LacMégantic
La MMA, ses dirigeants et des employés règlent leurs comptes avec Ottawa
Des amendes de 1,25 million
La compagnie Montréal Maine & Atlantic (MMA) Canada devra payer l’amende maximale d’un million de dollars prévue par la loi pour avoir déversé illégalement des substances nocives dans le lac Mégantic et la rivière Chaudière. Cinq des sept employés de la MMA Canada recevront aussi des amendes totalisant 250 000$, tandis que le conducteur de la locomotive, Thomas Harding, a été condamné à six mois de prison avec sursis.
Plus de quatre ans après la tragédie ferroviaire de Lac-Mégantic, qui a fait 47 morts le 6 juillet 2013, les réponses à l’accusation enregistrées à la Cour du Québec scellent l’ensemble des accusations qui planaient sur la compagnie ferroviaire, ses dirigeants et certains de ses employés en vertu de lois fédérales.
Après l’acquittement, à la mi-janvier de trois de ses employés qui étaient accusés de négligence criminelle, la MMA et sept dirigeants et employés faisaient toujours face à des sanctions découlant cette fois de la Loi sur la pêche (LSP) et de la Loi sur la sécurité ferroviaire (LSF).
MMA Canada a ainsi été condamnée à verser une amende de 1 million de dollars pour avoir «rejeté ou permis l’immersion ou le rejet d’une substance nocive, à savoir du pétrole brut dans des eaux où vivent des poissons, soit le lac Mégantic et (ou) la rivière Chaudière », accusation à laquelle l’entreprise a plaidé coupable. Les autres accusés ont pour leur part été acquittés des mêmes accusations.
À l’exception du contrôleur de la circulation ferroviaire, Richard Labrie, ils ont par contre tous été reconnus coupables d’avoir enfreint la Loi sur la sécurité ferroviaire, en l’occurrence «d’avoir omis, après avoir serré les freins à main, de vérifier la résistance au déplacement pour s’assurer que les freins serrés produisent un effort de serrage suffisant pour immobiliser le matériel en question».
Les dirigeants et cadres de la division canadienne de la MMA, notamment le directeur général, Robert Grindrod, et les directeurs et directeur adjoint Lynne Labonté, Kenneth I. Strout, Mike Horan et Jean Demaître ont reçu des amendes de 50 000$ chacun. Le conducteur du train qui transportait 72 wagons de pétrole brut, Thomas Harding, a quant à lui été condamné à une peine de six mois de prison à purger dans la communauté. M. Harding devra en outre respecter des conditions strictes.
Une partie des amendes payables au gouvernement canadien, soit 250 000 $, sera versée au Fonds Avenir Lac-Mégantic pour permettre la reconstruction et la revitalisation du centre-ville rasé par les flammes et l’explosion du train. L’amende d’un million imposée à la MMA ira à un fonds du ministère fédéral de l’Environnement, destiné à la décontamination du lac Mégantic et de la rivière Chaudière.
«À titre exceptionnel, nous nous sommes donc assurés que les sommes récoltées des amendes sont remises au fonds communautaire géré localement, Fonds Avenir Mégantic, au bénéfice des Méganticois plutôt qu’au gouvernement du Canada», a déclaré le ministre fédéral des Transports, Marc Garneau.
Ce dernier avait aussi annoncé, fin janvier, qu’Ottawa contribuerait à la construction d’une voie de contournement du chemin de fer à LacMégantic, un projet évalué à 130 millions, réclamé à grands cris par les citoyens de cette municipalité encore traversée par deux ou trois convois ferroviaires chaque jour.
Regarder en avant
La mairesse de Lac-Mégantic, Julie Morin, s’est dite heureuse que la justice «suive son cours», même si elle estime qu’il y a eu «beaucoup plus de dommages » que les 250 000 $ perçus par Transport Canada, qui atterriront dans les coffres de la Ville.
Cet argent servira à accorder des crédits de taxes et des avantages aux commerçants qui participeront à la revitalisation du centre-ville, a dit la mairesse. Quant à l’amende d’un million de dollars imposée à la MMA, elle sera gérée par le ministère de l’Environnement, a-t-elle précisé.
« Les Méganticois peuvent regarder en avant. Nous avons beaucoup de pain sur la planche», a-t-elle dit.
Les dirigeants américains de la MMA, absents lors de l’audition lundi, ont déclaré «accepter» la pénalité. Richard Labrie, contrôleur de la circulation ferroviaire, s’est montré soulagé d’avoir été blanchi. «Il me reste à payer mes avocats, je vais continuer de vivre ma vie […] », a-t-il dit, heureux de voir ce marathon judiciaire prendre fin.
Cette entente sur les plaidoyers, conclue en décembre entre les accusés et le gouvernement fédéral, visait à éviter la tenue d’un nouveau procès criminel. Selon les procureurs de la Couronne, interrogés lundi au Palais de justice de Lac-Mégantic, les peines réclamées pour l’ensemble des coaccusés visaient à prouver l’existence «d’une culture de la négligence », à tous les échelons de la compagnie.
La suite
En janvier dernier, trois employés de la MMA, soit Thomas Harding, Jean Demaître et Richard Labrie, ont été blanchis par le jury de toutes accusations de négligence criminelle.
Par ailleurs, une dernière étape judiciaire reste à franchir dans le dossier de la tragédie de Lac-Mégantic. L’audition du recours collectif intenté contre la compagnie de chemin de fer Canadien Pacifique (CP) devrait avoir lieu à l’automne 2019. L’entreprise n’avait pas participé aux indemnisations de plus de 430 millions versées aux victimes après le drame, à la suite d’un règlement élaboré dans le cadre des procédures d’insolvabilité de la MMA et de 25 entreprises, en vertu de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies.
250 000$ iront dans les coffres de la municipalité pour l’aider à redonner vie à son centre-ville