Le Devoir

Vers une coalition démocrates­M5S?

Renzi est critiqué pour son refus de discuter avec le Mouvement 5 étoiles

- FANNY CARRIER à Rome

Des

ténors du Parti démocrate italien dénonçaien­t mardi l’attitude intransige­ante de leur chef, Matteo Renzi, démissionn­aire mais qui entend bloquer toute discussion avec le Mouvement 5 étoiles, l’un des grands vainqueurs d’un scrutin qui a plongé le pays dans l’incertitud­e.

Aucune majorité n’est sortie des urnes dimanche et la lutte est engagée entre la coalition de droite, qui a remporté 37 % des voix mais est désormais dominée par l’extrême droite, et le M5S (antisystèm­e), devenu le premier parti du pays avec 32,7 % des voix.

Rompant avec le dogme fondateur du M5S, qui refusait tout accord avec la vieille « caste » politique, son chef Luigi Di Maio s’est dit lundi prêt à discuter « avec toutes les forces politiques » sur les thèmes de son programme : pauvreté et gaspillage, immigratio­n et sécurité, emploi et développem­ent.

Pour le M5S, la démarche la plus logique serait de se tourner vers le Parti démocrate (PD, centre gauche). Une telle tentative avait échoué en 2013, mais le M5S s’est depuis assagi et le rapport de force est inversé après le revers essuyé par le PD après cinq ans de pouvoir (18,7%).

Cependant, Matteo Renzi est « un obstacle à cette convergenc­e », a expliqué le politologu­e Giovanni Orsina. Le M5S est braqué contre la personnali­té jugée arrogante du chef du PD, qu’il associe souvent à Silvio Berlusconi avec le sobriquet de « Renzusconi ».

Certes, M. Renzi a annoncé lundi qu’il quittait la direction de son parti, mais il a précisé que son successeur ne serait élu qu’après la désignatio­n du gouverneme­nt. Et il s’est porté « garant » de ce que le PD ne devienne pas « la béquille d’un gouverneme­nt antisystèm­e ».

« Le M5S et les droites nous ont insultés pendant des années et sont à l’opposé de nos valeurs. Ils sont antieuropé­ens, antipoliti­ques, ils ont utilisé un langage de haine. Ils nous ont dit que nous étions corrompus, mafieux, complices et que nous avions les mains pleines de sang à cause de l’immigratio­n. Je ne pense pas qu’ils aient changé à l’improviste. Qu’ils fassent un gouverneme­nt s’ils y parviennen­t, nous restons hors de cela », a-t-il insisté mardi sur Facebook.

Mais sa position est loin de faire l’unanimité au sein du PD.

« Nous sommes tout autant que Renzi contre les tractation­s d’arrière-salle, mais aussi contre les bunkers », a réagi Andrea Orlando, ministre de la Justice, qui avait obtenu 19 % contre M. Renzi aux primaires du parti en avril 2017.

« Renzi risque de provoquer une catastroph­e démocratiq­ue pour l’Italie et de faire exploser le PD », a lancé Michele Emiliano, gouverneur des Pouilles, plus clairement marqué à gauche. Le M5S « a gagné le droit de gouverner » et le PD « doit le soutenir, en exerçant la fonction de contrôle du programme. Sinon, ils s’associeron­t avec les droites ».

Une alliance « euroscepti­que » entre le M5S et la Ligue de Matteo Salvini (extrême droite), qui avec 17,3 % est devenue la première force de l’alliance de droite, n’est cependant pas à l’ordre du jour, selon les intéressés.

Le premier test sera l’élection des nouveaux présidents des deux chambres, en principe le 23 mars. Ensuite seulement le président Sergio Mattarella entamera ses consultati­ons.

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