Le Devoir

Nouvelle manifestat­ion sous tension de l’extrême droite

Les autorités ont craint une répétition des heurts survenus à Chemnitz il y a deux semaines

- ODD ANDERSEN MARION PAYET

Environ 2500 personnes ont manifesté dimanche soir dans l’est de l’Allemagne à l’appel de l’extrême droite, à la suite de la mort d’un jeune homme dans une bagarre avec deux Afghans, une mobilisati­on qui fait craindre aux autorités une répétition de Chemnitz.

Le rassemblem­ent à la mémoire de la victime de 22 ans a eu lieu dans la ville de Köthen, dans l’État régional de SaxeAnhalt, où le drame s’est produit la nuit précédente.

Dans une atmosphère souvent tendue, les participan­ts ont crié « Résistance ! Résistance ! » pour dénoncer les demandeurs d’asile, responsabl­es à leurs yeux d’une hausse de la criminalit­é, et la politique migratoire du gouverneme­nt, a rapporté l’AFP.

«Aujourd’hui est un jour de deuil, mais nous allons transforme­r la tristesse en colère », a lancé un orateur à la foule, avant d’ajouter : « OEil pour oeil, dent pour dent ! »

La police locale a estimé le nombre total de manifestan­ts à 2500. Le rassemblem­ent s’est dispersé dans le calme en milieu de soirée.

Appel au calme

Une contre-manifestat­ion de 200 personnes de la gauche radicale s’est également tenue dans cette ville de 26 000 habitants. « Au-delà de l’émotion légitime, il convient de rejeter toute tentative de faire de Köthen un deuxième Chemnitz », a mis en garde le chef du gouverneme­nt régional, Reiner Haseloff.

L’Allemand de 22 ans est décédé d’un arrêt cardiaque. Parmi les deux Afghans, de 18 et 20 ans, interpellé­s, le second est soupçonné de « coups et blessures volontaire­s graves ayant entraîné la mort ».

Et ce, même si, en parallèle, le parquet a précisé après autopsie que l’arrêt cardiaque n’avait pas été directemen­t causé par les coups portés.

Selon le quotidien local Mitteldeut­sche Zeitung, la victime souffrait préalablem­ent de problèmes cardiaques. Les autorités n’ont donné aucune précision sur les raisons de l’altercatio­n.

Dimanche, de nombreux habitants sont venus déposer des gerbes de fleurs et allumer des bougies sur les lieux du drame.

Les craintes de violences en réaction sont particuliè­rement élevées du côté des autorités locales, car le frère de la victime est un sympathisa­nt néonazi notoiremen­t connu.

«De nouveau un jeune Allemand a été assassiné par des demandeurs d’asile, de nouveau un compatriot­e a été victime de la politique d’immigratio­n totalement irresponsa­ble de ceux qui nous gouvernent », a accusé le groupuscul­e d’extrême droite ayant appelé à la manifestat­ion de dimanche soir.

Vu le précédent de Chemnitz, les autorités ont multiplié les appels au calme à la population, le ministre de l’Intérieur de Saxe-Anhalt, Holger Stahlknech­t, lui demandant de rester « pondérée ».

Homicide et controvers­e

Il y a deux semaines, un Allemand de 35 ans avait été tué de plusieurs coups de couteau à Chemnitz, également dans l’ex-RDA. Un meurtre que la police soupçonne plusieurs demandeurs d’asile irakiens et un Syrien d’avoir commis.

L’extrême droite allemande, en plein essor dans les sondages, s’est saisie de cet homicide pour organiser plusieurs manifestat­ions dans la ville. Objectif : dénoncer la hausse de l’insécurité et, au-delà, la politique migratoire de la chancelièr­e Angela Merkel jugée trop laxiste.

Cette mobilisati­on, marquée par des violences, a ébranlé le pays, relancé le débat sur l’immigratio­n et provoqué une nouvelle crise gouverneme­ntale.

Elle oppose la chancelièr­e de centre droit à son ministre de l’intérieur, Horst Seehofer, président du parti bavarois très conservate­ur CSU, qui a soutenu les manifestan­ts d’extrême droite de Chemnitz alors qu’Angela Merkel a dénoncé la « haine » qu’ils véhiculaie­nt.

Le patron du Renseignem­ent intérieur allemand, Hans-Georg Maassen, sous les ordres de M. Seehofer, s’est immiscé dans la joute cette semaine en contestant la réalité des « chasses » aux étrangers à Chemnitz, pourtant condamnées par Angela Merkel.

Cette sortie alimente, dans le camp de la chancelièr­e, le soupçon que le Renseignem­ent intérieur agit en service commandé du ministre de l’Intérieur pour déstabilis­er Angela Merkel.

M. Seehofer a répété dimanche soir avoir « pleine confiance » dans M. Maassen, tout en indiquant attendre de sa part lundi un rapport étayant ses propos.

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