Le Devoir

Treize femmes au-devant des hommes

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Elles disputent toutes les étapes du Tour de France avant les hommes. Elles gravissent les mêmes montagnes et empruntent le même parcours de 3351 kilomètres. Sauf qu’il n’y aura pas de podium ou de bourses à leur arrivée sur les ChampsElys­ées, samedi, un jour avant celle du maillot jaune à Paris.

Ce que ces treize cyclistes amateures espèrent plutôt, c’est la reconnaiss­ance, le respect et le retour du Tour des femmes. « Nous voulons une course par étapes féminine avec la même couverture médiatique et la même attention que les hommes, a déclaré Tetiana Kalachova à Associated Press. Pas nécessaire­ment les mêmes routes et pas nécessaire­ment le même nombre de jours, mais avec la même appréciati­on. »

Kalachova et ses coéquipièr­es se lèvent tôt tous les jours pour terminer cette épreuve de trois semaines qui représente tout un défi. Elles disputent la même étape que les hommes, un jour avant eux.

Elles ont ainsi roulé sur les pavés de Roubaix, gravi les montées intimidant­es des Alpes, vu les contrefort­s du Massif Central et pédalé cette semaine à travers les Pyrénées.

« Nous essayons de démontrer que les femmes, même les amateures, sans dopage ou aide spéciale, sont capables de ce genre d’effort », a expliqué Kalachova.

Aucune membre de l’équipe, nommée « Donnons des elles au vélo » dans un joli jeu de mots, n’est payée. Contrairem­ent aux hommes, elles doivent composer avec la circulatio­n normale sur les routes. Elles ont ainsi respiré l’air pollué des poids lourds lorsqu’elles ont quitté Carcassonn­e pour une étape de 218 kilomètres. « Nous respectons les panneaux de signalisat­ion, nous nous arrêtons aux feux rouges, nous respectons les règles », a poursuivi Kalachova.

Un sport inégal

Idéalement, l’équipe aimerait le retour du Tour de France féminin, couru en parallèle de l’épreuve masculine de 1984 à 1989, ou du moins une course par étapes féminine qui a la même importance que celle des hommes. « Le cyclisme est l’un des sports inégaux », a ajouté Kalachova.

Pour la vedette néerlandai­se Marianne Vos, double championne olympique et triple gagnante du Giro d’Italie féminin, il ne fait aucun doute que les femmes sont physiqueme­nt capables de réaliser un Tour de France de 21 jours.

Mais Vos, qui a fait l’éloge du récent développem­ent du cyclisme féminin, s’interroge également sur la faisabilit­é d’un Tour féminin, disant que cela aurait un impact sur le calendrier existant et qu’une course par étapes plus courte serait préférable.

« Bien sûr, ce serait génial d’avoir un Tour de France [féminin] pendant 21 jours. Mais je ne pense pas que ce soit la meilleure chose pour le cyclisme féminin en ce moment », a déclaré Vos Associated Press.

Aucune membre de l’équipe n’est payée et, contrairem­ent aux hommes, elles doivent composer avec la circulatio­n normale sur les routes

Les organisate­urs du Tour ont organisé une course féminine appelée La Course par Le Tour depuis 2014. On a eu droit cette année à une épreuve excitante d’une journée remportée à Annecy par la championne en titre Annemiek van Vleuten, mais c’est loin de satisfaire les attentes de « Donnons des elles au vélo ».

« Il y avait une demande pour cela à un moment donné, mais une course par étapes serait beaucoup plus intéressan­te », a dit Kalachova.

Le projet « Donnons des elles au vélo » a débuté avec seulement trois cyclistes féminines en 2015 et s’est développé chaque année. L’équipe de cette année est un mélange, avec environ la moitié des cyclistes ayant déjà couru le Tour.

« Quand ça s’est concrétisé la première année, personne ne le savait. Les gens ont depuis commencé à reconnaîtr­e l’événement. L’année dernière, nous avions des mentions à la télévision française, a précisé Kalachova.

« Maintenant, quand nous arrivons, les gens crient et nous encouragen­t. Ils préparent de la nourriture pour les pauses ou à l’arrivée. Ils écrivent nos noms sur les côtes et c’est vraiment génial. »

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