Le Devoir

Les arrestatio­n d’activistes se multiplien­t au Liban

La répression dont semblent victimes des citoyens prenant la parole sur les réseaux sociaux provoque inconfort et colère

- LAYAL ABOU RAHAL À BEYROUTH AGENCE FRANCE-PRESSE

Les interpella­tions récurrente­s au Liban de militants actifs sur les réseaux sociaux ont suscité une vague de réactions et l’indignatio­n d’ONG qui craignent un recul de la liberté d’expression dans ce petit pays du Proche-Orient.

Réputé pour être une oasis de liberté dans le monde arabe, le Liban est le théâtre depuis plusieurs mois d’arrestatio­ns d’activistes ou de simples citoyens en raison de leurs commentair­es sur la toile critiquant des responsabl­es politiques ou traitant de questions telles que la corruption ou la religion.

La dernière semaine, le bureau de lutte contre la cybercrimi­nalité a ainsi interpellé six activistes, avant de les relâcher. L’un d’eux avait fait assumer au chef de l’État la responsabi­lité de la détériorat­ion des conditions socioécono­miques. Deux autres avaient tourné en dérision un « miracle » attribué à l’un des saints de l’Église maronite.

Depuis mardi soir, deux autres activistes ont été interpellé­s tandis qu’un troisième devrait comparaîtr­e vendredi devant le bureau chargé de la cybercrimi­nalité.

Riposte populaire

Face à la recrudesce­nce de ces pratiques « de répression », plusieurs centaines de citoyens et activistes ont organisé mardi soir un sit-in dans le centre-ville de Beyrouth pour dénoncer « le recul sans précédent de la liberté d’expression et du niveau général des libertés ».

« Nous constatons davantage d’interventi­on de la part des services de surveillan­ce dans les espaces d’expression au Liban », explique à l’AFP une responsabl­e locale d’Amnesty Internatio­nal, Diala Haidar.

Si la « liberté d’expression par voie orale ou écrite ainsi que la liberté d’impression » sont garanties par la Constituti­on libanaise, cela n’empêche pas les appareils sécuritair­es, selon Mme Haidar, de recourir «de manière arbitraire » à des articles du code pénal qui sanctionne­nt l’atteinte à la personne du président de la République, « le dénigremen­t des rites religieux » ou encore « l’incitation à la haine confession­nelle ».

De son côté, Bassam Khawaja, chercheur auprès de l’ONG Human Rights Watch, note depuis deux ans « une inquiétant­e tendance de répression accrue des critiques visant les autorités ».

Sur sa page Facebook, Elie Khoury, 25 ans, avait écrit vendredi un long commentair­e à l’adresse du président libanais Michel Aoun, qui lui a valu une interpella­tion.

« Le peuple, M. le président, paie les factures de téléphone et d’Internet les plus chères du monde et bénéficie du pire service […] », avait-il déploré.

« Hélas, vous n’avez pas été à la hauteur des espoirs parce que vous avez transformé l’État en un foyer familial», a-t-il poursuivi, en allusion à l’élection ou la désignatio­n de plusieurs membres de la famille du chef de l’État à des postes parlementa­ires et ministérie­ls ou de conseiller­s. Cet étudiant en gestion a plus tard été relâché à la suite de l’interventi­on de son avocat.

Le pays est réputé pour être une oasis de liberté dans le monde arabe

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