Le drapeau de Carillon classé objet patrimonial
Cet étendard issu du Régime français a d’abord été défendu et érigé en symbole patriotique dans un poème d’Octave Crémazie
La bannière de Carillon, qui est à l’origine du drapeau du Québec adopté en 1948, a été classée en tant qu’objet patrimonial en vertu de la Loi sur le patrimoine culturel. La ministre de la Culture et des Communications, Marie Montpetit, l’a fait savoir dimanche à l’occasion de la célébration du jour du Drapeau.
Ce drapeau est en fait une reproduction inspirée librement d’un étendard religieux présent lors de la bataille de Fort Carillon qui, en juillet 1758, opposa les soldats français aux forces britanniques à Ticonderoga, aujourd’hui situé dans l’État de New York.
Au milieu du XIXe siècle, l’intérêt pour cet étendard est vigoureusement ravivé par un poème d’Octave Crémazie, intitulé Le drapeau de Carillon. Crémazie plaide pour la prise de conscience d’une destinée française en Amérique et pour la défense et l’affirmation des droits de celle-ci. L’intérêt pour le drapeau de Carillon est décuplé par le succès de ce poème populaire. Crémazie va dès lors être considéré comme le poète national. Le monument de bronze que vont lui élever les citoyens par souscription publique au carré Saint-Louis à Montréal évoque d’ailleurs cette adéquation entre le drapeau de Carillon et le poète. Sur une plaque, on lit: «Pour mon drapeau je viens ici mourir. »
Ministre de la Culture et des Communications depuis octobre 2017, Marie Montpetit avait écrit publiquement en février de la même année pour qu’on rebaptise le comté de Crémazie, qu’elle représente à l’Assemblée nationale, du nom de Maurice Richard. Le 2 mars 2017, le Directeur général des élections du Québec acceptait sa proposition et effaçait du paysage électoral québécois le nom de Crémazie, premier défenseur du drapeau qui est désormais classé en tant qu’objet patrimonial de grande valeur.
En 1902, l’abbé Elphège Filiatrault, curé de la paroisse de Saint-Jude en Montérégie, est pétri comme bien d’autres par cette conscience renouvelée de sa nationalité amorcée par la poussée de Crémazie. L’abbé Filiatrault fait fabriquer un étendard dit de Carillon afin de promouvoir l’adoption d’un tel symbole national. L’Église avait alors rejeté l’usage du drapeau républicain tricolore des patriotes de 1837-1838. Le 26 septembre 1902, l’étendard commandé par l’abbé Filiatrault est hissé au mât de son presbytère. Ce drapeau a été retrouvé en 1955, soit quelques années à peine après que le gouvernement de Maurice Duplessis eut fait adopter un drapeau fleurdelisé qui en est inspiré.
Le drapeau est maintenant conservé au Centre d’histoire de Saint-Hyacinthe. Il s’agit d’une pièce de coton imprimée artisanalement. Une croix blanche y est disposée sur un champ azur. Quatre fleurs de lys sont placées près des coins du drapeau et pointent vers le centre.