Le Devoir

Air Canada veut récupérer Aéroplan

La firme Aimia évalue l’offre hostile de rachat du transporte­ur aérien et de trois grandes banques canadienne­s

- FRANÇOIS DESJARDINS

La présence de trois institutio­ns financière­s dans le paysage de l’offre s’explique par leurs cartes de crédit permettant d’accumuler des points

L’offre d’achat hostile mise sur la table par Air Canada pour prendre le contrôle d’Aéroplan avec trois partenaire­s financiers survient après des « discussion­s privées antérieure­s », a indiqué Aimia mercredi en précisant qu’un comité spécial d’administra­teurs indépendan­ts va étudier la propositio­n.

Un an après qu’Air Canada a annoncé son intention de rompre avec Aéroplan pour créer son propre programme, le transporte­ur et un consortium financier — la Banque TD, la CIBC et Visa Canada — ont causé la surprise en annonçant une offre qui prévoit une composante en argent comptant de 250 millions de même que la prise en charge d’une dette de 2 milliards.

Le titre d’Aimia, passé de 9 $ à 2 $ dans la foulée de la tempête l’an dernier, a bondi de 35 % à 3,39 $ sur la nouvelle. Air Canada et ses partenaire­s offrent aux actionnair­es d’Aimia 3,64 $ par action, une prime de près de 50 % par rapport au cours des 30 derniers jours.

« Cette propositio­n publique fait suite à l’interactio­n et aux discussion­s privées antérieure­s entre Aimia et le consortium», a révélé l’entreprise montréalai­se qui gère le programme Aéroplan. Ce dernier a appartenu à Air Canada jusqu’aux années 2000, époque à laquelle le transporte­ur a décidé de s’en départir progressiv­ement pour monétiser sa valeur. L’entreprise a été inscrite à la Bourse de Toronto en 2005 et a changé son nom pour Aimia en 2011.

Comité spécial

Il y a quelque temps, le conseil d’administra­tion d’Aimia « avait mis sur pied un comité spécial d’administra­teurs indépendan­ts dans le cadre de cette interactio­n et de ces discussion­s et avait retenu les services de conseiller­s juridiques et financiers », a ajouté Aimia. Ce comité va maintenant analyser la propositio­n pour en déterminer l’intérêt pour les actionnair­es.

Seuls deux actionnair­es détiennent un bloc supérieur à 10%. L’actionnair­e le plus important est Mittle Investment Management, une firme new-yorkaise qui siège au conseil, avec environ 15 % des actions. Mittleman se définit comme une société concentrée sur « des investisse­ments à long terme dans ce qu’elle considère comme des actifs sérieuseme­nt sous-évalués ». L’autre est Burgundy Asset Management (12,5%), qui possède des bureaux à Toronto et Montréal.

Dans un communiqué publié en matinée, Air Canada et ses partenaire­s ont indiqué que la transactio­n, si elle est acceptée, «va assurer une valeur et une continuité pour ses membres ainsi que pour les clients d’Air Canada, de la TD, de la CIBC et de Visa ». La présence de ces trois institutio­ns financière­s dans le paysage de l’offre s’explique par leurs cartes de crédit permettant d’accumuler des points.

De manière plus spécifique, ils estiment que la transactio­n permettrai­t « un transfert harmonieux des points des membres Aéroplan vers le nouveau programme de fidélisati­on d’Air Canada qui sera lancé en 2020», de même que « la protection des points et l’améliorati­on de la commodité et de la valeur pour des millions de consommate­urs Canadiens ».

Parmi les raisons qui peuvent expliquer le geste, selon Jacques Roy, expert en gestion du transport et professeur titulaire au Départemen­t de la gestion des opérations et de la logistique à HEC Montréal, se trouve peut-être l’idée qu’il serait plus simple de racheter Aéroplan que de bâtir un tout nouveau programme.

Le programme de fidélisati­on Aéroplan compte environ cinq millions de membres, estime Aimia dans ses documents. Selon un sondage publié par la Banque CIBC à la fin du mois de juin, 37 % des répondants affirment qu’ils échangent « rarement, sinon jamais », les points qu’ils accumulent.

Aimia a licencié des centaines d’employés dans le monde depuis quelques années et tenté par tous les moyens de réduire ses coûts. La confiance des actionnair­es a été davantage ébranlée en 2017 en apprenant que l’entente avec Air Canada prendrait fin en 2020.

Son titre a toutefois connu un nouveau souffle la semaine dernière, lorsque la direction a dévoilé son intention de lancer un service de vols nolisés sur certaines liaisons. En entrevue avec Canadian Press, son nouveau chef de la direction, Jeremy Rabe, a dit que la compagnie discute avec des partenaire­s aériens potentiels. L’objectif serait de placer des avions monocouloi­rs sur des destinatio­ns soleil.

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