Le difficile décollage des obligations vertes
Derrière leurs records de 2017, les émissions mondiales d’obligations vertes n’ont pas encore atteint le rythme souhaité. On espère en être au point où la croissance sera exponentielle.
Le Climate Bonds Initiative (CBI) a déposé son bilan 2017. En valeur, les émissions d’obligations vertes ont atteint le record de 155,5 milliards $US l’an dernier. Il s’agit d’une hausse de 78% par rapport aux 87,2 milliards de 2016, et de 20 % sur la cible de 130 milliards estimée. La nouvelle cible pour 2018 se veut plus ambitieuse, passant grosso modo du simple au double, oscillant entre 250 et 300 milliards.
Le chef de la direction du CBI justifie cette progression attendue par la croyance que ce marché des obligations vertes est à l’aube d’une phase d’accélération, sous le coup d’un alignement international du marché. Il cite les choix environnementaux du projet chinois de la nouvelle route de la soie et l’adoption d’une ambitieuse politique d’énergies renouvelables en Inde couplée à une promesse de réforme réglementaire. S’ajoute l’accroissement des initiatives parmi les fournisseurs d’énergie et les émetteurs de GES, sous la pression des investisseurs institutionnels.
Le dirigeant n’est toutefois pas sans rappeler qu’il ne reste cependant que trois ans à l’atteinte de l’objectif de 1000 milliards $US au tournant de 2020. «Il faudra doubler, puis doubler et encore doubler», résume-t-il.
L’an dernier, les États-Unis (42,4 milliards $US) la Chine (22,5 milliards) puis la France (22,1 milliards) ont été les trois principaux pays émetteurs d’obligations vertes, comptant pour 56% du total. Et le bilan a été influencé par l’émission de 25 milliards de l’assureur hypothécaire américain Fannie Mae en appui à son programme d’actif adossé à des «hypothèques vertes».
Dans le classement, le Canada arrive au 10e rang avec 3,5 milliards $US émis, les trois principaux émetteurs étant la Banque TD, Exportation et Développement Canada et la province de l’Ontario. Le Québec a créé son programme et réalisé sa première émission cette année, de 500 millions $CAN, en appui à des besoins de financement de la Société de transport de Montréal. La demande a été plus de deux fois supérieure à l’offre, avait souligné le ministère des Finances.
Mais au total, CBI a dénombré plus de 1500 émissions d’obligations vertes l’an dernier réparties entre 239 émetteurs provenant de 37 pays.
Sur le marché des titres à revenu fixe, le programme international de normes et de certification des obligations vertes évolue sous la Climate Bonds Initiative, qui semble s’imposer comme celle qui dicte la norme de convergence. L’organisation se réjouit, d’ailleurs, d’une tendance accrue à une normalisation internationale avec une reconnaissance ressentie venant de la Chine, trois de ses plus grandes banques d’État ayant retenu les critères d’émission et de certification internationaux. Au total l’an dernier, seulement 10 milliards $US d’obligations dites vertes ont été exclues du bilan parce que ne répondant pas ou ne s’alignant pas avec la définition du CBI.
L’industrie démontre également qu’elle s’éloigne toujours plus de cette crise de confiance relative au « greenwashing », à un label trop longtemps récupéré à des fins de marketing. « L’avenir est aux indicateurs de performance et à la reddition de comptes sur les répercussions et les externalités, ainsi qu’à une vérification indépendante chez les émetteurs et les mandataires de l’investisseur des effets concrets générés», a-t-on déjà écrit. Toujours selon le bilan de CBI, les émissions de 2017 ont essentiellement servi à financer des projets d’énergie propre, d’«immeubles verts» et de transport par rail et par métro urbain.
En détail, le tiers des 155,5 milliards a été canalisé vers les énergies renouvelables. Suivent les projets à faible teneur en carbone (29%), le transport «écologique» (15%) et la gestion de l’eau « durable ».
L’organisation se réjouit d’une tendance accrue à une normalisation internationale