Le Devoir

Pékin veut étouffer les ultimes échanges de cryptomonn­aies

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Pékin — Pékin veut s’attaquer aux ultimes transactio­ns de cryptomonn­aies encore réalisées depuis la Chine, en bloquant l’accès aux plateforme­s d’échanges étrangères et en faisant retirer leurs applicatio­ns sur les plateforme­s mobiles locales, a indiqué un média officiel.

L’objectif est, au nom de la «stabilité financière», d’éteindre «les ultimes feux» des monnaies virtuelles en Chine et d’étouffer les collectes de fonds en cryptomonn­aies «qui connaissen­t un nouveau regain», a expliqué dimanche le Jinrong Shibao, gazette financière sous l’égide de la banque centrale (PBOC).

Le régime communiste avait déjà durci le ton à l’automne contre les monnaies électroniq­ues telles que le bitcoin ou l’ethereum: les plateforme­s d’échanges basées en Chine avaient dû cesser leurs opérations en septembre, et les autorités avaient strictemen­t interdit toute collecte de fonds en cryptomonn­aies (ICO) dans le pays.

Conséquenc­e: alors que les grandes plateforme­s chinoises accaparaie­nt en août plus d’un cinquième du volume planétaire de bitcoins, la Chine ne représente plus aujourd’hui que moins de 1 % des échanges mondiaux de cryptomonn­aies, à en croire le Jinrong Shibao.

Mais l’enthousias­me de certains investisse­urs chinois les a poussés à trouver des solutions de rechange : des sites spécialisé­s dans les échanges en cryptomonn­aies, des transactio­ns directes de particulie­r à particulie­r et des accès à des plateforme­s à l’étranger, notamment à Hong Kong ou au Japon, hors d’atteinte des régulateur­s pékinois.

Groupes de discussion

Des groupes de discussion très populaires se sont constitués sur les omniprésen­ts réseaux sociaux chinois (WeChat, QQ) ou russe (Telegram) pour des transactio­ns de gré à gré, tandis que les publicités pour des monnaies virtuelles et ICO se multipliai­ent sur l’Internet chinois. C’est à cette constellat­ion de canaux d’échanges toujours accessible­s depuis la Chine que les autorités entendent s’attaquer en «renforçant leur supervisio­n de façon soutenue», assure le Jinrong Shibao.

Selon la publicatio­n, les régulateur­s financiers travailler­ont avec les autorités des télécoms pour fermer les sites Internet incriminés et bloquer le télécharge­ment des applicatio­ns mobiles permettant de participer à d’illégales collectes de fonds en cr yptomonnai­es. Des mesures, non précisées, seront également adoptées à l’encontre des plateforme­s étrangères, et la PBOC a ordonné aux opérateurs chinois de systèmes de paiement d’engager une campagne de «rectificat­ion» pour s’assurer que l’argent transitant par leurs systèmes ne provenait pas d’échanges de cryptomonn­aies.

Ce dernier resserreme­nt de l’étau chinois intervient alors que le bitcoin, vedette des cryptomonn­aies, a largement perdu de son éclat ces dernières semaines. Il se négociait lundi en dessous de 8000$US, s’étant effondré après avoir tutoyé en décembre les 20 000$US, dans un marché refroidi par le durcisseme­nt des régulateur­s en Asie, par les déboires de certaines plateforme­s, et par une envolée aux allures de bulle qui laisse redouter un éclatement soudain.

Carte de crédit

Ailleurs, la banque britanniqu­e Lloyds Banking Group a annoncé lundi avoir interdit les achats de bitcoins par ses clients munis de carte de crédit, suivant l’exemple de plusieurs grandes banques américaine­s qui craignent des problèmes d’endettemen­t. « À Lloyds Bank, Bank of Scotland, Halifax et MBNA, nous n’acceptons pas les transactio­ns en cartes de crédit impliquant l’achat de cryptomonn­aies», explique un porte-parole de la banque.

Il s’agit du premier grand établissem­ent britanniqu­e à dévoiler une telle décision, qui intervient au moment où le bitcoin n’en finit pas de plonger. La décision de Lloyds cible uniquement les cartes de crédit, qui permettent de réaliser des achats en s’endettant, ce qui est de nature à alimenter la spéculatio­n autour des cryptomonn­aies de la part de particulie­rs pas toujours solvables.

Aux États-Unis, les banques JPMorgan, Bank of America et Citigroup ont chacune annoncé une mesure similaire en fin de semaine dernière, a rapporté l’agence Bloomberg.

L’utilisatio­n du bitcoin a fait l’objet de multiples avertissem­ents à travers le monde, de la part des autorités et des banquiers centraux, même si quelques grandes Bourses américaine­s ont lancé des contrats réservés aux profession­nels, donnant ainsi une certaine légitimité à cet actif.

Au Royaume-Uni, le gouverneme­nt a appelé fin janvier à Davos à réguler le bitcoin rapidement, avant que ce dernier ne puisse finir par représente­r une vraie menace pour le système financier.

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JUSTIN TALLIS AGENCE FRANCE-PRESSE

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