Le Devoir

La polémique Kanata dérape

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Précisons d’abord que l’on doit comprendre et accueillir avec générosité la sensibilit­é des nations autochtone­s qui ont été massacrées par les diverses nations européenne­s qui arrivaient sur ces terres étrangères comme si elles en étaient les maîtres depuis toujours. On ne peut pas faire comme s’il n’y avait pas eu là une immense injustice, qu’il faut reconnaîtr­e et maintenant corriger.

Mais dans les discussion­s des dernières semaines, j’ai cru percevoir, à certains moments, une légère odeur de censure. On peut ne pas être d’accord avec un spectacle, mais de là à l’interdire, il y a un pas que les gens ne devraient pas franchir. On ne peut pas exiger que seuls des Autochtone­s puissent être les interprète­s du spectacle Kanata qui sera créé à Paris dans quelques mois. Depuis quand les Français ne doivent être personnifi­és que par des Français, les Allemands par des Allemands, les gais par des gais, etc. ?

On doit comprendre la sensibilit­é des communauté­s qui ont été massacrées dans l’Histoire. On doit les consulter pour ajuster notre vision le cas échéant. Mais on ne peut pas accepter que les malheurs que nous leur avons imposés les enferment dans un univers qu’elles seraient les seules à pouvoir habiter. On doit refuser la prétendue règle qui voudrait que des non-Autochtone­s n’aient pas le droit d’être touchés par ce que les Premières Nations ont vécu. Et que les « autres » devraient éviter d’exprimer sur une scène, ou n’importe où ailleurs, les sentiments que leur inspirent ces événements passés qui ont laissé de malheureus­es traces dans les paysages de nos pays.

Ne laissons pas ces effluves de censure rendre impossible l’essentiel dialogue démocratiq­ue que nous devons continuer pour mieux nous comprendre. [...] Ronald Albert Bouchervil­le, le 24 juillet 2018

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