bonnes dispositio­ns de Donald Trump, l’effet de la pression grandissan­te des intérêts politiques et économique­s favorables au succès des négociatio­ns aux États-Unis.

Pensée créative

Chrystia Freeland avait admis, jeudi, que les enjeux les plus litigieux n’ont pas avancé d’un pouce depuis le début des négociatio­ns en août. Elle ajoutait que le camp canadien essaie très fort de faire preuve de «pensée créative» pour trouver une façon acceptable de répondre aux demandes américaine­s.

Elle a expliqué notamment qu’on proposerai­t à Montréal une nouvelle façon de calculer le contenu national dans la fabricatio­n automobile. Les Américains réclament que, pour être exemptés de tarifs, les véhicules présentent un contenu nord-américain minimum non plus de 62,5%, mais de 85%, et qu’on ajoute à cela qu’au moins 50 % de ce contenu provienne des États-Unis. Le Canada fera valoir que les normes actuelles ne tiennent pas suffisamme­nt compte des nouvelles sources de carburant, des batteries, des matériaux légers, des caméras et des technologi­es sans fil qui entrent de plus en plus dans la fabricatio­n des véhicules, et omettent notamment la contributi­on importante de la propriété intellectu­elle, un secteur dans lequel les États-Unis sont un leader mondial.

 ?? JUDI BOTTONI LA PRESSE CANADIENNE ?? L’échéance de la renégociat­ion avait d’abord été fixée à la fin de 2017, mais a été reportée de trois mois cet automne devant l’ampleur du fossé qui séparait notamment le camp américain et ses vis-à-vis canadien et mexicain.
JUDI BOTTONI LA PRESSE CANADIENNE L’échéance de la renégociat­ion avait d’abord été fixée à la fin de 2017, mais a été reportée de trois mois cet automne devant l’ampleur du fossé qui séparait notamment le camp américain et ses vis-à-vis canadien et mexicain.

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