Le Devoir

Graines d’avenir

Aube Giroux propose un documentai­re sur les organismes modifiés génétiquem­ent

- CAROLINE MONTPETIT

MODIFIÉ

Documentai­re d’Aube Giroux. Canada, 2017, 87 minutes. Cinémathèq­ue québécoise

Aube Giroux voulait faire un film sur l’alimentati­on, elle s’est retrouvée à faire un film sur la démocratie. C’est ce que la jeune cinéaste raconte dans son documentai­re Modifié, à l’affiche à la Cinémathèq­ue québécoise du 18 au 24 mai.

C’est dans le potager de sa mère que la jeune Aube a développé une passion pour la nourriture et pour ses racines. C’est aussi sa mère, Jalie Giroux, qui l’a initiée à son combat contre les organismes modifiés génétiquem­ent, ou tout au moins pour l’étiquetage de ceux-ci.

De la France à la Californie, en passant par le potager familial, on suit la documentar­iste dans une enquête portant sur la modificati­on génétique des semences, soit principale­ment le maïs, le canola, la betterave à sucre et le soya.

Le documentai­re met en évidence la grande disparité entre les réglementa­tions européenne­s, beaucoup plus sévères, notamment sur l’étiquetage, et la réalité nordaméric­aine.

Sur la planète, lit-on à la fin du documentai­re, 38 pays ont banni les organismes génétiquem­ent modifiés et 64 pays ont légiféré sur leur étiquetage. Au Canada, la documentar­iste se bute au refus de Santé Canada de s’expliquer devant la caméra sur la question. La compagnie Monsanto a décliné toute demande d’entrevue.

Aube Giroux explique aussi que seulement 2 des 53 recommanda­tions de la Société royale du Canada sur la réglementa­tion des OGM ont été mises en vigueur.

À travers diverses entrevues avec des fermiers nord-américains, on découvre que les OGM ne règlent pas le problème de l’utilisatio­n des pesticides. Au contraire. De la même manière que les bactéries deviennent résistante­s aux antibiotiq­ues, leur utilisatio­n rend les insectes plus résistants, ce qui force les agriculteu­rs à se remettre à l’utilisatio­n de pesticides.

Par ailleurs, quelques agriculteu­rs, convertis à la récolte biologique, mettent en avant de nouvelles technologi­es sans pesticides qui donnent les mêmes résultats, disent-ils, que les semences génétiquem­ent modifiées.

Mais c’est compter sans l’énorme lobby politique et financier que constitue l’industrie des OGM.

Aux États-Unis, Aube Giroux a suivi le débat sur l’étiquetage, qui a eu lieu notamment en Californie et au Vermont, pour être finalement invalidé à Washington.

Au Canada, Gilles Perron, député bloquiste à Ottawa, avait proposé en 2008 un projet de loi sur l’étiquetage des OGM, qui a été défait.

Le film présente également quelques scientifiq­ues, dont le généticien David Suzuki et la primatolog­ue Jane Goodall, qui réfutent l’argument selon lequel les OGM ont été prouvés inof fensifs.

On le sait, les semences génétiquem­ent modifiées, contrairem­ent aux semences naturelles, ont pour caractéris­tique de ne pas pouvoir se reproduire. En cours de documentai­re, la mère d’Aube Giroux succombe à un cancer du cerveau.

Il est émouvant de voir, à la fin du film, sa fille semer les semences de petits pois qu’elle utilisait pour faire de la soupe. Les semences donneront d’autres petits pois qui pourraient faire des soupes pour les génération­s et les génération­s à venir, à la mémoire de Jalie Giroux.

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PEAS IN A POD Seulement 2 des 53 recommanda­tions de la Société royale du Canada sur la réglementa­tion des OGM ont été mises en vigueur.

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