La Banque centrale européenne riposte à Washington
Mercredi, le secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, avait plaidé en faveur d’un dollar faible
Le président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, a fustigé jeudi les déclarations du gouvernement américain en faveur du dollar faible sans empêcher l’euro de s’envoler ni les Bourses européennes de plonger.
Dans une allusion transparente au secrétaire américain au Trésor, Steven Mnuchin, auteur mercredi d’un plaidoyer pour le dollar faible, M. Draghi a fustigé «la communication» de cette «autre personne» qui «ne se conforme pas aux termes convenus» depuis «des décennies» en matière de changes. Lors du Forum économique de Davos, M. Mnuchin a affirmé qu’un «dollar plus faible» était «bon» pour les États-Unis puisqu’il favorise «le commerce et les opportunités», rompant avec des décennies de discours américain en
sens inverse et faisant plonger le billet vert. En réponse, Mario Draghi a rappelé les engagements multilatéraux à ne pas manipuler les changes, citant les termes d’un accord d’octobre dernier au sein du Fonds monétaire international.
L’institution de Francfort a maintenu son principal taux de refinancement à zéro et confirmé la poursuite de son vaste programme de rachat de dettes publique et privée au rythme de 30 milliards d’euros par mois, et ce, jusqu’à septembre 2018, voire «au-delà si nécessaire». Surtout, M. Draghi a maintenu le flou sur le calendrier des prochains tours de vis monétaire, soit la sortie du QE suivie «bien après» d’un premier relèvement des taux, renvoyant implicitement cette question à la prochaine réunion du 8 mars.
Il a une nouvelle fois brossé un tableau complexe en zone euro, fait de croissance soutenue mais d’inflation encore trop éloignée de l’objectif de la BCE, soit un peu moins de 2% sur le moyen terme. «Pouvons-nous proclamer la victoire? La réponse est non, pas encore», a martelé M. Draghi. Il a par ailleurs annoncé que la BCE allait «surveiller» la «volatilité récente du taux de change», qui constitue à ses yeux «une source d’incertitudes» susceptible de freiner l’évolution déjà trop faible des prix. L’institution de Francfort s’interdit en effet de commenter directement le niveau de l’euro, qui ne figure pas dans son mandat, mais peut en revanche souligner le lien entre les changes et l’inflation, facteur décisif pour elle.