Le Devoir

Le nouveau patron de la Fed promet d’«expliquer» ce qu’il fait

L’ère Jerome Powell risque d’être d’une tout autre nature que celle de sa prédécesse­ure

- Avec Associated Press

Washington — Jerome Powell, le nouveau président de la Réserve fédérale (Fed) choisi par Donald Trump, a pris officielle­ment les rênes de la banque centrale lundi en promettant «d’expliquer» ce qu’il fait et de respecter la tradition d’indépendan­ce de l’institutio­n monétaire.

« Je suis humblement honoré par cette occasion de servir le peuple américain. Alors que j’entame mon mandat, je tiens à souligner mon engagement à expliquer ce que nous faisons et pourquoi nous le faisons», a déclaré M. Powell, peu après sa prestation de serment à Washington, a indiqué la Fed.

Républicai­n modéré, juriste de formation et ex-banquier d’affaires qui était membre du directoire de la Fed depuis cinq ans, M. Powell, qui a eu 65 ans dimanche, succède à la démocrate Janet Yellen, la première femme à avoir dirigé l’institutio­n. Celle-ci, qui a reconnu vendredi qu’elle avait été déçue de ne pas avoir été reconduite pour un deuxième mandat de quatre ans, ce qui est usuellemen­t le cas, n’était pas présente à la prestation de serment, selon un photograph­e de l’AFP.

M. Powell, qui devient le 16e président de la Fed, a insisté dans une courte allocution sur «la tradition non partisane» de la banque centrale pour « prendre des décisions objectives basées sur les meilleurs faits disponible­s». Alors que la Bourse a trébuché vendredi, accusant sa pire chute depuis juin 2016, M. Powell a rappelé que l’institutio­n monétaire « joue un rôle clé afin d’assurer la stabilité du système financier ».

Il a dépeint un tableau optimiste de l’économie: «Le taux de chômage est bas, l’économie progresse et l’inflation est basse. À travers nos décisions monétaires, nous soutiendro­ns la poursuite de la croissance, un marché de l’emploi sain et la stabilité des prix.» M. Powell souligne également qu’il «restera vigilant et prêt à répondre aux risques».

Il présidera sa première réunion de politique monétaire les 20 et 21 mars, au cours de laquelle de nombreux acteurs financiers s’attendent à la première hausse des taux d’intérêt de l’année.

Turbulence­s

Le volume intense de ventes sur Wall Street vendredi — avec des actions en chute et des bonds du rendement des obligation­s dans la foulée du rapport sur l’emploi en janvier laissant croire à une montée prochaine de l’inflation — a servi de vif rappel des défis auxquels fera face la Fed sous la gouverne de M. Powell.

Lors de son audience de confirmati­on au Sénat, M. Powell avait mis l’accent sur sa volonté de poursuivre l’approche prudente de sa prédécesse­ure, Janet Yellen, à l’égard des hausses de taux d’intérêt. Mme Yellen a été en mesure de diriger une politique graduelle sur les taux étant donné que l’inflation présentait peu de risques: la croissance de l’Indice des prix à la consommati­on a été inférieure même à la cible de 2% de la Fed durant son mandat de quatre ans.

L’ère Powell pourrait être d’une tout autre nature. Le marché de l’emploi s’est resserré. Les salaires ont augmenté. La dette fédérale augmentera probableme­nt. Les réductions d’impôt pourraient accélérer la croissance. Tous ces éléments peuvent potentiell­ement faire grimper l’inflation, et cette perspectiv­e a alarmé les investisse­urs vendredi. La question principale est de savoir de quelle ampleur sera la montée de l’inflation.

Rendements plus élevés

Pendant des semaines, les investisse­urs ont réclamé des rendements plus élevés des obligation­s. Vendredi, après que le gouverneme­nt eut indiqué que le salaire moyen en janvier avait augmenté d’une année à l’autre au rythme le plus rapide en plus de huit ans, le rendement des bons du Trésor sur dix ans a atteint 2,84 %, un sommet jamais vu en quatre ans.

La Fed dirigée par M. Powell serait heureuse de voir l’inflation atteindre finalement la cible de 2 %. Le danger serait que l’inflation grimpe bien au-delà de ce niveau. La Réser ve fédérale américaine ferait alors face à une pression intense pour accélérer ses hausses de taux d’intérêt afin de resserrer le crédit et freiner l’inflation.

Là réside le risque. Si la Fed resserre le crédit de façon trop prudente, l’inflation pourrait s’envoler et échapper à tout contrôle. Si elle resserre trop la vis, cela pourrait entraîner une récession. Trouver un juste équilibre s’est révélé difficile pour la Fed dans son histoire. La banque centrale a parfois mal évalué la vitesse idéale pour l’augmentati­on des taux et a contribué au ralentisse­ment économique.

En décembre, la Fed avait prévu trois hausses du taux directeur en 2018, tout comme en 2017. Certains économiste­s disaient même entrevoir quatre augmentati­ons des taux au cours de l’année.

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SAUL LOEB AGENCE FRANCE-PRESSE Jerome Powell a pris officielle­ment les rênes de la Réserve fédérale américaine lundi en promettant notamment de respecter la tradition d’indépendan­ce de l’institutio­n monétaire.

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