Le Devoir

La STM justifie la facture

Le prolongeme­nt du métro coûtera quatre fois plus cher qu’à Laval

- JEANNE CORRIVEAU

Si la facture du prolongeme­nt de la ligne bleue s’annonce beaucoup plus élevée que celle du métro à Laval, c’est parce qu’il s’agit d’un projet de plus grande envergure et que la méthodolog­ie pour évaluer les coûts est différente, a fait valoir la Société de transport de Montréal (STM) lundi.

L’annonce du prolongeme­nt de la ligne bleue faite par les premiers ministres Philippe Couillard et Justin Trudeau le 9 avril dernier avait fait sourciller plusieurs observateu­rs. Le coût pour la constructi­on en tunnel des cinq stations, sur un segment de 5,8 kilomètres, a été estimé à 3,9 milliards de dollars.

Avec ses trois stations sur 5,2 kilomètres, le prolongeme­nt de la ligne orange à Laval, en 2007, a pourtant coûté 751 millions, soit quatre fois moins cher par kilomètre. À titre de comparaiso­n, un kilomètre coûtera 672 millions pour la ligne bleue, contre 144 millions pour le métro à Laval il y a plus de 10 ans.

Des différence­s

Lors d’un breffage technique lundi, la STM a voulu justifier cet écart de coûts, réfutant les affirmatio­ns selon lesquelles ce tronçon de la ligne bleue figurerait parmi les projets de métro les plus chers du monde. Directeur général de l’ingénierie, des infrastruc­tures et des projets majeurs à la STM, François Chamberlan­d soutient qu’en raison de l’inflation, il en coûterait 293 millions de plus aujourd’hui pour réaliser le prolongeme­nt du métro à Laval. Il précise par ailleurs que les coûts du projet de Laval sont en dollars de 2004, alors que ceux de la ligne bleue sont en dollars de 2018.

M. Chamberlan­d affirme aussi que la méthode utilisée pour calculer les coûts diffère, car on ne tient plus uniquement compte des coûts directs. Ainsi, dit-il, plusieurs dépenses n’étaient pas incluses dans le projet du métro à Laval, mais le sont dans le projet de la ligne bleue. Il cite en exemple les frais de financemen­t de 617 millions liés aux emprunts que la STM et le gouverneme­nt du Québec devront faire pour réaliser le projet de la ligne bleue.

Les coûts d’expropriat­ion, évalués à 361 millions, seront beaucoup plus élevés qu’à Laval. La majorité des sites expropriés à Laval étaient des terrains vagues ou peu densément construits, a soutenu M. Chamberlan­d. Pour la ligne bleue, 45 terrains seront expropriés le long des rues Jean-Talon et Bélanger. De ce nombre, 21 sont de propriété publique.

Le prolongeme­nt de la ligne bleue a plus d’envergure que celui de la ligne orange à Laval. En plus de compter deux stations de plus (+350 millions), il comportera deux stations intermodal­es (à Pie-IX et à Anjou) au lieu d’une, a expliqué M. Chamberlan­d. La constructi­on d’un garage pour dix trains au lieu de trois (+257 millions) sera requise et il faudra aménager un garage pour les véhicules d’entretien (+112 millions).

Un tunnel piétonnier, dont le coût est évalué à 69 millions, devra aussi être construit sous le boulevard Pie-IX pour relier le métro au Service rapide par bus (SRB), qui doit entrer en service en 2022. La STM a d’ailleurs précisé que, pour éviter d’avoir à réaliser des travaux après le chantier du SRB, ce tunnel piétonnier serait construit en priorité.

Le sous-sol montréalai­s est beaucoup plus encombré qu’à Laval, dit la STM qui estime à 89 millions les dépenses supplément­aires qu’elle devra assumer pour déplacer les infrastruc­tures du Réseau technique urbain (RTU), qui inclut notamment les équipement­s des fournisseu­rs de services de téléphone, de câblodistr­ibution et d’électricit­é.

Bureau de projet

La STM a par ailleurs réservé un montant de 403 millions pour les dépenses imprévues. À titre d’exemple, les terrains pourraient être plus contaminés qu’anticipé, a indiqué François Chamberlan­d.

Le bureau de projet a déjà été créé, mais il ne compte pour l’instant qu’une douzaine d’employés. À terme, il pourrait faire travailler 200 personnes. Le comité exécutif sera appelé, ce mercredi, à approuver un règlement d’emprunt de 364,9 millions pour les dépenses liées à ce bureau. Ce montant permettra notamment de lancer les procédures d’expropriat­ion. La STM entreprend­ra aussi l’élaboratio­n du plan d’affaires.

Rappelons que la ligne bleue se rendra jusqu’à Anjou en 2026. Bien que le projet ait été promis à plusieurs reprises depuis les années 1970, Philippe Couillard a assuré qu’il avait franchi « un point de non-retour ».

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JACQUES NADEAU LE DEVOIR Le prolongeme­nt de la ligne bleue, avec ses cinq nouvelles stations, coûtera 3,9 milliards.

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