Pas de fin en vue
Ainsi, la réforme du système de santé est terminée. C’est le ministre Gaétan Barrette qui le dit. Il ne resterait que des ajustements à lui apporter, du «peaufinement», a-t-il affirmé. Qu’il nous soit permis d’en douter. En fait, nous ne sommes pas sortis du bois: c’est toute l’opération qu’il faudra revoir. Après avoir consenti des milliards de dollars de plus aux médecins — et ce n’est pas fini —, assortis, il faut le dire, de mesures coercitives, Gaétan Barrette peut montrer certaines améliorations. Bien qu’il ait raté sa cible, l’accès aux médecins de famille est meilleur. Est-ce que la population y voit une amélioration spectaculaire ? Si tel était le cas, on le saurait.
Quant à l’attente pour une chirurgie, là encore, les objectifs ne sont pas atteints. Selon les dernières données disponibles, 14% des patients en attente d’une chirurgie élective l’étaient pour une période de plus de six mois, alors que l’objectif fixé était d’abaisser ce pourcentage à 10%. En décembre, on estimait à 2200 le nombre de patients qui attendaient une chirurgie depuis plus d’un an alors que le ministre s’était déjà engagé à mettre fin à ce dysfonctionnement. Pour faire bonne mesure, il faut toutefois mentionner que 5000 patients se retrouvaient dans cette situation en 2016.
Pour ce qui est des urgences, rien de neuf sous le soleil : elles débordent. Il y a encore des patients qui y poireautent plus de 24 heures avant d’être soignés. Le déploiement partiel des supercliniques n’a pas eu d’effet significatif.
Il est surprenant d’entendre Gaétan Barrette dire de sa réforme qu’elle est terminée alors qu’un de ses éléments parmi les plus importants à ses yeux n’a pas été mis en oeuvre, c’est-à-dire le financement des hôpitaux à l’activité plutôt qu’en fonction de critères historiques.
Achevée ou non, la réforme Barrette repose sur des bases discutables. Elle est médicalo-centriste et le cri du coeur des infirmières nous rappelle que c’est l’ensemble des professionnels de la santé, et non pas seulement la caste déifiée des médecins, qui assure l’efficacité du réseau de la santé. Elle a négligé la prévention et les soins à domicile. Elle a poussé à l’extrême la centralisation et accru à un niveau inégalé le pouvoir du ministre qui, lui, a muselé les voix objectives en mesure de le critiquer.
L’objectif ultime, c’est d’améliorer la santé de la population et, pourquoi pas, d’accroître la satisfaction des usagers. En cela, la réforme du ministre Barrette, dont les résultats sont modestes, devra être reprise de fond en comble par son successeur.