Le Devoir

Une ébullition qui va bien au-delà de Montréal

- ETIENNE PLAMONDON EMOND

Magog n’est pas le premier endroit au Québec auquel on pense lorsqu’on parle d’intelligen­ce artificiel­le (IA). Or, comme à d’autres endroits à l’extérieur de Montréal, on souhaite entrer dans la danse.

L’investisse­ur et entreprene­ur en série Pierre Campeau y collabore avec Magog Technopole à la création d’une organisati­on qui fournira des services et un accompagne­ment en la matière aux entreprise­s. «On aimerait lancer les premières opérations d’ici Noël», indique l’ancien président de Sid Lee Technologi­es, qui peaufine actuelleme­nt le plan d’affaires. La MRC Memphrémag­og possède plus d’une cinquantai­ne d’entreprise­s dans le secteur des technologi­es de l’informatio­n, mais aucune spécialisé­e en IA. «Montréal est très forte, mais n’a pas un monopole, insiste Pierre Campeau. Il y a des université­s en région et les entreprise­s veulent y développer de l’expertise en IA.»

L’an dernier, l’agence de développem­ent économique Québec internatio­nal a répertorié les activités de ce domaine dans la région de la Vieille Capitale. Résultat: plus de 80 entreprise­s y oeuvrent de près ou de loin en IA. « Ce fut une surprise d’en trouver autant », signale Alexandra Masson, directrice innovation à Québec internatio­nal. Une fois qu’elle a présenté ces données publiqueme­nt, d’autres organisati­ons passées sous son radar se sont manifestée­s.

Pierre-Marc Jodoin, professeur au Départemen­t d’informatiq­ue de l’Université de Sherbrooke, travaille avec des entreprise­s implantées en région pour mettre au point des solutions informatiq­ues. L’IA y gagne du terrain, comme dans ses partenaria­ts avec d’autres chercheurs. «Il y a quelques années, je faisais de l’IA de manière épisodique. Aujourd’hui, c’est 100% de mes activités», illustre le professeur.

Tout en reconnaiss­ant le Mila, à Montréal, comme «un vaisseau amiral» dans le domaine, le reste du Québec mérite, selon lui, une attention en raison de l’importance des transforma­tions à venir. «On a besoin de gens compétents partout, dans toutes les université­s, et on doit former des personnes capables non seulement d’utiliser ces technologi­es, mais d’en comprendre les tenants et aboutissan­ts. »

L’Université Laval vient de lancer cet automne une maîtrise en informatiq­ue — Intelligen­ce artificiel­le axée vers une applicatio­n — et des stages en entreprise­s. «On s’est dit qu’un transfert d’expertise devait se faire du milieu universita­ire vers le milieu économique et les organismes», explique Christian Gagné, professeur au Départemen­t de génie électrique et de génie informatiq­ue de l’Université Laval. «On espère que, d’ici quelques années, on aura réussi à essaimer pour que tous les acteurs sérieux de la ville de Québec qui veulent prendre le virage puissent avoir accès à une main-d’oeuvre qualifiée.» Tant dans l’industrie que dans la recherche universita­ire, Mme Masson et M. Gagné considèren­t que les forces de Québec en IA sont complément­aires à celles de la métropole.

Jean Rouat, chercheur au Départemen­t de génie électrique et de génie informatiq­ue de l’Université de Sherbrooke, juge que la dynamique montréalai­se, dans laquelle les acteurs des mondes universita­ires et industriel­s peuvent se rencontrer régulièrem­ent et partager des lieux communs, «est hyper importante et difficile, voire impossible, à créer en région ». Néanmoins, « en région, il est possible de se spécialise­r et de développer des activités qui ne se font pas à Montréal», considère-t-il. C’est son cas, alors que ses travaux théoriques s’attardent au développem­ent d’algorithme­s pour une technologi­e — les processeur­s neuromorph­iques — qui ne devrait pas se répandre avant quelques années. Des solutions en IA pourraient donc aussi émerger des régions.

 ?? PHOTO : JACQUES NADEAU LE DEVOIR ??
PHOTO : JACQUES NADEAU LE DEVOIR

Newspapers in French

Newspapers from Canada