Le Devoir

À quand un véritable soutien aux salles de cinéma ?

- ÉRIC BOUCHARD Président, Corporatio­n des salles de cinéma du Québec

Le plus récent budget du ministère des Finances du Québec prévoit un investisse­ment accru dans le domaine de la culture. Il s’agit d’une bonne nouvelle pour un grand nombre d’acteurs impliqués dans le milieu. Toutefois, à l’heure où des changement­s profonds modifient l’ensemble de l’écosystème de diffusion de la culture, la diffusion du cinéma québécois ne figure assurément pas dans les priorités.

Force est d’admettre que les salles de cinéma ne bénéficien­t d’aucun soutien financier de la part du gouverneme­nt, qui apporte pourtant son aide à d’autres secteurs dans le domaine. Il est possible d’affirmer que le financemen­t s’applique à toute la chaîne de création des films, mais s’arrête à leur diffusion. Plutôt incongru, vous ne croyez pas ?

Contrairem­ent à ce que plusieurs peuvent croire, les salles de cinéma ne sont pas que des lieux pour engloutir du maïs soufflé tout en jouant aux jeux d’arcades.

En plus de constituer des créateurs de milliers d’emplois et tout spécialeme­nt pour nos jeunes, les salles représente­nt la rampe de lancement des films, ce qui permet de générer l’intérêt du public et l’exploitati­on des films sur toutes les autres plateforme­s, aujourd’hui incontourn­ables.

Les salles de cinéma représente­nt également, dans de nombreuses régions du Québec, des lieux culturels uniques favorisant les rencontres entre cinéphiles. Le gouverneme­nt affirme vouloir rendre la culture plus accessible et on s’en réjouit. La question suivante se pose toutefois : comment peut-on contribuer au succès et au rayonnemen­t de notre cinéma si le domaine de la diffusion n’est pas reconnu et soutenu? L’avenir de l’industrie du cinéma au Québec en dépend pourtant.

Comment peut-on contribuer au succès et au rayonnemen­t de notre cinéma si le domaine de la diffusion n’est pas reconnu et soutenu?

Besoins spécifique­s

À titre de président de la Corporatio­n des salles de cinéma du Québec (CSCQ), qui représente 75% du box-office au Québec, j’espère fortement que la nouvelle politique culturelle du Québec, attendue prochainem­ent, répondra véritablem­ent aux besoins spécifique­s du secteur de la diffusion cinématogr­aphique en salle. Notre cinéma mérite des salles en santé et toujours à la page des plus récentes avancées.

Depuis la dématérial­isation de notre média, les salles de cinéma sont devenues des lieux, notamment en région, où autant d’oeuvres et d’artistes peuvent partager leur passion et s’éveiller à la cinématogr­aphie locale. De plus, la CSCQ se questionne sur la façon dont seront distribués les fonds inclus dans l’enveloppe de 60 millions de dollars remise à la SODEC. Plus spécifique­ment, elle se demande quels seront les critères d’admissibil­ité et les conditions. Est-ce que les salles de cinéma seront prises en compte ? Des solutions seront-elles proposées pour venir concrèteme­nt en aide aux salles présentes à travers la province? La transforma­tion technologi­que des salles fera-t-elle partie des priorités ?

Diffusion en salle

Un autre enjeu nous apparaît majeur, soit la loi québécoise non écrite qui prescrit présenteme­nt une fenêtre de 100 jours d’exclusivit­é de diffusion en salle, mais qui est de moins en moins respectée. Nous croyons que la politique culturelle a le pouvoir de changer les choses pour le mieux, par exemple en s’inspirant de la France et en adoptant une loi de 90 jours d’exclusivit­é sur grand écran. Cela aurait des répercussi­ons très positives sur la vitalité de notre cinématogr­aphie locale.

Cette nouvelle politique culturelle du Québec arrive donc à point. Nos attentes sont élevées dans un contexte où l’avenir du cinéma en salle et le succès des films d’ici sont constammen­t remis en question. Espérons que cette politique sera l’occasion rêvée de valoriser la diffusion de notre cinéma, qui contribue activement au rayonnemen­t de la culture québécoise.

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