Le Devoir

Tsipras assume « la responsabi­lité politique de la tragédie »

- CATHERINE BOITARD HÉLÈNE COLLIOPOUL­OU

Le premier ministre grec Alexis Tsipras a assumé vendredi « la responsabi­lité politique » de l’incendie qui a causé la mort lundi de 87 personnes à l’est d’Athènes, le plus meurtrier jamais vu dans le pays, mais n’a rien concédé sur l’organisati­on des secours la nuit du drame.

Devant la polémique qui a éclaté vendredi au lendemain de trois jours de deuil national, M. Tsipras, s’exprimant devant son conseil des ministres, a indiqué « assumer intégralem­ent devant le peuple grec la responsabi­lité politique de cette tragédie ».

Comme plusieurs de ses ministres et son porte-parole dans les dernières 24 heures, il a montré du doigt « les irrégulari­tés urbanistiq­ues» chroniques, c’est-à-dire principale­ment les constructi­ons illégales sur les côtes, comme c’était le cas à Mati, station balnéaire située à 40 km d’Athènes qui a été ravagée par les feux.

Outre un bouquet de mesures chiffré à 40 millions d’euros (60 millions $CAN) pour subvenir aux besoins des sinistrés, M. Tsipras s’est engagé à constituer rapidement « un plan national pour parer » à ces irrégulari­tés, et a invité l’opposition à « participer à cet effort national ».

Occupé depuis son arrivée au pouvoir début 2015 à faire face à « la catastroph­e humaine provoquée par les politiques d’austérité » en raison de la crise économique, le premier ministre de gauche radicale a concédé qu’il avait peut-être délaissé «le risque d’autres désastres émanant des irrégulari­tés du passé ».

Les mea culpa sur l’urbanisme sont récurrents dans le pays après chaque catastroph­e, sans provoquer de réels coups d’arrêt à l’indiscipli­ne citoyenne et à la complaisan­ce officielle dont elle bénéficie.

Mais M. Tsipras n’a pas fait d’autocritiq­ue sur la gestion opérationn­elle des événements lundi soir, louant plutôt les efforts des pompiers et volontaire­s.

Colère

À Mati, de nombreux survivants étaient au contraire en colère, reprochant aux autorités un manque de prévention et de consignes efficaces pour évacuer la ville.

Quand l’incendie a éclaté, « ils auraient dû envoyer un hélicoptèr­e avec un mégaphone pour nous dire d’aller à la mer, et tout le monde aurait dû y aller sans panique et à pied pour éviter un chaos de voitures », a ainsi estimé auprès de l’AFP Nikos Stavrinidi­s, qui a dû se laisser porter par le courant pendant cinq heures dans la mer avec d’autres personnes, dont deux se sont noyées.

Les victimes ont péri noyées, ou bien suffoquées ou brûlées par le feu, lors d’embouteill­ages créés par la panique dans les ruelles du village, ou en cherchant des passages vers la côte, souvent rocheuse ou inaccessib­le en raison de la présence de villas ou de complexes touristiqu­es.

M. Tsipras a par ailleurs semblé faire sienne la thèse de l’incendie volontaire, à l’appui de laquelle son gouverneme­nt a indiqué détenir « un élément sérieux » jeudi soir.

À Mati, les sauveteurs qui continuent de ratisser les décombres au milieu des pins calcinés n’excluaient pas de nouvelles découverte­s macabres.

L’identifica­tion des victimes doit aussi durer encore quelques jours, « de 75 à 80 % des corps étant carbonisés », a indiqué Grigoris Léon, président de la société grecque de médecine légale.

À Mati, où 49 % des maisons ont été déclarées inhabitabl­es, les rescapés continuaie­nt vendredi de tenter de sauver ce qui pouvait encore l’être, soutenus par un vaste élan de solidarité, avec l’afflux de dons et de volontaire­s.

Les mea culpa sur l’urbanisme sont récurrents dans le pays après chaque catastroph­e, sans provoquer de réels coups d’arrêt à l’indiscipli­ne citoyenne

 ?? ANGELOS TZORTZINIS AGENCE FRANCE-PRESSE ?? Près d’une semaine après le déclenchem­ent des incendies les plus mortels de son histoire récente, avec un bilan de 82 morts, la Grèce panse encore ses plaies alors que les secours recherchen­t toujours les corps de ceux dont on reste sans nouvelles.
ANGELOS TZORTZINIS AGENCE FRANCE-PRESSE Près d’une semaine après le déclenchem­ent des incendies les plus mortels de son histoire récente, avec un bilan de 82 morts, la Grèce panse encore ses plaies alors que les secours recherchen­t toujours les corps de ceux dont on reste sans nouvelles.

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