Le Devoir

Autour de Trump, les protection­nistes l’emportent sur Gary Cohn

Le principal conseiller économique du président américain a démissionn­é mardi

- DELPHINE TOUITOU à Washington

Les conseiller­s en matière de commerce de Donald Trump ont tous soutenu sa position sur les taxes envisagées sur les importatio­ns d’acier et d’aluminium, à l’exception de Gary Cohn, qui a fini par remettre sa démission mardi.

Voici les principaux acteurs missionnés par la Maison-Blanche avec pour mot d’ordre « America First ».

Gary Cohn

Appelé par Donald Trump dès son arrivée à la Maison- Blanche pour diriger l’influent Conseil économique national, Gar y Cohn, 57 ans, a finalement remis sa démission mardi alors que le président américain confirmait ses menaces de taxer les importatio­ns d’acier et d’aluminium.

Il était apparu minoritair­e ces derniers jours dans le débat sur les mesures à prendre en matière de commerce internatio­nal. En public, il défendait « le commerce libre, équitable et réciproque ». « Nous aimerions que la Commission européenne mette fin à ses droits de douane sur de nombreux produits que nous aimerions exporter des États-Unis », avait-il même déclaré à la presse lors du Forum économique mondial de Davos en Suisse en janvier.

Pour autant, depuis des mois, M. Cohn s’efforçait, aux côtés du ministre de la Défense Jim Mattis et de l’ancien conseiller Rob Porter (qui a récemment démissionn­é), de tempérer la politique commercial­e. Devant les élans protection­nistes de Donald Trump, qui a annoncé la semaine dernière son intention d’imposer des taxes de 25 % sur les importatio­ns d’acier et de 10 % sur celles d’aluminium, il avait déjà menacé de démissionn­er la semaine dernière estimant que ces mesures étaient dangereuse­s pour l’économie, a rapporté le New York Times.

Ce n’est pas la première fois que Gary Cohn était en désaccord avec le président.

Un temps pressenti pour devenir président de la puissante Banque centrale américaine, M. Cohn avait finalement été écarté pour avoir ouvertemen­t critiqué le président Trump pour son attitude jugée trop bienveilla­nte vis-à-vis des suprémacis­tes blancs lors des manifestat­ions racistes à Charlottes­ville (Virginie) en août dernier.

Les rumeurs de départ de cet ancien numéro 2 de la banque Goldman Sachs s’étaient finalement estompées, celui-ci ayant mené à bien sa mission d’élaborer la grande réforme des impôts voulue par le président et adoptée fin décembre. Vendredi, c’est la porte-parole du président, Sarah Sanders, qui a été contrainte de démentir — sans tout à fait convaincre — les spéculatio­ns sur son éventuel départ.

Wilbur Ross

À 80 ans, le ministre du Commerce Wilbur Ross est l’artisan des propositio­ns radicales sou- mises à Donald Trump pour limiter les importatio­ns d’acier et d’aluminium. Dans ses rapports remis en janvier, il concluait que l’imposition de taxes dans ces secteurs stratégiqu­es était impérative en invoquant l’enjeu de sécurité nationale.

Cet homme d’affaires, qui a bâti sa fortune en redressant des entreprise­s en difficulté­s en particulie­r du secteur sidérurgiq­ue, avait clairement dit à son arrivée au gouverneme­nt que sa priorité serait de réduire le gigantesqu­e déficit commercial américain qui s’est élevé à 566 milliards en 2017, et même à 810 milliards sans l’excédent dans le secteur des services.

Wilbur Ross estime que ces taxes auront peu d’impact sur les consommate­urs américains malgré l’avalanche de critiques et de mises en garde sur les possibles conséquenc­es négatives aux États-Unis du déclenchem­ent d’une guerre commercial­e, y compris au sein même des républicai­ns. Paul Ryan, président de la Chambre américaine des représenta­nts, a exprimé sa « grande inquiétude des conséquenc­es d’une guerre commercial­e », exhortant la Maison-Blanche « à ne pas mettre son plan à exécution ».

Peter Navarro

À 68 ans, Peter Navarro est l’actuel conseiller pour le commerce de Donald Trump. Cet économiste est l’auteur de dizaines de livres, dont Death by China: How America Lost Its Manufactur­ing

Base. Il y critique la guerre économique menée par Pékin et ses ambitions de dominer l’Asie.

Depuis sa prise de fonction, il s’en est pris aussi à l’Allemagne, accusée d’user d’un euro « largement sous-évalué » pour « exploiter » ses principaux partenaire­s commerciau­x, dont les États-Unis.

Sans surprise, il penche pour des droits de douane imposés à tous les pays importateu­rs sans distinctio­n.

Robert Lighthizer

Le représenta­nt spécial pour le Commerce, Robert Lighthizer, 70 ans, est membre à ce titre du « cabinet » ( gouverneme­nt) réuni autour du président américain. Il renégocie actuelleme­nt l’accord de libre-échange nord-américain (ALENA) avec le Canada et le Mexique, que Trump veut voir modifié au bénéfice des entreprise­s et travailleu­rs américains.

Lundi, le président américain a fait savoir qu’il transigera­it peut-être sur les mesures sur l’acier et l’aluminium avec le Canada, principal fournisseu­r d’acier des États- Unis, et le Mexique si un accord « juste » était trouvé pour l’ALENA.

Outre la négociatio­n des accords commerciau­x, Robert Lighthizer représente les ÉtatsUnis au sein de l’Organisati­on mondiale du commerce et a la difficile tâche de concilier les volontés protection­nistes de Trump avec celles souvent plus libérales de sa majorité républicai­ne au Congrès.

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SAUL LOEB AGENCE FRANCE- PRESSE Gary Cohn défendait « le commerce libre, équitable et réciproque ».

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