Le Devoir

Le président sous pression malgré l’abandon de sa réforme

- MARCO SIBAJA à Managua

Le président du Nicaragua, Daniel Ortega, tentait lundi d’apaiser la tension qui reste forte, malgré l’abandon de sa réforme controvers­ée des retraites à l’origine d’un mouvement de colère qui a fait 27 morts.

Son épouse, et vice-présidente, Rosario Murillo, a annoncé lors d’une conférence de presse que les manifestan­ts arrêtés ces derniers jours seraient libérés, sur demande de l’archevêque de Managua, Leopoldo Brenes, «afin d’établir les bases du dialogue ».

Elle a aussi indiqué qu’un policier était décédé dimanche lors des violences. Le Centre nicaraguay­en des droits de l’homme (CENIDH) a relevé son bilan à 26 morts, dont un caméraman tué par balle en plein reportage, sans inclure ce policier.

Malgré tout, des manifestat­ions hostiles au gouverneme­nt étaient toujours prévues en fin de journée, la principale à 15h (heure locale) à l’appel du Conseil supérieur de l’entreprise privée (COSEP), pourtant allié d’Ortega depuis son arrivée au pouvoir il y a 11 ans. Les étudiants, qui ont lancé ce mouvement de protestati­on, ont également prévenu qu’ils continuera­ient à manifester.

Dimanche, le président de gauche avait fait un premier geste d’apaisement en annulant la réforme polémique, qui devait augmenter les contributi­ons sociales des salariés et des employeurs afin de réduire le déficit de la Sécurité sociale (76 millions de dollars).

La corruption en filigrane

La réforme, qui réduisait aussi de 5% le montant des retraites sur recommanda­tion du Fonds monétaire internatio­nal (FMI), avait déclenché mercredi dernier une révolte des étudiants qui s’est rapidement propagée au reste de la population.

Ce mouvement de rébellion est assez inhabituel dans ce pays pauvre d’Amérique centrale, où l’armée exerce un contrôle fort de l’ordre public.

Et si la colère ne retombe pas, c’est qu’elle reflète un mécontente­ment plus général de la population, excédée par la détériorat­ion de ses conditions de vie et par un gouverneme­nt accusé de corruption. «Les manifestat­ions […] sont contre un gouverneme­nt qui nie la liberté d’expression, la liberté de la presse et celle de manifester pacifiquem­ent», a déclaré à l’AFP Clifford Ramirez, étudiant en sciences politiques de 26 ans qui faisait partie des premiers à manifester.

Alors que les manifestat­ions ont dégénéré ce week-end, avec des saccages de commerces et bâtiments publics, le gouverneme­nt a déployé les forces de l’ordre qui, selon les manifestan­ts, ont utilisé des armes à feu.

Lundi, les rues de Managua étaient désertes, avec aucun bus en circulatio­n et nombre d’entreprise­s signalant une faible affluence des salariés.

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